Par Alain Sanders
Vous lassez-vous jamais des films dont d’Artagnan est le héros ? Moi non plus… Et Dieu sait si ce héros historique (bien aidé par Alexandre Dumas) et ses prolongements, Vingt Ans après et Le Vicomte de Bragelonne, ont inspiré réalisateurs et comédiens !
Le premier grand film français sur le sujet, Les Trois Mousquetaires, date de 1921. Il a pour metteur en scène Henri Diamant-Berger qui n’attendit pas deux fois dix ans pour lui donner une suite, mais un an seulement : son Vingt Ans après date de 1922.
Les Américains, eux, avaient donné à d’Artagnan le visage de Douglas Fairbanks bien avant que la France s’inquiétât de faire de son héros historico-littéraire un héros de l’écran d’argent. Puis vinrent Gene Kelly (en 1948), George Marchal (en 1953), Gérard Barray (en 1961), Michael York (en 1972), pour n’en citer que quelques-uns.
Car qui ne garderait un petit coin de ses rêves d’enfant pour le Cyrano et d’Artagnan d’Abel Gance (1963) ? Le D’Artagnan, chevalier de la reine de Bolognini (1954) ? Et qui oublierait le film de Lewis Allen, Les Fils des Trois Mousquetaires où Maureen O’Hara ne se laissait pas compter… fleuret.
La légende du Masque de fer, qui se situe dans la mouvance mousquetairienne, a inspiré Richard Pottier en 1952 et, dix ans plus tard, Henri Decoin pour un Masque de fer où Jean Marais tenait le rôle de d’Artagnan et Jean-François Poron celui de Louis XIV.
Co-scénariste de cette pochade historique, Cécil Saint-Laurent imaginait Mazarin (Enrico Salerno) sommant d’Artagnan d’aller délivrer le Masque de fer au fort de Sainte-Marguerite (au large de Cannes où fut tourné le film). Les raisons de cette mazarinade ? La santé chancelante du Roi Soleil. S’il venait à mourir, le Mazarini, qui savait lire dans les astres (même déclinants), espérait que cet « Henri », enlevé jadis dans un manoir des Deux-Sèvres parce qu’il ressemblait à Louis XIV comme un louis à un autre louis, saurait tout aussi bien faire briller la Galerie des Glaces.
Mazarin aurait pourtant dû savoir qu’il ne faut jamais courir Deux-Sèvres à la fois. Le Roi Soleil, qui en connaissait un rayon question retour à la vigueur, va recouvrer la santé et le Masque sa prison… Seulement, comme il a pris goût à la liberté, il s’évade. Et à qui fait-on appel pour remettre de l’ordre dans la Maison royale ? A d’Artagnan, bien sûr, qui n’est pas la cinquième roue du carrosse quand il s’agit de mettre un coup de collier. Contre l’Anglais, Fouquet, Milady, le Masque de fer, d’Artagnan est à jamais un héros d’oxydant.