La fondation de la Ve République reposait sur une volonté claire : redonner à la France des institutions qui permettent à un exécutif disposant d’une solide légitimité de diriger le pays dans la continuité afin de lui rendre possible la poursuite du Bien Commun par une politique cohérente à l’intérieur et indépendante vis-à-vis de l’extérieur. Tous les sept ans, l’élection d’un Homme (ou d’une femme) par le Peuple devait donner au Président de la République l’autorité nécessaire pour protéger les institutions, représenter la Nation et préserver ses intérêts à long terme. Les élections législatives pouvaient conforter ou infléchir cette orientation en offrant au gouvernement une majorité nette issue d’un scrutin uninominal à deux tours par circonscription. C’est ce mode électoral qui garantit la stabilité des systèmes politiques anglo-saxons, accentuée par le fait qu’il n’y a qu’un tour. L’esprit de notre Constitution consistait à sortir la France du règne des partis, des combinaisons politiciennes et de l’impuissance dans laquelle était tombée la IVe République. Peu à peu, les partis et le jeu politicien ont fait leur retour, grâce notamment à la réduction du mandat présidentiel à cinq ans. Il y avait une logique dans cette évolution qu’on pouvait accepter ou déplorer. C’était « l’américanisation » du fonctionnement avec une alternance de deux partis dominants qui pesaient de plus en plus sur le choix des électeurs puisqu’ils désignaient les candidats. Les primaires ont poursuivi dans la voie américaine en élargissant cette désignation à la base populaire. Si cette logique avait prévalu, le second tour de l’élection présidentielle devrait voir s’affronter François Fillon et Benoît Hamon. Or, c’est loin d’être assuré.
D’abord, il y a un troisième parti qui est devenu le premier en nombre de voix, qui est quasi-systématiquement exclu des exécutifs, sauf dans quelques communes, et même de la représentation nationale. Cette situation insolite trouve son origine dans la courte vue des politiciens qui depuis longtemps dirigent (mal) notre pays. Ils ont préféré leurs médiocres intérêts personnels ou partisans à la cohérence des institutions. La proportionnelle aurait dû être systématiquement exclue de tous les scrutins. Or, on l’a introduite aux européennes et aux régionales. Un parti, le plus « à droite », a donc pris son essor, comme c’est le cas dans tous les pays qui ont ce mode de scrutin, en raison notamment des exigences populaires en matière de sécurité et d’identité nationale. Mais, en France, celui-ci est tenu à l’écart du pouvoir comme si ses électeurs n’existaient pas. Dans les pays anglo-saxons, et aux Etats-Unis, notamment, le bipartisme est certes maintenu, mais lorsque la « demande » évolue, c’est le parti qui suit ses électeurs. C’est ainsi que le Parti Républicain a opéré depuis longtemps déjà, mais plus que jamais aujourd’hui, un net glissement à droite. Pour ma part, j’ai toujours considéré qu’il devait en aller de même en France. En 1986, le RPR, qui défendait la préférence nationale pouvait encore prendre ce virage. Mais ses dirigeants ont fait l’inverse. Le mouvement gaulliste s’est noyé dans un centrisme qui l’a même conduit à privilégier un prétendu front républicain par rapport aux options patriotes souhaitées par nombre de ses électeurs. Chirac, très à droite au début des années 1980 a glissé à gauche. Sarkozy élu à droite a immédiatement trahi ses électeurs en pratiquant l’ouverture à gauche. Constamment, la hantise d’un recentrage de la gauche et d’une alliance de celle-ci avec le centre, poussait les caciques des « Républicains » actuels à sauvegarder leur alliance avec le parti centriste, même affaibli, l’UDI aujourd’hui. Ce qui se passe actuellement démontre l’aveuglement de cette stratégie. L’alliance manoeuvrière entre Bayrou et Macron réalise ce centre-gauche que craignaient « Les Républicains » alors qu’ils ont été incapables de construire une droite conservatrice et populaire qui correspond pourtant à une véritable demande, celle que Buisson avait intelligemment pressentie.
D’un point de vue gaulliste, ces tactiques sont dérisoires par rapport à « l’intérêt supérieur de la patrie ». Depuis des décennies, le pays a besoin d’une ferme politique de redressement et d’assainissement. Cela demande des efforts et de la rigueur. Le seul candidat à l’avoir incarnée a été Edouard Balladur. Il a été victime de la démagogie soutenue par nombre de médias. C’est d’ailleurs l’homme plus que sa politique qui a été ciblé. Aujourd’hui, le même processus se reproduit à l’encontre de François Fillon. Il est le seul à proposer les mesures capables de restaurer notre compétitivité économique et de rétablir sérieusement notre indépendance nationale, laquelle a d’abord besoin d’un pays fort. Or, il a fait l’objet d’une manipulation scandaleuse sans doute pilotée par l’Elysée et associant médias et justice. Le bénéficiaire en est évidemment Macron. Après avoir subi le pire mandat présidentiel de la Ve République, il est possible que les Français choisissent le dauphin du locataire de l’Elysée dont apparemment on ne sait pas avec qui il gouvernera ni ce qu’il fera. En le ralliant, Bayrou commet une forfaiture. Comment lui qui dénonçait la collusion de ce candidat avec les puissances d’argent peut-il le soutenir en sachant qu’il ne partage aucune de ses « valeurs morales », incarnées, si je puis dire, par Bergé parmi ses soutiens ? Les interventions répétées et unilatérales de la Justice, l’orientation manifeste de médias aux mains d’intérêts puissants, devraient soulever la résistance des Français devant la manipulation dont ils sont l’objet. Que Les Républicains en profitent pour prendre conscience de l’erreur de jugement qui les conduit à cette situation. Il en va de la sauvegarde de la Ve République et par là-même de l’avenir de la France.
3 Comments
Comments are closed.