Pourquoi je suis opposé au travail dominical

Vous l’avez constaté, Nouvelles de France donne aussi bien la parole aux partisans du travail dominical qu’à ses opposants. Pour ma part, je me retrouve sans hésiter dans le camp des seconds. En effet, je me mets un instant à la place d’un dirigeant de PME : à consommation égale, quel est mon intérêt d’augmenter l’amplitude d’ouverture de mon magasin ? Il est nul, tout simplement. Par contre, dès lors que mes concurrents le font, je suis forcé de suivre, ou alors la consommation s’étalera bien sur un jour supplémentaire que se partageront mes concurrents. Car l’ouverture dominicale a un intérêt économique lorsque peu le font, ceux-ci étant moins nombreux qu’en semaine à se partager un gros gâteau. Comment y voir autre chose que de la concurrence déloyale ? Donc si tous les magasins ouvrent le dimanche, ce sera un jour d’exploitation supplémentaire par semaine pour les mêmes revenus.

On me rétorquera avec raison : et les salariés ? C’est parce que le dimanche est encore un jour exceptionnel qu’ils sont payés le double de l’heure. Si le dimanche devient un jour comme les autres, eux aussi y perdront car ils seront rapidement payés comme le samedi. Manquerait plus pour les entreprises de devoir supporter un jour supplémentaire d’exploitation avec des salariés payés le double pour une consommation qui n’augmente pas ! Ils pourront aussi se voir contraints de travailler le dimanche : un postier ne choisit pas de travailler le samedi, par exemple. Pourquoi le dimanche considéré comme un jour comme les autres ferait-il exception ? Quant aux cadres supérieurs, pas payés lorsqu’ils font des heures supplémentaires, je me demande bien ce qu’ils ont à gagner dans l’affaire… Bref, il n’y a aucun argument économique valable au travail le dimanche, sauf en zones touristiques et pendant les fêtes.

Second angle d’indignation : le dimanche est un jour qui doit, comme tous les autres mais plus encore, servir à transmettre : la foi pour ceux qui ont la chance de l’avoir reçue, la mémoire des anciens, les savoirs basiques et le respect de la nature (scoutisme, etc.), le goût (antiquaires, brocantes, cuisine, etc), les passions… Le faire en famille et entre familles amies sera impossible si le travail dominical se généralise. Le dimanche permet aussi de prendre du recul par rapport au quotidien, et de réfléchir à l’avenir : dans quelle école souhaitons-nous mettre l’aîné l’année prochaine, et si je me mettais à mon compte d’ici deux ans ?, et si je créais mon potager pour me nourrir sainement, devenir plus autonome et économiser 200 euros par mois au lieu de les gagner (et de payer des taxes dessus avant d’en repayer en les dépensant) ?, etc.

Généraliser le travail dominical, ce serait créer des besoins de crèche ce jour-là aussi. Et permettre à l’État de se substituer à la famille un jour supplémentaire par semaine. L’enfant français moyen voit déjà plus les représentants de l’État-nounou que ses propres parents, n’aggravons pas la situation ! Et comprenons que parfois, l’État (la loi contre le travail dominical) est son propre empêcheur de croître en rond.

Si les Français avaient l’esprit d’entreprise, ils ne se poseraient même pas la question du travail dominical. Mais comme mes rares compatriotes qui ne rêvent pas d’être fonctionnaires ne jurent que par le CDI-heures supplémentaires, la question fait débat. Les libertés, la responsabilité, l’autonomie et la famille n’en ressortent pas grandies.

Related Articles

93 Comments

Avarage Rating:
  • 0 / 10
  • François Desvignes , 30 septembre 2013 @ 17 h 30 min

    Parce que le Christ a soigné les malades le jour du sabbat, contre l’avis du Sanhédrin.

    De ce point de vue d’ailleurs le Christ n’est pas opposé PAR PRINCIPE au travail le jour du sabbat, mais par sa généralisation au travail du plus grand nombre le jour du sabbat qui aurait alors pour effet de désacraliser ce jour réservé au dialogue des enfants avec leur Père.

    C’est pour une question de Droit de visite en quelque sorte.

    Moi, ce que je trouve bien avec le Christ, c’est que pour le comprendre il faut toujours élever le débat….

  • V_Parlier , 30 septembre 2013 @ 17 h 42 min

    Oui, si vous y êtes obligé, vous n’avez pas à être inquiété. Je n’en dirai pas autant de celui qui vous y oblige…

  • Ralph , 30 septembre 2013 @ 18 h 14 min

    Bien sûr qu’il y a des pompiers ou des militaires qui travaillent le dimanche. Mais y’en a t’il autant que les autres jours de la semaine ? J’en doute.
    Dans une caserne de l’armée de terre, ne restent le week end que le poste de police (les militaires à l’entrée qui gèrent la sécurité de la caserne) et éventuellement quelques postes : l’armurier, les cuistots etc… Il y a un sous-officier de permanence et un officier de permanence. Ils sont chez eux, avec un téléphone portable, prêt à se rendre sur site s’il y a un souci.
    Le gros de l’effectif ne travaille pas. Les séances de tirs, les instructions, les exercices de courte durée, les séances d’ordre serré… tout ça se fait en semaine.
    Il y a des exceptions, bien sûr, comme les exercices plus longs, les stages commandos ou la formation initiale. Je ne parle pas bien sûr des opérations extérieures. Mais le principe du travail dominical est, dans son principe, respecté.
    Même chose chez les pompiers, à mon avis. S’entraînent-ils le dimanche, ou y’a t’il juste les effectifs d’alerte ?
    Et les policiers et gendarmes ? Y a t’il autant de monde dans un commissariat un dimanche qu’un lundi ? Je doute qu’ils organisent leurs entraînements ou leurs tirs le dimanche. Là aussi, à mon avis, et vu les syndicats, les effectifs doivent se limiter au strict nécessaire, c’est à dire aux patrouilles.

  • Ralph , 30 septembre 2013 @ 18 h 18 min

    “Toutes les familles n’ont pas des enfants. La structure des familles a évoluée.”

    Oui, enfin, on a tous des parents, des frères et soeurs, des amis, des copains…
    Si vous avez le mardi comme jour de repos, votre femme le mercredi, votre frère le jeudi et votre meilleur ami le vendredi… bonjour la convivialité !

  • J.75 , 30 septembre 2013 @ 18 h 28 min

    Merci Eric Martin pour cet article!

    Je suis quasiment totalement en phase avec celui-ci (je suis contre le travail dominical généralisé).

  • Ralph , 30 septembre 2013 @ 18 h 28 min

    A quoi ça sert de se lamenter sur l’individualisme forcené, le manque de liens entre les générations, les enfants livrés à eux-mêmes, la solitude de nombreux trentenaires… si c’est pour demander aux uns de faire leurs courses et aux autres de travailler ?
    Une sortie nocturne le samedi soir, quand on a vingt ans.
    Un week-end avec les amis, quand on a trente ans.
    Un dimanche avec les enfants, à quarante ans.
    Une réunion familiale, à cinquante ans.
    Du temps passé avec le petit-fils, quand on a soixante ans et qu’on n’est pas encore à la retraite.
    Le repos dominical, ça concerne tous les âges.

  • V_Parlier , 30 septembre 2013 @ 18 h 52 min

    Mais comme l’a dit Attali, la famille est un obstacle au progrès, n’est-ce pas? (Je précise que c’est de l’humour noir pour ceux qui lisent trop vite…)

Comments are closed.