Quand l’État français se prend les pieds dans le tapis

C’est décidé, Hollande aura sa guerre en Syrie. Comme le mentionne Franck Boizard sur son blog, nous nageons en pleine propagande, l’intérêt de la France dans l’opération est impossible à déceler, mais Hollande aura sa guerre. Il avait envoyé les troupes pour combattre les islamistes au Mali ; à présent, il envoie les soldats pour les aider en Syrie. Et en matière de décision incohérente, en voilà donc une de plus.

Malheureusement pour nous, et pour les finances de la République du Bisounoursland, cette incohérence supplémentaire va nous coûter un pont alors même que nous n’en avions absolument ni les moyens, ni besoin. En outre, cette incohérence s’ajoute à d’autres, au moins aussi gênantes, et pour tout dire, probablement aussi coûteuses, dont nos dirigeants n’auront jamais à rendre compte.

Et je dis cette dernière phrase avec d’autant plus de certitude que nous avons, aujourd’hui même, un exemple criant de cette absence totale et décontractée de tout suivi dans les décisions prises. Magie de la démocratie qui permet de changer les têtes à l’exécutif d’une élection à l’autre : ceux qui ont commis des erreurs catastrophiques au temps T ne sont plus en place, évidemment, au temps T+1 élection, et plus personne n’ira les mettre en face de leurs responsabilités. Et cette magie s’opère à tous les étages du mille-feuille institutionnel que la France a mis en place : un maire, se sachant sur le départ, n’aura aucun mal à signer pour sa commune des travaux au prix pharaonique que son successeur devra gérer, tant bien que mal. Difficile de ne pas imaginer que certains aigrefins se soient glissés parmi nos édiles, aigrefins suffisamment retors au point de choisir sciemment des prêts toxiques.

Vous n’y croyez pas ? Allons, ne soyons pas naïf ! Lorsqu’un gouvernement choisit, par exemple, d’instaurer des impôts et des ponctions qu’il sait pertinemment contrevenir aux actes européens qu’il a lui même signés, ce n’est pas sur un coup de tête. Ce n’est pas un oubli. Ce n’est pas une coïncidence fâcheuse. Lorsque le gouvernement suivant continue dans la même voie alors qu’il est pourtant largement prévenu que ces ponctions sont illégales et devront être remboursées, ce n’est pas non plus par peur de mal agir. Ce n’est pas par manque de courage. Ce n’est toujours pas un oubli. C’est, dans tous les cas, délibéré, calculé et choisi. Et le jeu en vaut la chandelle, pour les politiciens qui savent qu’ils ne seront jamais confrontés aux conséquences de leurs prises de décisions calamiteuses.

“Les politiciens qui savent qu’ils ne seront jamais confrontés aux conséquences de leurs prises de décisions calamiteuses.”

Alors même que le porte-avion Charles-de-Gaulle se dirige vers la Syrie pour montrer que sa coque est complète, ses hélices pimpantes et sa piste de décollage toute propre, le dernier exemple en date d’une telle incurie est celle soulevée par la Cour des Comptes. L’affaire remonte déjà à plusieurs années, et j’en avais fait mention dans un précédent billet qui expliquait la situation : il y a maintenant près de dix ans (2004), le fisc a décidé de taxer les dividendes engrangés par certains fonds européens (OPCVM), étrangers donc, opérant en France, alors que des fonds français, eux, ne payent aucune taxe sur ces mêmes dividendes. Rappelé à l’ordre dès 2006 par l’Union Européenne à la suite de plaintes posées par les fonds étrangers, le gouvernement de l’époque s’était rapidement empressé de ne rien faire. Après lui, le déluge.

Mais le déluge ne fut pas pour le gouvernement Fillon qui lui aura succédé et a donc décidé, de 2007 à 2012, de continuer sur la même stratégie efficace : ne rien faire. Et même si l’État français sera officiellement condamné en 2009, le fisc continuera de prélever son écot, les contribuables étrangers de payer, et les fonds de se plaindre en déposant 10 000 réclamations, au point qu’il aura fallu mettre en place fin 2010 une procédure de traitement spécifique au tribunal administratif de Montreuil. Pendant ce temps, tout le monde, au gouvernement, s’en foutait.

Et stratégiquement, ils avaient raison puisqu’à présent, c’est le gouvernement Ayrault qui va devoir gérer le contentieux dont le montant total s’établit à plus de 10 milliards d’euros.

Oui, vous avez bien lu : la brochette d’incapables du gouvernement actuel va devoir gérer une ardoise de 10 milliards d’euros laissée par la précédente bande de clowns hydrocéphales.

Rassurez-vous : ni Fillon, ni Ayrault, ni Villepin ne se retrouveront jamais dans une geôle de la République pour avoir laissé une telle somme en souffrance. Ils auront solide retraite, jolis appartements de fonction, garde armée et pages réservées dans notre belle Histoire. Pourtant, il n’y a absolument aucun doute qu’ils sont directement responsables de cette situation.

On pourrait croire que cette maladie n’est développée que par les amibes de droite. Il n’en est rien. Elle est également répartie sur tout le spectre politique français et les protozoaires de gauche sont aussi touchés. Il est ainsi difficile de ne pas rapprocher les décisions foireuses de l’État français de taxer les OPCVM étrangers des décisions ratées de l’État français d’empêcher Mercedes de vendre ses voitures en France, au prétexte que serait dangereux le fluide réfrigérant que la marque allemande emploie. En substance, on se rappelle que fin juillet, la firme originaire Stuttgart s’était vue interdire la vente de ses véhicules au motif qu’ils représentaient un « grave risque pour l’environnement » (il est vrai que ces véhicules, dans certains quartiers kartchiers sont régulièrement liés à des événements graves, mais je ne suis pas sûr que ce soit de ça qu’il s’agit).

Mais voilà : la décision initiale était éminemment politique puisqu’il s’agissait surtout d’enquiquiner les Allemands par voie non diplomatique traditionnelle alors que ces derniers montent régulièrement au créneau pour appeler Paris à un peu plus de modération dans les dépenses somptuaires et sociales de l’État français, et ce alors que la crise continue de montrer son visage le plus noir et que l’économie française continue de calancher doucement. À cette décision purement politique a donc succédé une décision de justice qui vient de casser cette interdiction.

On pouvait, bien sûr, s’y attendre. Comme dans le cas des taxes farceuses sur OPCVM étrangers, il semblait acquis que l’interdiction rigolote des Mercedes sur le territoire français ne pourrait pas durer, et que les minables magouilles politiciennes seraient, au final, arrêtées. Tout comme l’autre affaire, celle-ci coûtera à la France en prestige, en TVA, en relation diplomatique. Pour quelques minutes de gloire, nos politiciens ont encore une fois agi n’importe comment, et ne seront, bien sûr, pas tenus pour responsables de la débâcle qui suivra inévitablement.

Comme je le disais en introduction, Hollande aura sa guerre en Syrie. Tout comme l’affaire des OPCVM, tout comme l’affaire des Mercedes, cette guerre n’aura absolument aucun effet bénéfique pour la France. Il n’y aura, de ces décisions, aucun bénéfice à retirer pour la collectivité et ce bien commun dont se gargarisent à longueur de journée les pignoufs de notre petit théâtre politique national.

Bien sûr, le bénéfice politique, immédiat ou de court terme, de ces décisions a, lui, bien été récupéré par ceux qui les prirent. Les effets de bords néfastes, les trous abyssaux dans les finances, eux, seront laissés à la postérité. Et la responsabilité des prébendiers ne sera, elle, jamais évoquée.

Ce pays est foutu.

> h16 anime le blog hashtable. Il est l’auteur de Égalité taxes bisous.

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65 Comments

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  • mariedefrance , 29 août 2013 @ 11 h 31 min

    Le chevalier blanc, c’est le peuple, et il faut juste rétablir la démocratie.
    Il faudrait que le pouvoir de choisir son destin soit remis au peuple.

    Quant a Marine, i elle est élue et si elle décide d’appliquer son programme, je pense que dans les 48 heures, elle subira le même destin que Kadhafi dans son dernier convoi.

    De toute façon, il suffit d’appuyer sur un bouton pour déclencher des émeutes simultanément dans les 750 zones a pépites.

    Et la, la situation sera totalement ingérable par manque de moyens humains et matériels, a moins de taper dans le tas, et de se mettre la communauté internationale a dos, et surtout nos fournisseurs attitrés de pétrole et de gaz…

    Un embargo “humaniste” sur le pétrole, et la France dirigée par des “fascistes” selon l’ONU tombe comme un fruit mur en 1 mois.

    Donc, je ne crois pas trop a ce scenario, et Marine sera obligée de composer.

    Avez-vous une idée ?
    Notre souveraineté est piétinée.

    Il faudrait commencer par sortir de cette UE anti-démocratique !
    je voterai donc NON = FN pour les Européennes en 2014.

  • Pierre ghi , 29 août 2013 @ 12 h 07 min

    Rien à voir avec le soutien aux rouges, j’avais souhaité une mobilisation devant les préfectures et j’ai été entendu (merci mon dieu). Ensuite vous rendez-vous compte du rejet dont vous faites preuve, avec ce genre d’attitudes l’opposition à la loi Taubira est foutue. Les pétitions, que je signe n’ont que peu d’effet, la mobilisation physique elle fait bouger les lignes. Les chrétiens d’Orient ne valent pas ce front commun ?

  • Pierre ghi , 29 août 2013 @ 12 h 12 min

    Contre la guerre rien ne vaut la mobilisation, le rassemblement physique du plus grand nombre devant dans ce cas, vos préfectures, Ca se passe aujourd’hui, pensons aux chrétiens et autres minorité. Demain la menace de partition pour nous car eux c’est nous dans 15 ans ! VENEZ NOMBREUX JEUDI 29 AOUT DEVANT VOS PREFECTURES

  • monhugo , 29 août 2013 @ 14 h 08 min

    Le conditionnement via la propagande, médiatique spécialement, a de beaux jours devant lui. Résultat, pour l’électeur d’opposition au pouvoir actuel : le FN, c’est “pas bien” ; l’UMP, c’est “bien”.
    Comment avancer dans ces conditions ?
    Je dis pour ma part : l’UMP, c’est “pas bien” (on l’a amplement vue à l’oeuvre, l’Union pour un Mouvement Populaire). Quant au FN, tentons, et on jugera sur pièces.

  • monhugo , 29 août 2013 @ 14 h 17 min

    Qu’ai-je écrit qui soit différent de ce que vous écrivez ?
    Il n’y a pas de gaz sarin en Syrie – hypothèse A. Il y a du gaz sarin en Syrie, et il a été utilisé. Par les “rebelles” (en fait les mercenaires, saoudiens ou autres) – hypothèse B.
    L’idée, pour une extension du conflit, sous couvert de mandat onusien, et pour “secourir les populations civiles”, étant d’accréditer une hypothèse C : le gaz sarin a été utilisé par Assad.
    On ne trouvera rien (le “on” étant les observateurs de l’ONU, “inspectant” encore en Syrie – à Damas aujourd’hui). On dira donc que Assad, en plus d’être un assassin, est un fourbe (qui a fait disparaître les preuves). Et on fera comme en Irak : là, le “on” risquant d’être l’Oncle Sam, avec ses supplétifs européens, dont Fantoche 1er.

  • monhugo , 29 août 2013 @ 14 h 20 min

    Le pire étant que quand Fantoche 1er se fait chef de guerre, sa popularité remonte aussitôt.

  • Tirebouchon , 29 août 2013 @ 14 h 43 min

    Hollande le va-t-en guerre devrait montrer l’exemple en endossant le treilli et en allant sur le champ de bataille avec la chair à canon mensualisée. Les pro guerriers comme BHL, le trou du cul de la nouvelle philosophie à la Française, devrait aussi prendre y aller avec ses peties guêtres. Tous ces braves justiciers à la mord moi le noeud devraient aussi prendre à leur charge financièrement leur guéguerre ! Et si la bas, en même temps, ils pouvaient y laisser leur pipes la France y aurait beaucoup à gagner !

    Pas une seule fois ces amoureux de justice ont pris une position d’imposer par la force à l’état sioniste le respect des droits des Palestiniens, Chrétiens et musulmans….Mais ils veulent imposer leur vision de justice au monde arabe….curieux tout de même ! Au bout du compte à qui rapporterait le crime ?

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