Boulevard Voltaire
François Teutsch
Aujourd’hui, l’édifice. Et demain ? Les paroissiens en procession ? Le prêtre dans la rue ?
Le clocher gothique de l’église Notre-Dame à Lillebonne domine depuis des siècles la cité gallo-romaine. Le 16 janvier au matin, les habitants de cette commune de Seine-Maritime ont découvert avec consternation des inscriptions sur les portes de l’église : « Satan est en enfer », « Adam et Ève, la honte de la France » et autres gracieusetés du même acabit.
La population, dans cette vallée industrielle dédiée à la pétrochimie, n’est pas spécialement bigote. Mais le fait est là : toucher à une église, c’est atteindre au plus profond de l’identité d’un pays.
Le curé ne déposera pas plainte. Le père de Mallmann déclare au journal local : « Pour déposer plainte, il faut vraiment que ce soit grave. Mais là, ce n’est pas un acte de l’ordre de la profanation. C’est l’expression d’une personne en détresse, qui a perdu ses repères sociaux et familiaux, et qui a sans doute besoin d’être aidée. Cela m’inspire de la compassion. » Aucune information non plus sur le site Internet du diocèse.
Ces propos sont irresponsables. Ils banalisent les faits et les renvoient à une explication sociale désuète dont trop de clercs sont encore coutumiers ; ils laissent un goût amer, comme si le prêtre avait renoncé à s’interroger sur la notion de blasphème, et incitent à la récidive.
Mais non, Monsieur l’abbé ! Ces faits sont extrêmement graves ! Ils le sont parce qu’il ne se passe plus un jour sans qu’un tel acte soit commis en France. Leur banalisation et leur fréquence sont la marque d’une haine profonde de certaines personnes à l’encontre de la religion chrétienne. À force de dénigrer sans cesse le christianisme et l’Église, de railler la foi ou la pratique des catholiques, d’asséner comme une vérité révélée que la religion est une affaire privée, on suscite chez certains un réflexe de rejet. Aujourd’hui, l’édifice. Et demain ? Les paroissiens en procession ? Le prêtre dans la rue ? Reviendrons-nous aux arrêtés municipaux qui, au début du XXe siècle, interdisaient le port de la soutane dans la rue ?
On n’attend pas d’un prêtre catholique, fût-il habillé en pékin, qu’il passe sous silence une telle atteinte à la foi de ses ouailles. Une atteinte qui choque aussi l’immense masse des tièdes, pour qui l’église est un lieu de passage rituel deux ou trois fois dans leur vie, mais qui ressentent l’enracinement de leur société dans le christianisme. Jusqu’au candidat socialiste à la mairie qui, seul à ce jour, a fermement condamné cet acte.
Est-ce la peur de se montrer, la volonté de se fondre dans le monde, un angélisme suranné qui voit en tout délinquant une victime de la société ? Un vieux réflexe social ? Toujours est-il que ce genre de comportement suscite, hélas, le mépris de bien des gens, à commencer par les musulmans qui respectent les chrétiens lorsqu’ils s’affirment ouvertement comme tels.
Au lieu de bêler à l’unisson « Vivre ensemble », nos politiciens, évêques, et responsables de tous genres seraient plus avisés de condamner sévèrement cette atteinte à l’unité nationale, et l’imbécile lâcheté moutonnière qui génère de tels comportements.
Pour cela, il faut du courage…