Yves Guéna, un vrai gaulliste !

Lors de sa venue dans ma circonscription au Salon de la Biographie organisé à Neuville-en-Ferrain, Yves Guéna m’avait dédicacé le deuxième tome de ses Mémoires, « D’Outre-Gaulle ». En apprenant son décès, à 93 ans, j’ai parcouru à nouveau cet ouvrage. Il jette une lumière pénétrante sur la vie politique de notre pays depuis 1940. Certes, il s’attache surtout aux années qui ont suivi la mort du Général de Gaulle. C’est le premier tome, « Le Temps des Certitudes » qui évoquait l’épopée gaulliste à laquelle Yves Guéna a participé. Mais en revenant dans les premières pages sur le début de l’aventure, il crée un contraste qui n’est pas fortuit.

J’ai connu deux hommes dont le destin a été parallèle. Le premier était Robert Galley, le second est Yves Guéna. En 1940, ils ont 18 ans. Au mois de Juin, à l’annonce de l’armistice, sans même avoir entendu l’Appel, ils partent chacun pour l’Angleterre afin de continuer le combat. Ils ne se connaissent pas. Ils refusent l’humiliante défaite de leur pays. Ils sont le discours en chair et en os qui défend l’honneur de la France et vise l’intérêt supérieur de la Patrie. Certes, la troisième raison invoquée par de Gaulle, le bon sens, ces hommes très jeunes n’en ont guère. Alors que tous les sages, les conformistes, les calculateurs et les arrivistes, s’apprêtent plus ou moins à collaborer ou à s’adapter à la situation, ils foncent, mus par un élan qui s’appelle le patriotisme. Ils feront la guerre d’un bout à l’autre, avec Leclerc pour Robert Galley, avec Koenig puis en rejoignant lui aussi la IIe DB pour Yves Guéna, qui sera grièvement blessé en Normandie. A leur retour à la vie civile, le premier fera Centrale, le second l’Ena, et après 1958, ils seront des « barons du gaullisme », ministres et Députés-Maires indéboulonnables de Troyes et de Périgueux.

Ces destins ont évidement une dimension exemplaire. Le courage de leur premier engagement dote leur « carrière »politique d’une légitimité morale que leur compétence, leur niveau de pensée et le choix de leurs électeurs n’ont fait que conforter. La comparaison entre de tels hommes et la foule des arrivistes incompétents et couards qui a envahi la scène politique de notre pays donne le vertige. Yves Guéna est resté profondément gaulliste. Cela signifie d’abord un sens aigu de la dignité de la France et de l’Etat. Celle-ci dépend essentiellement de la qualité des hommes qui l’incarnent. On sent progressivement le niveau baisser au fur et à mesure que le temps passe pendant qu’Yves Guéna inconditionnel du Général tente d’en maintenir les exigences dans les postes ministériels qu’il occupe ou au sein du parti qui se réclame du gaullisme. Un aveu ne trompe pas : c’est son mandat local de Maire qui a été le plus satisfaisant, même si la recherche du niveau national a toujours été chez lui une constante. Pour qui a participé à la vie politique, cela peut se traduire ainsi : en tant que Maire, j’ai pu agir concrètement,de manière visible pour le bien commun, par exemple la mise en valeur du patrimoine architectural de Périgueux, et au contact direct des électeurs au-delà des clivages idéologiques ; en tant qu’élu national ou ministre, j’ai défendu les idées pour lesquelles je me suis engagé, mais je n’ai que rarement pu les faire aboutir, soit par manque de temps, soit en raison des arcanes du monde politique et des calculs politiciens où l’on voit des manipulateurs non élus se jouer de ceux qui le sont. Yves Guéna était en mission en Afrique au début des années 1960. Il évoque peu le drame algérien et ne perçoit pas suffisamment combien le choix du Général difficilement évitable et surtout les conditions désastreuses dans lesquelles il a été assumé, ont cassé le nouvel élan donné au pays. 1968 et 1981 sont les soubresauts d’une nation qui se replie sur elle-même, sur des besoins matériels et sur des caprices hédonistes. C’est un pays où l’individu l’emporte sur le citoyen. Les hommes qui incarnent le pays après le Président Pompidou vont de plus en plus exprimer avec plus ou moins de conscience cette tendance à l’individualisme, dans les institutions comme dans leur comportement personnel. Ils vont accepter peu à peu la dissolution de la France avec sa perte se souveraineté. Yves Guéna, comme beaucoup d’autres, comme Maurice Schumann, si européen à l’origine, vont comprendre qu’il n’y a plus rien à sauver dans la dérive du parti qui ose se réclamer du gaullisme : ils vont voter contre Maastricht.

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  • Pascal , 8 mars 2016 @ 13 h 23 min

    Mai 68 est une révolution Orange, l’importation de l’idéologie des campus US des sixties, le triomphe du soft-power (en réalité très hard) de la Pax Americana.

    Il y a une certaine analogie entre Charles de Gaulle et Napoléon III. Ils ont tous les deux fait le maximum de ce qui était possible pour la France dans le cadre d’une liberté surveillée par le vainqueur.

    Je ne suis jamais en reste pour reprocher à Napoléon le petit sa honteuse guerre de Crimée au service de l’Anglois, honteuse guerre qui a empêché notre sœur russe de restituer la deuxième Rome à l’Europe. Les conséquences ont été tragiques au XXe siècle, entre autres la destruction des chrétiens par les Turcs en Asie Mineure. Mais il y a tout le reste, entre autres la salutaire intervention du corps expéditionnaire au Liban en 1860.

    Pour CdG c’est l’Algérie qui est et restera la tache indélébile. Avait-il le choix ? Je n’en suis pas certain. Le vainqueur de 1945, notre « protecteur », nous a signifié en 1956 lors de l’affaire de Suez qu’il n’était pas question pour nous de défendre ni nos biens ni nos intérêts. Alors garder les pétroles du Sahara…

    Qui contrôle l’approvisionnement en énergie contrôle le monde développé, donc la planète. C’est le sens du pacte du Quincy signée par Roosevelt. Roosevelt qui préconisait pour neutraliser l’Europe le transfert des population des empires coloniaux vers les métropoles.

    On a su faire payer très cher à Charles de Gaulle sa résistance à la construction européenne, construction européenne qui n’est que le faux nez de la domination américaine. 68 est la révolution Orange (autrement dit contre-révolution) qui a eu raison de CdG.

  • André , 8 mars 2016 @ 13 h 23 min

    Troy 8 mar 2016 à 12:01 at 12 h 01 min l==> Il y a plus de 50% des français qui sont pires que des abrutis. Dire que c’est en 2007, mon petit étudiant arabe qui me fera découvrir cela. Et moi, je m’esclaffe, mais c’est incroyable, les français pour plus de 50% ont un QI déficient, je n’en croyais pas mes yeux. Puis alors c’est cette saloperie d’Algérie. Pourquoi des français sont-ils aller faire de l’occupation, alors qu’il y avait tant de portions mortes à ressusciter en France ? Tenter de faire comme pour les amérindiens d’Amérique ? Lorsque l’on voit la façon dont un succube insulte et à des instincts de tueur, il est aisé de comprendre pourquoi le peuple algérien s’est révolté en 1954. Ensuite ils abandonnèrent les harkis. Les harkis ne furent pas l’affaire de De Gaulle, mais l’affaire des pieds noirs. Des harkis ont donné leur vie pour des pieds noirs, ils n’ont pas donné leur vie à De Gaulle… D’ailleurs, j’ai reçu le film — Les Harkis — qui me fut envoyé par le président des harkis. J’ai dû patienter plus d’un mois. Il possède un copyright, mais je peux en faire des copies pour un cercle restreint d’amis. Film de 90 minutes, bien conçu car avec des documents d’époques, des photos insoutenables même fugaces, des témoignages de survivants même y compris de certains dirigeants du FLN, qui d’ailleurs regrettent. Ce film est très bien il ne porte aucun jugement, il témoigne. Bien que par plusieurs reprises lorsque les scènes parfois horribles, on entende le De Gaulle avec son — je vous ai compris.. Cependant, je découvre, je pourrais dire, que certains bien placés, réalisent de nos jours que De Gaulle ne s’est pas trop mal débrouillé à gérer cette affaire d’Algérie alors qu’hier ils l’accusaient. Ont-ils retourné leur veste ? Je ne crois pas. La sagesse a commencé à faire place à cette soif de vouloir dominer un peuple. Les français n’avaient pas à faire de l’occupation en Algérie, pas plus que les allemands n’avaient à le faire en France ou encore les ricains en 45, mais papa De Gaulle n’a pas voulu et maman non plus.

  • Pascal , 8 mars 2016 @ 14 h 21 min

    @ Troy

    68 a pour but de guerre de soumettre la France à l’Empire. Pour se faire il faut dégommer et le patriotisme (incarné en l’occurrence par CdG) et l’influence du Parti communiste. Le gauchisme y pourvoira.

    Certaines sources avancent que CdG aurait rencontré le numéro deux de l’URSS le 29 mai 1968 à Baden-Baden. L’URSS qui avait parfaitement compris ce qui se tramait aurait accepté d’aider la France en faisant le nécessaire auprès du PCF pour mettre fin aux « Evenements ». Le lendemain c’est le 30 mai, donc la reprise en main par le pouvoir et la répression du mois de juin sera autant l’affaire de la police que de la CGT.

  • marie-france , 8 mars 2016 @ 14 h 22 min

    @ Troy ,vous êtes gaulliste ,çà vous regarde ,mais il ne vous a pas échappé que la haine de ce monsieur est à la hauteur de la nôtre ,lisez plus haut ,ce que ce personnage disait de nous ,vous l’aimeriez vous ?? quand à sa politique ,elle a donné la faveur aux communistes qui avec sa connivence les a présenté comme “résistants “,pour moi , résistants de dernière heure ,il a été toujours complaisant avec l’URSS,et avec le pc français

  • surcouf , 8 mars 2016 @ 17 h 11 min

    BRAVO MARIE FRANCE POUR VOTRE RÉPONSE et VOTRE DEVOIR DE MÉMOIRE.
    Unis par la pensée et la prière ce 11 mars pour commémoré la date où le Colonel BASTIEN-THIRY héros de l’Algérie Française, fervent catholique, père de trois filles était fusillé ainsi que trois autres héros sur ordre d’un vieillard qui pendant son exécution se reposait dans sa majestueuse sérénité.
    Semper fidelis

  • Marcus , 8 mars 2016 @ 18 h 20 min

    @ André

    Vos commentaires sont toujours aussi longs qu’un discours de Fidel Castro, et sont pleins de contradictions si on lit dans le détail.
    Je ne crois pas que vous soyez quelqu’un de totalement sain d’esprit !

  • André , 8 mars 2016 @ 18 h 54 min

    Marcus 8 mar 2016 à 18:20 at 18 h 20 min l==> soyez quelqu’un de totalement sain d’esprit ! ==> Je n’ai pas eu le privilège d’être scolarisé. A quatorze ans j’ai dû travailler pour gagner .20 sous par jour et j’ai cotisé pendant 47 années à la sécu et elle n’a jamais procédé à aucun remboursement. A trente ans les français de souche fainéants n’ont pas encore commencé à travailler.

    l==> pleins de contradictions si on lit dans le détail.l==> J’attends que l’on me présente les contradictions.

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