La Russie plutôt que la Turquie !

L’agitation présidentielle est d’une grande habileté. A la tête d’un pays à nouveau victime du terrorisme, François Hollande veut capter l’attention et la compassion du monde. Sa tournée des capitales le hisse au premier rang des grands de ce monde, puisqu’il est en première ligne de deux combats primordiaux, contre le terrorisme et contre le réchauffement climatique. Exemplaire dans les deux cas, il demande le soutien des autres Chefs d’Etat et de gouvernement sur les deux fronts. La coalition contre l’Etat islamique va s’étendre. Les Allemands vont faire l’effort inouï d’envoyer des soldats en Afrique, et les responsables de la planète vont se bousculer à Paris, pour la COP 21, histoire de montrer de quel bois ils se chauffent face à des terroristes dont ils n’ont pas peur, mais sans réchauffer inutilement la terre, ce qui est un souci infiniment plus sérieux.

Le spectacle est et sera superbe, même si le public n’est pas dupe et si nombre d’acteurs semblent réticents à respecter le rôle et le texte. Toutefois, le problème n’est pas sur la scène, mais dans les coulisses. On ne médit pas d’une victime courageuse, lorsqu’elle vient se blottir sous votre aile protectrice, mais il faut reconnaître que la politique française a été depuis plusieurs années d’une incohérence qui frise l’aveuglement. La prestation de François Hollande en duo avec Obama le révèle amplement. Le premier s’accroche désespérément à son « ni Assad, ni Daesh ». Le second en est maintenant à penser que le Président syrien pourrait éventuellement ne pas se représenter à l’élection présidentielle, surtout si les Russes le lui conseillent, ce qui est loin d’être assuré. Cela montre d’ailleurs que contrairement au prétendu « calife » de Mossoul, Assad est élu. Aussi, la position du Président français apparaît-elle bien faible. Il ressort le vieux couplet de la solution politique, comme si les solutions politiques n’étaient pas la traduction diplomatique d’un rapport de forces établi sur le terrain. Depuis le Vietnam, les Américains le savent bien. La Russie est trop engagée dans ce conflit pour y perdre la face. Les Américains en ont l’habitude, mais demeurent la nation la plus riche et la plus puissante, malgré les couleuvres avalées. Ses alliés arabes ont-ils les moyens de mener une politique qui gênerait vraiment leur protecteur ? L’autre allié, la Turquie est plus indépendante, et c’est la raison pour laquelle elle a délibérément abattu un avion russe, afin d’empêcher une alliance et une solution politique bâtie sur le rétablissement d’un rapport de forces favorable à Assad. Elle a volé au secours de ses véritables alliés, le Front islamique et Al Nosra qui combattent l’armée syrienne, et l’Etat islamique, qui combat les Kurdes et avec lequel elle se livre à toutes sortes de trafics, le pétrole des islamistes vers la Turquie, les armes et les renforts passant dans l’autre sens.

La France appartient à l’Otan comme la Turquie. Son gouvernement souhaite, comme cette dernière, la chute du Président syrien, mais il veut, de façon peu réaliste, fermer la frontière entre la Turquie et la Syrie afin d’asphyxier l’Etat islamique avant de l’écraser… sans troupes au sol. Est-ce vraiment l’intérêt de la France ? Elle n’a aucun avantage à ce que le Président Assad s’en aille contrairement à la Turquie qui souhaite que son voisin soit si possible un vassal, comme au bon vieux temps des Ottomans, mais avec les Frères Musulmans, cette fois comme relais. De quel droit d’ailleurs notre pays peut-il imposer aux syriens leur avenir ? En quoi les gouvernants français ont-ils à fixer le « sort » du Président Syrien ? Ils n’ont ni la légitimité ni la force pour y prétendre. Certes, la lutte contre des bandes terroristes qui occupent un territoire sans la moindre légalité est légitime, mais la Turquie n’y voit pas son intérêt. Qui sont les combattants aptes à affronter les djihadistes sur le terrain ? Les Turcs évidemment, non. Leurs ennemis sont les Kurdes qui fournissent le plus gros effort contre l’Etat islamique, mais ne peuvent s’avancer sur un territoire où leur ethnie n’est plus chez elle. Les Chiites irakiens ont montré leurs limites. Les troupes des Etats arabes de la coalition préfèrent réprimer les rébellions chiites à Bahrein ou au Yémen plutôt que de conforter les Chiites de Bagdad ou les Alaouites de Damas. Reste l’armée nationale syrienne qui est celle d’un Etat, qui est multiconfessionnelle, et qui bénéficie du soutien sans faille de la Russie. C’est de ce côté que penche le réalisme, et c’est donc de ce côté que doit pencher l’intérêt de la France. Pour détruire le nid où ont été couvés les terroristes qui ont frappé notre pays, il faut permettre à l’Etat syrien de reprendre le contrôle de la Syrie. Fabius, récidiviste de la sottise, prétend qu’il n’y pas à choisir entre les terroristes et une dictature. Entre des terroristes qui tuent des Français et une dictature qui ne nous fait nullement la guerre, le choix s’impose au contraire à l’évidence ! C’est ce qu’aurait pu dire François Hollande à Vladimir Poutine en nouant avec lui une alliance et en demandant au nom de la France la levée des sanctions injustes qui ont frappé la Russie lorsque celle-ci a retrouvé une province généreusement octroyée à l’Ukraine en 1954, la Crimée. Il ne l’a pas fait, réduisant sa tournée des grands de ce monde à une chorégraphie inutile d’où la France ne sort pas grandie. Puisse la réflexion conduire à plus de réalisme !

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20 Comments

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  • Centulle , 28 novembre 2015 @ 11 h 39 min

    “Exemplaire dans les deux cas, il demande le soutien des autres ” un peu comme dans la version de la Marseillaise chanté hier dans la cours des Invalides: Aux armes citoyens , marchez marchez et non marchons marchons

  • HuGo , 28 novembre 2015 @ 14 h 12 min

    Ce n’est même pas un choix mais une évidence!
    Quel malheur que ces politiciens professionnels, cette clique gauche-droite intéressée….combien de morts, de désastres supplémentaires au plan économique et social avant un renouveau ?
    Je n’attends de salut en Occident que de la France… et de la sainte Russie, mais d’abord de la France.
    “Veille France, accablée d’Histoire, meurtrie de guerres et de révolutions, allant et venant sans relâche de la grandeur au déclin, mais redressée de siècle en siècle, par le génie du renouveau !” ()
    merci mon Général, que j’élève au Panthéon, n’en déplaise aux esprits chagrins
    (repris par l’admirable académicien Jean d’Ormeson de son livre ‘Et toi mon cœur pourquoi bats-tu ?’ – les soirs d’automne) mon Général eut été digne aussi de le rejoindre, comme de rejoindre madame Hélène Carrère d’Encausse…

  • Pascal , 28 novembre 2015 @ 15 h 02 min

    Ah, si la France redevenait la France et aidait par la même occasion sa sœur russe à libérer Chypre et à restituer la deuxième Rome à l’Europe !

  • Charles , 28 novembre 2015 @ 15 h 31 min

    Réponse du berger Vladimir à la bergère Merkerelle-Erdogan:
    Déchargement de 2 camions géants avec chacun 4 tubes lance missiles S400..
    Livraison directe expresse de Russie par avion géant.
    Ces missiles sont les plus sophistiqués au monde.
    La Russie tient sous son contrôle toute la région de Tel Aviv à Ankara.
    C’est l’histoire de l’arroseur arrosé: En abattant le SU35 dans le dos…

    https://www.youtube.com/watch?v=DtWLMXAGTQ8

  • xrayzoulou , 28 novembre 2015 @ 17 h 56 min

    Au voilà un homme d’honneur, de parole et de convictions !
    Il n’est pas comme nos méduses qui se gaussent de paroles vides de sens, et dont le propos change, telles des girouettes quand tourne le vent !

  • Laurent , 28 novembre 2015 @ 19 h 17 min

    L’armée d’Assad est tout aussi limité que l’armée Kurde. Elle ne peut plus prétende contrôler des zones hors des éthnies qui la soutienne. La Syrie d’avant guerre est morte.
    Les Russes avaient l’espoir de la mener à la reconquête, Assad a montré qu’il n’avait plus que les moyens de défendre les Alouites et quelques minorités craignant sa chute. Leurs espoirs ont été douché.

  • jejomau , 28 novembre 2015 @ 23 h 20 min

    La Russie est un grand pays qui a le sens de l’Honneur parce qu’il est chrétien…

    Ains, la Russie a adopté samedi un ensemble de sanctions économiques en représailles du bombardier russe abattu mardi par l’aviation turque

    Interdiction pour les employeurs russes d’embaucher des travailleurs turcs, interdiction des importations de certaines marchandises turques ou limitation, pour les “organisations sous juridiction turque”, de leurs activités en Russie : les mesures contenues dans le décret signé samedi par Vladimir Poutine concernent aussi bien le commerce que l’emploi de main d’oeuvre ou le tourisme, des secteurs dans lesquels les liens entre les deux pays sont nombreux.

    Le gouvernement russe a aussi été chargé “de prendre des mesures pour une interdiction du transport aérien charter” entre les deux pays, tandis que les tour-opérateurs devront “s’abstenir de proposer aux citoyens russes des produits impliquant une visite sur le territoire de la Turquie”.

    Recep Tayyip Erdogan joue pour sa part l’apaisement, se disant “attristé” par ce grave incident aérien et affirmant, lors d’un discours à Burhanye (ouest), qu’il aurait “préféré que cela n’arrive pas”. Bref, il joue le “dhimmi” devant le chrétien Poutine, ayant trouvé son maître…

    Le ministère turc des Affaires étrangères, qui balise, a recommandé samedi à ses citoyens d’éviter tout déplacement non urgent en Russie, en raison des “difficultés que rencontrent les citoyens turcs qui voyagent ou qui résident” en Russie. Cette mise en garde restera valable “jusqu’à ce que la situation se clarifie”.

    La colère de Moscou reste intacte. “De notre point de vue, il est désormais difficile de déterminer le niveau de prévisibilité des actions du pouvoir turc”, a déclaré samedi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

    Vendredi, Moscou avait déjà annoncé rétablir l’obligation de visas pour les Turcs, ayant auparavant appelé les Russes se trouvant en Turquie à rentrer, en raison de “l’actuelle menace terroriste”.

    “Il ne s’agit pas de vengeance, (…) la menace est réelle”, a assuré vendredi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, qui avait peu auparavant accusé Ankara d’avoir “dépassé les limites” en abattant un bombardier russe Su-24.

    La Russie accuse en outre la Turquie, après la perte de son avion, d’avoir partie liée avec l’EI. “Un flux de combattants s’est mis en place via la Turquie dans différentes directions”, a affirmé M. Lavrov vendredi. Le ministre a réitéré que la Russie “soutenait activement” la proposition du président français François Hollande de fermer la frontière turco-syrienne, en précisant espérer que “cette initiative sera mise en oeuvre”.

    Par ailleurs, la colère monte en Russie. Des jeunes militants du parti Rodina, une formation nationaliste fondée par le vice-Premier ministre Dmitri Rogozine, ont ainsi déposé vendredi un cercueil avec une poupée à l’effigie du président Erdogan près de l’ambassade de Turquie à Moscou. Un autre mannequin représentant le dirigeant turc a été brûlé par des jeunes en Crimée

    héhéhéhéhé….

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