Le Liban, prochaine victime expiatoire des extrémismes arabes ?

Outre la crise institutionnelle qui prive ce pays de son Président de la République, le Liban est confronté à un double problème et les événements s’accélèrent, conduisant peut-être à la guerre civile confessionnelle entre les deux branches de l’islam.

D’une part, une fraction de son territoire (15% environ) est depuis 25 ans occupé par une milice chiite, bras armé du Parti de Dieu (Hezbollah). Ce dernier participe par ailleurs au gouvernement ! Depuis le 23 avril, les députés libanais n’arrivent pas à réunir une majorité de voix pour un candidat à la Présidence. On en est déjà à douze tours. La Présidence étant réservée aux chrétiens, ce sont deux candidats catholiques maronites qui s’opposent : Samir Geagea soutenu par le sunnite Saïd Hariri et Michel Aoun soutenu par le Hezbollah, membre de « l’axe chiite » avec la Syrie, l’Iran et il y a encore un mois l’Irak de Maliki. Ce dernier bloquera le vote tant qu’il n’aura pas réussi à imposer Aoun ou tout autre candidat pro-syrien.

Rappelons que le 23 octobre 1983, le Hezbollah perpétra deux attentats-suicides contre la force multinationale d’interposition au Liban faisant 248 morts américains et 58 morts français. Puis il effectua une série d’attentats en France du 23 février 1985 au 17 septembre 1986, provoquant au total la mort de quinze personnes et trois cents blessés.

Alors que le Hezbollah participe en Syrie au combat d’Assad contre les islamistes (4 000 miliciens), une étrange relation s’est établie depuis 1992 entre le Hezbollah extrémiste chiite et le Hamas, branche palestinienne des Frères musulmans sunnites. Ces derniers sont largement financés, équipés et formés par le Hezbollah ainsi que par l’Iran, en plus du Qatar wahhabite. Cela doit nous rappeler que, face aux juifs ou aux « croisés », les islamistes de toutes origines se liguent entre eux. La race ne ment pas, selon leur conception. Le régime alaouite d’Assad abritait un dirigeant du Hamas, Khaled Méchaal, jusqu’en 2012. Il a mis en selle le Front al Nosra, en libérant ses dirigeants en juin 2011 et a aidé le Fatah al Islam djihadiste libanais en 2007. Quant à l’Iran, il a discrètement aidé les membres d’Al-Qaïda et les Talibans en fuite après l’intervention américaine en Afghanistan en 2001.

D’autre part, depuis deux mois, le djihadisme s’invite sur la scène politico-militaire de ce malheureux pays. Le 2 août 2014, les combattants islamistes venus de Syrie appartenant au Front al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaïda, font une incursion dans le village libanais d’Ersal. De violent combats opposent depuis cette date le Front al-Nosra à l’armée libanaise qui a repris les positions précédemment conquises par les islamistes. Des responsables de la sécurité ont indiqué que 27 militaires ont été pris en otage et 3 sauvagement assassinés (deux par décapitation) par les groupes islamistes, qui ont été activement soutenus par une partie des réfugiés syriens de Ersal, lors de l’affrontement avec l’armée. L’armée a procédé à 400 arrestations dans les camps de réfugiés syriens à Ersal, les soupçonnant d’appartenir à des groupes terroristes.

Toujours à Ersal, plusieurs dizaines de réfugiés syriens se sont rassemblés jeudi dernier devant la municipalité du village acclamant à pleins poumons l’État islamique et brandissant le drapeau du groupe terroriste. Les ulémas sunnites libanais ont lancé un appel en vue du rassemblement vendredi dernier à Tripoli. Un appel a été lancé par les « jeunes musulmans à Tripoli », faisant écho à l’appel des ulémas. Les jeunes ont exhorté tout sunnite à se « rebeller après la prêche du vendredi contre l’injustice et à soutenir nos frères à Ersal ainsi que les réfugiés syriens ». 
L’appel valait également pour « l’ensemble des régions sunnites au Liban », invitées à exprimer leur compassion de la même manière. Les ulémas ont justifié le tropisme djihadiste par « l’injustice croissante qui pousse certains à se réfugier chez celui qui peut les protéger ».

Le petit voisin de la Syrie est actuellement le pays qui accueille le plus de réfugiés syriens : 1,1 million, en très grande majorité sunnites. La population du Liban étant estimée à 4,14 millions d’habitants, on mesure le problème démographique que cela représente, bouleversant les équilibres ethnico-religieux En 2013, on estimait la répartition confessionnelle nationale à 41 % de chrétiens (dont 26% catholiques, 8% orthodoxes) contre 59 % de musulmans (dont 27% chiites, 27% sunnites et 5% druzes).

Comme pour conjurer le sort, un sommet religieux se tient depuis jeudi, à Dar el-Fatwa au Liban, en présence du patriarche maronite Mgr Bechara Raï, du mufti de la République Abdel Latif Deriane, du vice-président du Conseil supérieur chiite cheikh Abdel Amir Kabalan, du cheikh druze Akl Naïm Hassan, ainsi que de représentants des patriarches chrétiens orientaux siégeant en dehors du Liban. Les dignitaires musulmans et chrétiens « exhortent le Parlement à accomplir son devoir constitutionnel fondamental en élisant immédiatement un président (…). Retarder l’élection du seul chef de l’État chrétien dans le monde arabe, à l’heure des souffrances extrêmes subies par les chrétiens d’Orient aux mains des forces terroristes fondamentalistes, paralyse le rôle du Liban dans l’accomplissement du message, à portée nationale et arabe, qui fait sa raison d’être ». Ils dénoncent « la dualité de la tyrannie et du terrorisme, longtemps subie par les sociétés arabes ». Ils proclament que « l’État civil (Dawla al madinya = Etat séculier), respectueux des religions et de la dignité humaine, est la seule formule ayant réussi à maintenir la stabilité et l’essor des États qui gèrent des sociétés plurielles, comme les sociétés arabes. » Ils insistent: « La stigmatisation des crimes d’agression et de déplacement forcé exercés par des fractions armées contre les chrétiens, les musulmans et d’autres, en Irak et en Syrie (…), impose de mettre en garde contre les conséquences de ces actes sur les chrétiens, ceux-ci étant amenés à se déraciner des patries dont ils sont le fondement depuis 2 000 ans. » « Le crime contre l’humanité est le même, indépendamment de son auteur », ajoutent-ils, associant « les atteintes contre les chrétiens de Syrie et d’Irak aux agressions israéliennes contre Gaza ».

Les chrétiens conscients de leur originalité ethnique non arabe, minoritaires dans leurs communautés hélas, avalent deux couleuvres dans cette déclaration des religieux : la réaffirmation du caractère « arabe » (?) des tous les Libanais et l’assimilation du Hamas, pourtant équivalent à l’Etat islamique et persécuteur des chrétiens, à une victime des Israëliens. Rappelons qu’il n’y a plus que 1 500 chrétiens à Gaza sur 1 700 000 habitants (0,1%) alors qu’en 1948, il représentaient 16% de la population arabophone. Néanmoins, cette déclaration « œcuménique » constitue une avancée dans la reconnaissance solennelle du caractère autochtone de la chrétienté au Levant, dans la critique implicite du rôle délétère du Hezbollah dans le blocage de l’élection présidentielle et enfin dans le renvoi dos-à-dos des dictatures (Assad par exemple) et des islamistes (Baghdadi par exemple).

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56 Comments

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  • 0 / 10
  • anonyme , 30 septembre 2014 @ 19 h 53 min

    Rien à voir avec le fait que tous les territoires situés grosso modo à l’ouest de l’Euphrate étaient déjà chrétiens avant l’arrivée de l’Islam…

  • Alainpsy , 30 septembre 2014 @ 21 h 15 min

    Les Chrétiens qui restaient, c’est ceux que les musulmans n’avaient pas massacrés parce qu’ils pouvaient payer l’impôt de la soumission, comme en irak aujourd’hui avec l’état islamique. Quant aux musulmans chez les Chrétiens, vous êtes souvent venus, pendant dix siècles, opérant les pires razzias, et déportant environ un million de personnes et les réduisant en esclavage. L’islam est la religion génocidaire depuis son apparition, le pire cauchemar de l’humanité.

  • Saida , 30 septembre 2014 @ 21 h 45 min

    N’importe quoi, les Chrétiens étaient traité parfaitement en terre d’Islam.

    Et puis au moins ils sont restés contrairement au musulmans d’Espagne ou de Hongrie.

  • bernique , 30 septembre 2014 @ 22 h 56 min

    Si Saida est d’accord, c’est pour ce soir ! Comme au Trocadéro ! ! !

  • Saida , 30 septembre 2014 @ 23 h 11 min

    Et voilà les commentaires islamophobes, touts musulman ne peut être que casseur.

    Forcement les médiat sioniste diffuse l’islamophobie tout les jours.

  • bernique , 30 septembre 2014 @ 23 h 40 min

    “touts musulman ne peut être que casseur” ! Si Saida le dit…

    J’attends tout de même son commentaire sur les actions de ses chers protégés ou coreligionnaires au Trocadéro ou à la Bastille, qu’on leur permette ou non de manifester pour une cause totalement étrangère au pays où ils vivent.
    Qu’il le veuille ou non, ce sont SES coreligionnaires et ils agissent COMME le veut sa et leur religion. Cher français contribuable, tu as payé 70 M€ (avoués) pour le plaisir de ses petits amis.
    Saida, as-tu pensé à une quête pour nous rembourser, auprès de tes frères ?

  • Saida , 1 octobre 2014 @ 0 h 12 min

    D’abbord je n’avais jamais dis que j’étais musulmane, j’ai critiquer le tout puissant sionisme et une de ses armes qu’est islamophobie, mais j’aurais pu ne pas être musulmane.

    C’est triste de constater que seul les musulmans sont vraiment antisioniste.

    Pour les manif, comprenez la colère de Français (qui peut se dire plus Français qu’un autre) exploités, discriminé et humiliés.

    Un petit exemple imaginons un Iranien, chez lui les chrétiens ont quatre députés attitrés et vive sans aucune discrimination, le mot n’est pas même connu, il arrive en France et non seulement il n’a pas de député, mais en plus il est discriminé et on l’accuse de touts les maux du monde.

    Il y a de quoi être en colère. La colère du peuple est sacrée et j’espère que le peuple un jour sera assez en colère pour faire tomber le systême.

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