Le scandaleux mépris du gouvernement espagnol pour Cervantès!

L’Espagne et le Royaume-Uni s’apprêtent à célébrer les 400 ans de la mort de Cervantès et Shakespeare. Mais si Londres a sorti le grand jeu, les Espagnols dénoncent le mépris de leur gouvernement pour le plus célèbre de leurs écrivains.

Voici la chronique espagnole d’une déception annoncée. Depuis près d’un an, de multiples personnalités du monde de la culture espagnole alertent Madrid sur l’importance de commémorer les 400 ans de la mort de Miguel de Cervantès, leur plus célèbre écrivain. À la veille du début des célébrations, prévu samedi 23 avril, date qui correspond au jour de l’enterrement de l’auteur de “Don Quichotte”, ces appels semblent avoir été vains. “Voilà 400 ans que nous pouvions nous y attendre”, a ironisé le directeur de l’Académie royale espagnole.

5…) En mars, plusieurs écrivains avaient dénoncé l’ignominie dans les pages d’El Pais, avec en ligne de mire le PP (Partido popular), accusé de ne nourrir que du mépris à l’égard du monde culturel espagnol. L’écrivain Javier Marías, membre de l’Académie royale espagnole, avait ainsi sorti l’artillerie lourde en jugeant l’attitude gouvernementale “pleine de dédain, d’oubli et d’injure […], telle qu’on n’en a pas vécu depuis celle du régime franquiste”.

La colère des Espagnols est d’autant plus noire que le Royaume-Uni, lui, n’a pas lésiné sur les moyens pour commémorer le 400e anniversaire de la mort de William Shakespeare. Car le plus célèbre des dramaturges britanniques et Cervantès se sont tous deux éteints en avril 1616, à quelques jours d’intervalle (et non le même jour, comme le veut une croyance répandue). Samedi 23 avril, les mondes culturels hispanique et anglo-saxon honoreront donc simultanément ces deux génies du verbe, qui ont tous deux marqué d’une empreinte indélébile la littérature mondiale.

Londres a mis la main à la poche, mobilisant musées, compagnies de théâtre, la radio publique BBC et le British Council chargé de diffuser la culture britannique à l’étranger. Même les stations de métro londoniennes ont été rebaptisées pour l’occasion des noms de héros shakespeariens. Dès janvier, le Premier ministre britannique, David Cameron, a annoncé la couleur : un vaste programme baptisé “Shakespeare lives” prévoit des projets sur toute l’année et dans 140 pays – dont l’Espagne.

(…) Le programme officiel a été publié tardivement et les autorités semblent se réveiller seulement à l’approche de l’anniversaire, estime le photographe José Manuel Navia, un admirateur de Cervantès qui a organisé une exposition commémorative à Madrid.

De son côté, Javier Rodriguez, le maire de la ville natale du célébrissime auteur, Alcalá de Henares, a regretté que l’État n’ait pas alloué de budget à ces commémorations et que chaque région, chaque ville, chaque association ait dû puiser dans ses fonds propres ou s’appuyer sur des parrainages. Mais pour l’édile, rien ne sert de se lamenter. “Nous devons nous tourner vers l’avenir et essayer d’organiser autant d’activités que possible… Je crois que ce sera une bonne année Cervantès”, positive-t-il.

L’Espagne, bien qu’un peu seule face à son patrimoine, compte célébrer malgré tout son auteur-phare, à force de “semaines cervantines” consacrées à sa vie et son œuvre, à des projections, des lectures, quelques conférences, concerts… Les meilleures initiatives viendront souvent des Espagnols eux-mêmes. Des bibliothécaires ont organisé des lectures et des ateliers artistiques pour les enfants. L’un d’entre eux a publié l’intégralité de “Don Quichotte” en 17 000 tweets. Il a réservé les 140 derniers caractères du chef d’œuvre pour le 22 avril, à la veille des commémorations.

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