Vendredi, samedi et dimanche, avait lieu le Values Voter Summit 2011, l’incontournable rassemblement annuel des sociaux-conservateurs américains depuis 2006. Hébergé par le Family Research Council, ce mélange “de réunion de réveil, de convention d’un parti politique et de fête” comme le décrivait en 2010 le Los Angeles Times a pour mots d’ordre les grands principes conservateurs : “moins d’Etat”, “réduire les dépenses”, “défendre les valeurs traditionnelles”, “protéger l’Amérique”. Des préoccupations élargies par rapport aux premières années, qui traduisent la volonté de ses organisateurs de concurrencer la Conservative Political Action Conference (CPAC), le grand rendez-vous conservateur annuel depuis 1973 (plus de 100 organisations participantes), au centre de plusieurs polémiques dont celle qui a suivi la participation puis le soutien de l’organisation gay GOProud en 2011. Sentant venir le danger, la CPAC a d’ailleurs pris des mesures pour qu’un tel cas de figure ne se reproduise plus.
Cette année, une quarantaine d’organisations ont participé au Values Voter Summit, dont les soutiens officiels (FRC Action, AFA Action, American Values, The Heritage Foundation, Liberty University, Liberty Counsel) ainsi qu’une soixantaine d’intervenants prestigieux de droite (Michele Bachmann, Glenn Beck, John Boehner, Herman Cain, Eric Cantor, Bobby Jindal, Ron Paul, Rick Perry, Mitt Romney, etc). 3 400 activistes, militants, journalistes s’y sont retrouvés et 1 983 d’entre eux ont voté pour leur candidat préféré à l’élection présidentielle.
A la surprise générale, le Républicain libertarien Ron Paul l’a très largement remporté avec 37% des suffrages exprimés contre 23% pour Herman Cain, 16% pour Rick Santorum, 8% pour Michele Bachmann et Rick Perry et seulement 4% pour Mitt Romney. La faute à une manip’ dont sont coutumiers les jeunes supporters du représentant du Texas : ils sont venus “par cars entiers” à Washington, D.C., pour soutenir leur champion, écrit Brad Knickerbocker dans The Christian Science Monitor. De l’aveu même de Tony Perkins, le Président du Family Research Council, 600 personnes dont une forte proportion d’étudiants ayant profité d’un prix d’entrée préférentiel se sont inscrites le samedi matin, juste le temps de participer au vote…
Voilà pour une partie de l’explication. Pour le reste, il faut aller voir du côté de l’allocution de Ron Paul, à la teneur très… biblique. “Dr No” a tenté une synthèse entre christianisme et… libertarianisme. « Le Nouveau Testament nous enseigne que nous devons aider les pauvres et nos préoccuper de nos familles, de nos voisins et de nos amis. Mais vous savez, le Christ n’a jamais dit : ‘allons à Rome, mobilisons-nous et faisons pression afin de nous assurer que nous soyons tous pris en charge’. Il s’agit d’une responsabilité personnelle” a-t-il expliqué. « A un moment, le Christ est confronté à une prostituée mais il n’appelle pas pour cela des centurions. Il n’a pas demandé plus de lois. Il a été cependant très direct et pensait que la lapidation n’est pas la solution au problème de la prostitution », a continué l’élu texan. Son passé de gynécologue-obstétricien ouvertement “pro-vie” ayant fait naître 4 000 bébés aura achevé de conquérir un auditoire en manque de candidats solides et crédibles face à Barack Obama : Ron Paul était arrivé avant-dernier au Values Voter Summit 2010…