Du Népal au Qatar, des journalistes ont mené une enquête exclusive sur le drame humain de l’esclavage moderne. Ils tentent de comprendre pourquoi des jeunes partis en bonne santé pouvaient mourir en si grand nombre sur les chantiers de la Coupe du monde de football 2022. Tout commence sur une image : ces cercueils qui arrivent chaque jour à l’aéroport de Katmandou. À l’intérieur, les corps d’ouvriers népalais partis travailler dans les pays du Golfe. En 2013, 173 sont morts au Qatar, selon le gouvernement népalais, d’accidents du travail, suicides ou arrêts cardiaques mystérieux…
Cette enquête commence dans des villages reculés du Népal, l’un des pays les plus pauvres de la planète. Ici, au moins un membre de chaque famille est parti travailler dans la péninsule arabique.
Une enquête du Guardian datant de 2013 révélait déjà les épouvantables conditions de vie des travailleurs immigrés du Qatar qui préparent dans l’ombre la Coupe du Monde 2022. Plusieurs ONG internationales comme Human Rights Watch et Amnesty International alertaient déjà l’opinion sur les conditions de vie de ces immigrés anonymes qui représentent pourtant plus de 90% des travailleurs au Qatar, soit 1.35 million de personnes. La plupart d’entre eux viennent du Népal, quittant leur foyer et leurs familles criblés de dettes et espérant trouver au Qatar les moyens de survivre. Sur place, c’est tout autre chose qui les attend…
Sur place, les non-paiements sont courants, tout comme les déductions de salaire, aléatoires et illégales. Les travailleurs sont parqués dans des habitations insalubres où jusqu’à 12 personnes doivent partager une même chambre. La liberté de circuler y est inexistante, quant aux droits du travail ou les droits humains, n’en parlons pas. « Si je ne devais demander qu’une chose ? Qu’on nous traite comme des êtres humains » déclare un migrant. Un témoignage parmi d’autres rapportés par Amnesty International et qui mettent en échec l’unique argument répété des exploitants : « ils gagnent mieux leur vie que dans leur pays !«
Certains travailleurs réfugiés à l’ambassade et ayant témoigné pour le Guardian affirment qu’ils travaillaient chaque jour sous 50°C et que leurs employeurs ne leur donnaient pas de libre accès à l’eau. Ce n’est pourtant qu’un petit aperçut des conditions de travail de ces hommes. On s’attend à 4000 décès d’ici la fin des travaux. 4000 vies, et autant de familles, broyées pour quelques semaines d’animation télévisée. Tout va bien dans le meilleur des mondes.