C’est donc un gouvernement resserré et décidé à redresser le pays après sa délicate crise sanitaire qui a lancé, en grande pompe, plusieurs grands chantiers visant essentiellement à verdir la politique d’Emmanuel Macron (2022 approche, que voulez-vous), à commencer par un grand et indispensable « plan vélo » sans lequel, on le sentait, la République aurait été en danger.
Et au-delà de ces nouveaux territoires d’expérimentation politique et sociale, ainsi que des bisous marqués en direction des indigénistes et autre néo-racistes que certains médias s’empressent de légitimer à grand coup de doubles pages obséquieuses et complaisantes, force est de constater que, pendant ce temps, la société française se remet gentiment de sa période de confinement et se prépare maintenant à une rentrée sereine et décidément orientée sous le signe du travail studieux et de l’effort collectif pour remonter la pente économique.
Il faut dire que cela urge : entre les rentrées fiscales qui ne sont pas exactement ce qu’elles devraient être pour soutenir le train de vie d’un État particulièrement large avec l’argent des autres, et les indéniables besoins de l’économie française, il est temps que tout le monde se retrousse les manches pour retourner au travail, ♩ tagada ♪ tsoin ♫ tsoin ♬.
Cette belle unanimité du peuple français à rester concentré sur un avenir qu’il veut florissant, à mobiliser toutes ses forces vives pour produire de la richesse comme jamais se traduit d’ailleurs très concrètement dans l’actualité qui recommence, petit-à-petit, à se remplir de ces pépites d’ingéniosité, d’optimisme et de perspectives positives qui font la marque de notre savoir vivre à la française.
C’est ainsi que la sécurité et l’ordre que l’État entend faire régner sur le territoire se mesure de mieux en mieux. La semaine passée, on découvrait, pas tellement surpris au fond, que conduire un bus devient maintenant un vrai métier à risques, ce qui – soyons en sûr – ne manquera pas d’impulser de nouvelles idées politiques pour mieux protéger les chauffeurs dans l’exercice de leur travail (sachant que l’idée qui consisterait à faire disparaître les risques de ce métier en imposant la sécurité régalienne est une idée vraiment rétrograde et quelque peu passéiste, disons-le tout net).
De la même façon, le week-end passé nous aura montré qu’on peut aussi viser une société plus efficace et plus joyeuse en faisant table rase de ses encombrants monuments classés, par exemple en les brûlant. La protection qu’on serait en droit d’attendre d’un État qui prélève plus de 1000 milliards d’euros dans les poches de ses citoyens ne peut pas et ne doit pas se situer dans ce domaine banal et sans intérêt. Si on commence à attendre de l’État qu’il protège les lieux de culte, où va-t-on chers lecteurs, où va-t-on ?
Mais surtout, quel intérêt pour l’État de rappeler que force doit rester à la loi lorsque cette dernière évolue sans cesse, qu’elle n’est pas appliquée et qu’à vrai dire, comme elle est écrite par des mâles blancs patriarcaux de plus de 50 ans, elle ne peut manifestement pas être ni bonne, ni juste, ni même réaliste ?
Dès lors, il sera sain de laisser les quartiers historiquement émotifs ventiler sagement leurs petits mouvements de frustration et regagner par eux-mêmes leur calme et leur pondération.
Dans ce cadre, on devra donc comprendre que les récentes violences urbaines, nombreuses, qui se sont multipliées avant et pendant le 14 juillet, ne sont pas des dérives ou les graines de futurs problèmes dans ces quartiers, mais la réalisation simple d’une expression alternative de la joie de vivre d’une petite partie des cancrelats racailles jeunes qui y vivent, ♩ youpi ♪ youpi, et ♫ vive le rodéo n’est-ce pas ♬.
Les tirs de mortiers d’artifice, les embuscades de pompiers et de policiers servant de cibles pour des tirs, les affrontements entre certaines populations de ces quartiers susceptibles et les forces de l’ordre, tout ceci participe en réalité d’un mouvement artistique et social de décompression après ces mois de confinement strict qui fut particulièrement bien respecté dans ces zones. Il apparaît donc normal que la fête y batte maintenant son plein.
En outre, quand ces quartiers ne décompressent pas sur place, ils savent exporter leur bonne humeur dans d’autres espaces et ambiancer d’autres lieux, comme dans ces parcs d’attraction dont on sait tous qu’ils seraient un peu tristes sans cette jeunesse et cette vitalité débordantes.
Dans le précédent billet, on pouvait établir le décalage de plus en plus criant entre les besoins des Français et les mesures économiques prises par le gouvernement, résolument tourné dans le bricolage médiatique sans intérêt, les mesurettes cosmétiques parfaitement inutiles et les tabassages fiscaux tous azimuts qui continuent d’enfoncer le pays dans la misère en lieu et place de réformes de fond indispensable à relancer l’activité.
Malheureusement, ce décalage visible au niveau économique est encore plus profond au niveau social : ce qui, normalement, relève de la fonction de base de l’État, le régalien, n’est plus assuré depuis longtemps et, pire encore, tout indique qu’il n’y a même plus volonté d’assurer au moins une façade cohérente ; la fermeté n’est plus affichée que de façon épisodique, devant l’une ou l’autre caméra, et encore, tout juste.
En fait, la conviction manque d’autant que cette fermeté est de plus en plus dénoncée comme la marque abominable du patriarcat / du racisme / d’une phobie quelconque / de la lutte des classes / etc. (utilisez le concept du moment, panachage possible), ce qui entraîne un abandon croissant de tout ce qui légitime encore l’État et ses ponctions, dans certains quartiers au début, puis, petit-à-petit, dans des villes entières, puis des pans complets de territoire qui échappent alors à toute vie normale.
Soyons objectif : l’État est parfaitement nul lorsqu’il intervient en économie (et plus il intervient, plus il déclenche de catastrophes). Parallèlement, à mesure qu’il s’agite en mesures sociétales et économiques, il en fait de moins en moins dans le régalien et moins il en fait, plus la situation se dégrade, obligeant nos très médiocres dirigeants à redoubler d’activité dans le sociétal et l’économique.
Une seule conclusion s’impose devant ce cercle vicieux : ce pays est foutu.
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