par François Billot de Lochner
C’est sous le vocable de « Sarko l’Américain » que Jean-Philippe Immarigeon avait décrit Nicolas Sarkozy dans son ouvrage paru en 2007, peu après l’élection présidentielle, pour tenter de mettre des mots sur la fascination exercée par les Etats-Unis sur l’ex-président français.
Sarko l’Américain, c’était un changement de style, le règne du sans tabou et du parler franc (à défaut du parler français).
Avec Emmanuel Macron, le changement de génération politique n’a fait qu’entériner cette rupture politique et culturelle : dès le mois de juin 2017, il choisissait de s’exprimer en anglais lors de la négociation des accords environnementaux de Paris. Il récidivait en janvier 2018, à l’Université Humboldt, à Berlin. Aux Américains, il aime emprunter la référence à l’entreprise comme garante de l’efficacité et du résultat.
En voyage cette semaine aux Etats-Unis, Emmanuel Macron qui, sitôt arrivé au pouvoir, s’était empressé par une formule vengeresse de stigmatiser un président Trump hostile aux Accords de Paris (« Make our planet great again »), a mis du coca-cola dans son vin, au point qu’on pourrait les croire les meilleurs amis du monde. Il est le premier président à recevoir les honneurs de chef d’Etat depuis l’arrivée de Donald Trump à la présidence. Les images de son séjour donnent le sentiment d’un enfant émerveillé devant les vitrines des grands magasins. C’est parce que lui aussi est victime de cette maladie de la fascination américaine, consolation de puissance moyenne, pour ne pas dire puissance déchue, qui estime ne pouvoir exister qu’en brillant dans le regard de plus grand que soi.
Il y a quelques jours, Macron se félicitait publiquement, devant Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel, d’avoir ramené Trump à la raison, rien que ça, en le convainquant de se replonger « dans la durée » dans le dossier syrien par la participation aux frappes aériennes. Le démenti de la Maison blanche ne s’était pas fait attendre : il ne s’agissait que d’un engagement ponctuel, en aucun cas d’un retour prolongé à l’interventionnisme américain.
La presse française n’en continue pas moins à considérer que Macron est le nouveau favori à Washington, résultat que ni Sarkozy, ni a fortiori Hollande, n’avait réussi à obtenir. La spécialiste des Etats-Unis au Figaro, n’hésite pas à considérer Macron comme « l’élu du cœur » de Trump. Peu importe tout le mal qu’on pense de Trump par ailleurs : avec courtisanerie, on estime qu’être choisi par le président américain, c’est un titre honorifique en soi. Ce qui est certain, c’est que Trump, passez-nous l’expression, se fiche de Macron comme d’une guigne. Macron a du charme, Trump n’y est pas insensible, aime son modernisme et son profil de « winner. » Tout les rapproche… sauf l’essentiel : la Nation, l’Europe, la conception du pouvoir, le rapport à l’environnement, à la sécurité. Ce n’est donc certainement pas le président Macron qui pourra prétendre infléchir la politique du président Trump ! Au nom de quoi y parviendrait-il ?
> François Billot de Lochner préside la Fondation de Service Politique (site).
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