Pour paraphraser Audiard, on pourrait dire que le Tea Party c’est un peu comme la Vierge Marie : s’ils ne se manifestent pas de temps en temps, le doute s’installe…
Hier, le Tea Party est “monté” à Washington. Une manifestation d’ampleur modeste (un millier de personnes), mais un avertissement sans frais pour les Républicains du Congrès. Car si le rôle du Tea Party a été déterminant pour les Républicains lors des élections de mi-mandat de novembre dernier, cela ne n’est pas traduit pour ce mouvement par de significatives victoires législatives.
Pour gagner le soutien de ce puissant mouvement de base, les Républicains s’étaient engagés, s’ils étaient élus, à réduire de 100 milliards de $ le déficit du procain budget (2011/2012). Ils ont été largement élus à la Chambre des Représentants, ont gagné en importance au Sénat… Mais les engagements électoraux semblent, chez certains d’entre eux, avoir été oubliés puisque, dans le débat budgétaire en cours, les Républicains ont rabaissé ce montant à 61 milliards de $ et même, après des tractations avec les Démocrates, seraient disposés à un compromis autour de 30 milliards de $.
Cela ne convient évidemment pas du tout au Tea Party qui est venu le leur dire hier et leur rappeler, comme on pouvait le lire sur l’une de leurs banderoles : « Souvenez-vous de vos promesses. Nous, nous en souvenons ».
Le député Républicain de l’Ohio et président de la Chambre des Représentants – c’est-à-dire, en passant, le troisième personnage de l’État –, John Boehner, saluait chaleureusement le matin une manifestation du Tea Party qui le houspillait l’après-midi… Boehner se trouve, il est vrai, dans une situation inconfortable, tiraillé qu’il est entre les exigences des nouveaux élus de son parti, très attentifs au Tea Party et pour beaucoup d’entre eux franchement sur leurs principes, et les appels au compromis et au “sens de l’État” que les Démocrates ne cessent de lui adresser, avec le “conseil amical” de fermer ses oreilles aux « extrémistes » du Tea Party. Cette diabolisation du Tea Party et le fait de le qualifier sans relâche « d’extrémiste » est un principe et un vocabulaire arrêté (officieusement) par le groupe Démocrate du Sénat dont le chef de la majorité, le sénateur Harry Reid du Navada, n’a pas craint de déclarer hier « que le pays ne se souciait guère du Tea Party ». Ce recours à la méthode Coué de la part des Démocrates, emportera-t-elle l’adhésion d’une majorité de Républicains ? On devrait tout prochainement le voir si la majorité Républicaine de la Chambre accepte de voter le financement du gouvernement ou de laisser ce dernier sans moyens, l’obligeant ainsi à cesser ses activités – en tout cas, un grand nombre d’entre elles. Certains Républicains – soutenus en cela par le Tea Party – poussent à cette extrémité (qui n’est pas « extrémiste » !) si les 100 millions de $ d’économies budgétaires ne sont pas acceptées par les Démocrates. Pour l’heure, c’est le blocage puisque les Démocrates du Sénat harcèlent les Républicains de la Chambre sur les réductions budgétaires, sans avoir eux-mêmes commencé à travailler sur leur version de la loi budgétaire… Priver le gouvernement de l’argent nécessaire à son fonctionnement, renforcera-t-il électoralement l’exécutif (comme ce fut le cas lors du précédent de 1995), c’est-à-dire Obama (en petite santé selon les derniers sondages), ou bien, au contraire, cela obligera-t-il les Démocrates à plier devant les exigences budgétaires des Républicains ? C’est tout l’enjeu du problème et on peut comprendre que Boehner soit hésitant sur le parti à prendre. Le Tea Party est venu à Washington pour lui indiquer celui qu’il estime qu’il doit prendre et auquel, d’ailleurs, il s’était engagé au nom de son parti.