La sainte-nitouche Pécresse et le père la-vertu Le Maire proposent une règle d’or pour encadrer les impôts. « Faut pas prendre les Français pour des billes » aurait pu dire Audiard. Le personnel politique hors-sol les a habitués à ce jeu de ping-pong où les politiciens professionnels se préoccupent davantage de leurs adversaires, disons plutôt de leurs partenaires que de leurs électeurs. La gauche a réussi une overdose fiscale absurde par son montant autant que par son manque de cohérence. L’opposition joue son jeu, mais avec une mauvaise foi et une irresponsabilité qui ne rassurent pas. D’abord, l’augmentation des taxes et de la pression fiscale était déjà remarquable sous le mandat présidentiel précédent qui avait généré 24 nouvelles taxes. La justification était la même : la résorption des déficits publics. L’éco-taxe sur les poids-lourd est ainsi une mesure de l’ancienne majorité, d’abord dans le souci de mettre un peu de vert dans le bleu majoritaire et maintenue pour le Milliard de rentrées fiscales prévues. Opposé à la taxe-carbone qui avait été envisagée, j’ai, en revanche, voté l’éco-taxe qui, à l’origine, devait financer le ferroutage. Il ne s’agissait pas d’une obligation découlant d’une directive européenne. L’eurovignette européenne avait certes fait l’objet de deux directives en 1999 et en 2006, mais elles dessinaient un cadre juridique pour harmoniser les péages pour le transport des marchandises et ne créaient pas d’obligation. L’écotaxe est issue du Grenelle de l’environnement dont elle est la proposition 45 et qui a été voté le 21 octobre 2008. C’est la France qui a suscité ensuite une nouvelle directive qui imposait la transcription en droit français de la promotion des transports durables. Précisée par la loi de finances de 2009, elle est rappelée lors du vote de Grenelle II et fait l’objet d’un décret Fillon en 2012. Elle a été votée à l’unanimité au Sénat en 2013, et c’est ensuite que l’ancienne majorité, devenue l’opposition, s’est réveillée en déposant un recours devant le Conseil constitutionnel. Que cette taxe soit anti-économique et défavorise nos transporteurs et les filières qui leur sont liées est une évidence, mais c’est une erreur partagée largement par une opposition amnésique : cette taxe a poursuivi sa route après la crise et sans en tenir compte. La demande de retrait qui est faite maintenant doit s’accompagner de modestie et de repentance. C’est la légitime mobilisation des Bretons qui la provoque, non une tardive lucidité.
Or voilà que les coupables se muent en donneurs de leçon. Voilà qu’ils proposent une règle d’or afin de mettre fin à la « bougeotte » fiscale, d’empêcher la rétroactivité en matière fiscale et d’encadrer l’augmentation de la pression fiscale. Cette proposition est un exercice de communication profondément malhonnête. La règle d’or est un bon slogan publicitaire, et c’est une habileté de le reprendre. Mais il désigne une limitation des dépenses et non des recettes, visant à empêcher que la dette finance le fonctionnement au-delà de l’investissement, comme cela s’impose aux collectivités territoriales. C’était une proposition du Nouveau centre, que j’ai votée, mais que les autres parlementaires de l’UMP ont repoussée à la demande du gouvernement. Reprendre l’expression pour encadrer les recettes n’est pas très sérieux : ça consiste à mettre un bouchon à la sortie du tuyau sans fermer le robinet. Par ailleurs, on voit mal une simple loi limiter ce qui est constitutionnellement le pouvoir même du Parlement : voter le budget. Chacun sait qu’une proposition de loi de l’opposition n’a aucune chance d’être votée. C’est de la gesticulation médiatique, et rien d’autre. L’encadrement de la rétroactivité fiscale, sur laquelle il faudrait à la première occasion interroger le Conseil constitutionnel, est un impératif à la fois moral et économique. Pour le reste, à partir d’une règle d’or sur les dépenses, c’est à chaque majorité d’être assez responsable pour fixer l’imposition qui va les financer, en limitant la pression fiscale, et en sécurisant les acteurs économiques par une stabilité des taxes et des impôts. Il est indécent que des incendiaires professionnels se présentent soudain comme des pompiers récemment convertis. À moins qu’ils n’aient voulu donner raison à Michel Audiard, qui disait, vraiment, cette fois : « on est gouverné par des cons qui fixent le prix de la betterave et qui ne savent pas faire pousser des radis ».
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