Y aurait-il encore, au pays de France, en ces temps avancés, quelqu’un, un homme, une femme, pour se préoccuper du peuple français ? Pour s’enquérir sur le sort qui lui est réservé, sur la manière dont il vit ? Un peu comme un père, qui, avec du recul, s’interrogerait sur ce qu’il a imposé et transmis à son fils, et qui, ne manquerait pas de douter au fond de lui, du bien et du mal de ce qu’il a fait.
N’y a-t-il plus de bergers en ce vieux pays, de ces gens qui connaissant les terres, les aléas des transhumances, et qui ayant vu, au moins une fois, un troupeau se jetant dans l’abîme, soient à même de juger, des chemins à emprunter, pour préserver l’avenir du cheptel ?
A moins, que cela vienne du fait qu’il n’y ait plus d’objet. Plus de peuple comme plus de troupeau. Donc, plus besoin de chef pour guider le peuple, plus besoin de berger pour conduire le troupeau. D’ailleurs, n’y a-t-il pas dans l’idée de peuple, une notion, d’assemblage d’êtres qui se ressemblent, mais aussi une notion d’enracinement. Qui dit racines, dit arbre, terre, campagne, terroirs, troupeaux paissant en paix sur de paisibles étendues. Evidemment, des arbres poussent aussi dans la pollution des villes, il y a également des chiens dans les cités. Des roquets assez souvent, qui n’ont rien à voir avec ces chiens de bergers infatigables et silencieux, et qui œuvrent sans relâche à l’intérêt du troupeau.
Donc, il ne serait à priori pas anormal, que le peuple n’existant plus, il n’ait plus besoin de chefs. De ceux, qui savent dire les choses, simplement, de ceux qui sont entendus, car quand ils parlent, ils ne parlent pas en leur nom, mais au nom du peuple. Ils ne sont que les outils d’une main invisible, qui les élève au dessus de la cacophonie générale, et dans l’intérêt général.
Il faut admettre aussi que le peuple a bien changé. Où est le peuple de Saint Louis ? Celui du bon roi Henri ? Ceux de Louis XIV semblent déjà si loin ! Que reste t-il des ouvriers et paysans du siècle dernier ? Le peuple est devenu une sorte de famille, plusieurs fois décomposée et recomposée, constituée d’enfants que rien n’assemblent, à qui on a tout autorisé, tant et si bien, que ça ne ressemble aucunement à une famille, ni davantage à un peuple.
De facto, le peuple n’existe plus. L’on ne sait qui est aux commandes dans cette œuvre de démolition massive, mais tout cela se passe assez remarquablement. Eloigner les gens de leur terroir, les rendre incapables de se prendre en charge, de produire de quoi survivre, détruire la structure de base de la civilisation que constitue la famille. Et cependant, le populisme continue d’effrayer les « élites » empommadées, qui manifestement ont peine à établir la hiérarchie des périls qui les menacent. Les derniers capétiens avaient eu du fil à retordre avec leurs nobles. A présent l’établissement, cette imposante noblesse de robe, est plus que jamais disposé à sucer le sang, de ce que qu’il reste de pauvres imbéciles persistant à vivre à l’image de leurs anciens. Ce tiers état là n’en finit pas de se faire saigner. Il n’a plus de représentants à la chambre, il n’y a plus de roi. Alors, les tenants de la « démocratie » craignent très fortement, ce populisme potentiel, cet esprit de royauté, de bon sens, qui persiste en germe, dans le peuple de France.
C’est que le mal puissant et sournois qui détruit le peuple, comme ces mauvaises maladies, se garde bien d’apparaître droit et bien à vue. « Nous savons très bien, nous autres français, que ce qui nous attend… » Bernanos en 1937, prophète qu’il fut, avait sans doute moins de mal que le citoyen ordinaire d’aujourd’hui, à localiser l’ennemi, qui se présentait sans subterfuge.
Le peuple abandonné va-t-il se laisser aller, devant l’incurie générale et l’amoindrissement de la qualité des chefs, à « anoblir », une nouvelle clique de parasites, qui viendra pareillement lui arracher la laine sur le dos ? D’autant qu’il faudra peu de temps pour que ces derniers, au langage à présent irréprochable, soient cul et chemise avec le reste des nantis du lobby politico-médiatique.
Les abandons successifs, de la France et des Français, dont personne n’est dupe, sont ces maladies que le plus grand nombre a fini par accepter. Parce qu’il n’y a eu souvent que peu de voix, qu’une seule voix, pour oser dire la réalité des choses. Comme devant les maux incurables, quand les familles papotent à voix basse.
A présent, la voix du peuple, de ce qu’il en reste, doit se taire. La voix du peuple ; le peuple, ni raciste, ni xénophobe, ni homophobe, ni encore moins antisémite, mais simplement français. Dans ce qu’il y a de français et d’universel, à penser, qu’un enfant naît d’un homme et d’une femme, unis par l’amour. Qu’un homme, quand il voit paraître un enfant, n’a de cesse de se mettre au travail, si ce n’est déjà fait. Comme l’oiseau construit son nid, il bâtit sa maison. Jadis, et parfois encore de nos jours, il s’active au jardin, plante des arbres fruitiers pour les cueillettes de demain. Il sait que les territoires, depuis des temps lointains, abritent des hommes des faunes et des flores spécifiques. Qu’on ne plante pas d’oliviers dans les terres noires, plus que de chênes dans le désert.
« Les chênes qu’on abat » ; dans nombre de familles, on a pris l’habitude, de déraciner les vieux, pour les mettre à mourir dans des maisons de retraite, et permettre ainsi aux jeunes de mener des vies plus jouissives. Les vieux, c’est toujours les autres, c’est toujours dans le lointain. De Gaulle avait gracié Pétain, pesant d’une main le mal, de l’autre le bien.
Ce qu’il reste de français a le cœur un peu pincé : « Ils ont viré le vieux ! » Celui qui s’est battu seul contre tous, et Dieu sait, que « tous » étaient nombreux. Ils ont viré le vieux, pour des ronds de cuir, qui si un jour, ceux là ont mouillé leur chemise, ça devait être sur les bancs des meilleures classes préparatoires. Ils ont viré le vieux, et son enfance au sol de terre battue.
C’est un peu plus de la France qui est vaincue.
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