La veille du lancement de la campagne présidentielle de Mitt Romney en France, nous avons rencontré Pierre Toullec, président de l’Association des Amis du Parti républicain, qui nous dévoile les enjeux et les difficultés de cette entreprise dans un pays où Georges W Bush n’était guère populaire. Entretien.
-Vous allez lancer dans deux jours la campagne présidentielle de Mit Romney, êtes-vous optimiste sur ses chances de réussite?
2012 est une élection différente de celle de 2008. Il y a quatre ans, le Parti Républicain devait palier à un handicap : la fatigue du pouvoir. Après 14 ans de contrôle du parlement et 8 ans de contrôle de la Maison Blanche, les électeurs aspiraient à un changement politique et de mé
thode. Cette envie, associée à l’image du Sénateur Obama (relativement jeune et noir représentant un changement profond dans l’un des deux principaux partis avec son opposition à Hillary Clinton), a donné un mouvement que John McCain n’est pas parvenu à contrer.
Cependant, les Etats-Unis restent un pays de centre droit. Les sondages sont clairs : les Américains considèrent leur président comme trop à gauche (43% des Américains le considèrent comme “très à gauche” selon un sondage Rasmussen http://www.rasmussenreports.com/public_content/politics/weekly_updates/what_they_told_us_reviewing_last_week_s_key_polls). Ils continuent à l’apprécier pour sa personnalité et son image, mais sont en désaccord avec sa politique. Cela crée un phénomène étrange et donne l’impression que le résultat de l’élection peut être entièrement changé en fonction de si les électeurs votent avec leur tête ou avec leur coeur une fois dans l’isoloir.
Mitt Romney se retrouve face à ce phénomène en partie impuissant : toute élection pour un potentiel second mandat est un référendum sur le président en place plutôt que sur son challenger. La force du gouverneur Romney est qu’il attire les électeurs s’ils décident de voter avec leur tête. Deux tiers des Américains ont affirmé dans un récent sondage que son expérience à Bain Capital ferait de lui un bon président, et les électeurs sont en majorité en accord avec les mesures qu’il propose. Cependant, une primaire difficile dans laquelle ses adversaires ont essayé de détruire son image l’a fait souffrir et il lui faudra encore quelques semaines pour améliorer la manière dont il est perçu. Il est exactement l’antithèse du Président sortant : sa personnalité et son image sont très classiques pour un candidat à la présidentielle, mais ses idées et son expérience attirent les électeurs. Mitt Romney, “Mr Fix It” (“Monsieur répare tout”), ne sera probablement pas le candidat du coeur mais il est celui de la tête, celui qui apporte les solutions pour résoudre les problèmes des Etats-Unis.
Cette forte opposition d’image entre les deux candidats pourrait jouer sur toute l’élection. L’avantage de Mitt Romney est l’agacement des électeurs devant un président “sympa” mais qui semble continuer à apprendre le métier sur le tas, incapable de libérer l’économie pour permettre aux Américains de se remettre au travail. De plus, Mitt Romney donne bien plus confiance aux citoyens engagés dans la vie de leur pays : il parvient à lever des fonds biens plus importants que le président (une première historique !) et malgré les quatre ans de retard qu’il a sur Barack Obama en matière d’organisation, ses équipes se développent de manière rapide à travers l’ensemble des Etats-Unis, et en particulier dans les Etats clefs. Il exploite ici au maximum ses compétences d’homme d’affaire pour créer ce qu’il espère être la plus formidable organisation électorale connue aux Etats-Unis. Cet avantage sur le terrain peut s’avérer décisif dans les dernières semaines.
-En France, le sentiment pro-Obama semble toujours dominer. En est-il de même aux Etats-Unis? Croyez-vous possible d’inverser la tendance?
La popularité du Président Obama a très vite chuté, menant en 2010 à la déroute de la gauche dans l’ensemble des Etats-Unis. Il pâtit d’être désormais considéré comme étant très à gauche et manquant toujours cruellement d’expérience, bien qu’il ait maintenant été Président pendant trois ans et demi ! Il conserve un coeur de fidèles à gauche qui continuent à le soutenir fermement. L’élection de 2012 semble pour le moment devoir être très serrée. L’Obamania est bien finie outre-Atlantique, mais la victoire n’est pas encore assurée pour Mitt Romney dans ce début de campagne. Les électeurs eux-mêmes vont sérieusement commencer à s’intéresser à cette élection à partir de septembre. Il est donc difficile de dire aujourd’hui lequel des deux candidats développera un avantage sensible au coeur de la campagne en septembre et en octobre.
-Comment pensez-vous pointer les failles et les défauts du bilan d’Obama?
Le 1er août seront publiées deux plateformes d’information : www.MittRomneyFrance.fr qui contiendra de nombreuses informations sur Mitt Romney, sa candidature, son message et comment participer à la campagne en France. Il sera accompagné d’un second site internet www.BarackObamaFrance.fr contenant de nombreuses informations sur ce qu’a fait le président Obama et les valeurs qu’il défend. Ce site internet sera bien entendu engagé mais nous ne souhaitons pas passer par la caricature. A travers des explications claires, nous pointons sur ce site les échecs du Président, les valeurs qu’il défend qui sont à nos yeux mauvaises mais aussi les actions qu’il a mené avec succès. Le Président Obama n’a pas tout raté, et c’est par cette honnêteté que nous serons crédibles pour pointer ses erreurs.
-Quelle sera votre stratégie pour la bataille médiatique?
Avec une équipe se tenant informée de la campagne et forte de l’expérience de l’élection de 2008, nous mettons progressivement en place un réseau de représentants à travers toute la France. Ces représentants seront les relais directs de la campagne “Mitt Romney France” auprès des médias locaux pour une présence dans tout l’hexagone.
Nous réaliserons aussi des campagnes de communication auprès des médias nationaux afin de faire connaître notre initiative. Nous avons développé une importante base de données de différents médias en 2008, ainsi que de véritables relations de confiance avec certains journalistes. Nous comptons continuer dans cette voie en 2012.
Principalement en développant le message de la droite Américaine. Lorsqu’un message continuellement négatif est développé à l’égard d’un mouvement, vous allez développer naturellement un rejet si vous n’avez pas l’occasion de vous renseigner par vous-même. En France, où la maîtrise d’une seconde langue est rare, il est difficile pour les citoyens d’aller découvrir les véritables discours et programmes Républicains. En 2012, nous avons bien plus de moyens qu’en 2008. Nous proposons déjà aux Français d’écouter le message de Mitt Romney avec des vidéos sous-titrées en français. De même, son programme sera progressivement traduit et publié sur le site officiel www.MittRomneyFrance.fr, permettant aux citoyens Français de venir lire ce qu’il propose plutôt que d’avoir à l’entendre d’une personne potentiellement pro-Obama.
Sans vouloir faire de discrimination politique, nous ne pensons pas que le message de Mitt Romney peut convaincre les électeurs gauche. Nous nous adressons principalement aux citoyens Français du centre et de la droite. Parvenir à changer l’image du Parti Républicain par l’information et une communication explicative au sein de ce public serait pour nous le succès que nous cherchons à atteindre.
-En cas de victoire de Romney cette année, y aura-t-il des changements profonds dans les relations franco-américaines?
Oui, et pas forcément en positif. Tout d’abord, l’opposition entre le Président Hollande et un Président Romney serait très importante. Issu d’une forme “d’élite intellectuelle”, n’ayant aucune expérience professionnelle et ayant basé toute sa campagne sur un discours pour la gauche et contre la droite, François Hollande n’a rien à voir avec un homme qui a fait fortune en travaillant toute sa vie dans le privé, qui s’est intéressé à la politique tard dans sa vie et qui se présente comme le candidat de la compétence cherchant à unifier son pays plutôt que son clan.
Je crains que le rejet d’une Présidence Romney par la Présidence Hollande plomberait une fois de plus les relations franco-américaines. C’est cependant une des raisons pour lesquelles nous lançons ce comité Mitt Romney France. L’objectif est d’apporter une information et une autre vision du monde aux Français pour les aider à comprendre pourquoi les Américains pensent différemment et surtout ce que nous avons à apprendre d’eux. En améliorant l’image du Parti Républicain, nous espérons améliorer les relations franco-américaines en cas de victoire de la droite le 6 novembre 2012.
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