Impuissant face aux problèmes des Français, le président François Hollande chercherait-il à redorer son blason sur la scène internationale ? Ou voudrait-il simplement se donner bonne conscience en engageant la responsabilité de la France dans une intervention militaire en Syrie ? Et qu’importe s’il est dans l’illégalité internationale en intervenant sans l’autorisation du Conseil de sécurité de l’ONU, car les occidentaux partent faire régner l’ordre en Syrie. La France veut « punir » le régime de Bachar al-Assad qu’elle suspecte d’avoir utilisé des armes chimiques contre les rebelles syriens. Alors même que les experts de l’ONU ne sont pour l’heure parvenus à aucune conclusion. « Comment pouvons-nous savoir à ce jour, qui étaient les auteurs de ces attaques chimiques ? » s’interrogeait le 27 août Grégoire III Laham, patriarche d’Antioche de l’Église catholique melkite. D’autant plus que l’experte onusienne Carla Del Ponte, ex-présidente de la Cour pénale internationale pour l’ex-Yougoslavie, affirmait il y a quelques mois que les rebelles utilisaient des armes chimiques. « On ne peut pas accuser à tour de rôle le gouvernement et l’opposition. Il n’y a rien de tel pour attiser la violence et la haine », déplore encore le patriarche melkite dans une interview accordée à l’Aide à l’Eglise en Détresse.
La précipitation de François Hollande à vouloir engager nos forces armées en Syrie est donc « incompréhensible », pour Nicolas Dupont-Aignan, député et président de Debout la République. En effet cette décision est loin de faire l’unanimité dans la classe politique française. Entre réserves et franches oppositions, à droite comme à gauche les réactions se multiplient. Pierre Laurent, secrétaire national du PCF fait savoir qu’ « on n’arrêtera pas le massacre en continuant l’escalade militaire. Et l’intervention […] va continuer à tuer des civils, à faire encore davantage de blessés. Elle alimentera l’embrasement militaire actuel ». De l’autre côté de l’échiquier politique la présidente du Front National, déplore une « contradiction » du président Hollande qui « d’un côté voulait empêcher la prise de pouvoir par les islamistes au Mali », et qui de l’autre « facilite l’arrivée au pouvoir des fondamentalistes islamiques en Syrie ». Selon Marine Le Pen « cette armée de rebelles effectue en réalité 90% de ses actions main dans la main avec Al-Qaïda ». « La charia, la persécution des chrétiens de Syrie, voilà ce qui attend ce pays si les Etats-Unis et la France interviennent » annonce encore la députée européenne. François Bayrou quant à lui lance un appel à la prudence et invite la France à « réfléchir en profondeur, non seulement aux frappes, mais aux conséquences de ces frappes ». Pourraient-elles « améliorer le sort des populations de la Syrie ? » interroge l’ancien premier ministre, Dominique de Villepin. « Non, poursuit-il. Au contraire, des frappes militaires nous éloigneraient d’un règlement politique, diplomatique, et n’apporteraient en aucune façon une amélioration du sort des populations » estime celui qui s’était opposé en 2003 à l’intervention française en Irak.
Le souvenir de la guerre en Irak est fréquemment évoqué. « Les occidentaux ont justifié l’intervention contre Saddam Hussein en l’accusant de posséder des armes de destruction massive. Mais ces armes n’ont pas été trouvées », rappelle Mgr Louis Raphaël Ier Sako, patriarche de Babylone des chaldéens pour qui le scénario de la guerre irakienne semble se reproduire avec la Syrie.
Dans ce pays la situation est déjà complexe et délicate, notamment pour les minorités chrétiennes. 450 000 chrétiens, selon Grégoire III Laham, ont déjà été déplacés dans le pays, ou se sont réfugiés à l’étranger. Mais les pays voisins ne sont pas à l’abri, car une intervention militaire, selon Mgr Sako, « équivaut à faire exploser un volcan dont l’explosion risquerait d’emporter l’Irak, le Liban, la Palestine ». Une situation qui laisse certains observateurs entrevoir le risque d’une troisième guerre mondiale.
Pour éviter ce scénario catastrophe, les responsables religieux, comme de nombreux responsables politiques, plaident pour une solution pacifique. « Il est temps d’en finir avec ces armes, et plutôt que d’appeler à la violence, les grandes puissances devraient œuvrer pour la paix ». Ces propos du patriarche de l’Église catholique melkite font écho à ceux du pape François, dimanche dernier lors de la prière de l’Angélus. Un appel vibrant pour que cesse le bruit des armes.
L’appel du pape :
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