Tom,
J’ai lu avec attention ta tribune publiée lundi 26 octobre dans le Süddeutsche Zeitunge et je dois te confesser que tu m’as déçu. Oui, j’ai été déçu par ton manque de prudence et la faute politique que tu as commise.
Dans cet écrit, tu appelles de tes vœux une plus grande déréglementation du marché du travail afin d’accueillir les 800 000 réfugiés qu’Angela a généreusement convié. En substance, tu expliques souhaiter la création de milliers d’emplois faiblement rémunérés avec des exceptions au salaire minimum. Tu justifies ce choix par ta volonté d’intégrer ces nouveaux venus ainsi que ta préférence des mini jobs sur l’assistanat.
Bon, il est vrai qu’avec tes 4,8 millions d’euros de rémunération en 2014, tu dois sans doute parfois perdre de vue le sens des réalités. Mais tout de même, une idée pareille, c’est extrêmement embarrassant. Tu viens là directement souffler sur les braises des partis populistes en Europe ! Déjà que Malek traduisait l’inquiétude de beaucoup de les voir au pouvoir en France en 2017, avec ton propos, nombreux sont ceux désormais au bord de l’apoplexie.
Ah parce que je les entends déjà les gars du Front. « Electeurs, électrices, vous voyez que nous avions raison. Le patronat encourage l’immigration de masse pour créer de la concurrence entre les travailleurs et baisser les salaires. Il faut fermer les frontières et vite ! »
On avait déjà eu Pierre, tu sais notre big boss des patrons, qui avait lui aussi fait une belle connerie en expliquant que « les migrants sont un atout pour la France ». Bon je t’avoue que personnellement j’ai eu du mal à comprendre comment avec 6 millions de chômeurs, le pays allait pouvoir absorber cette main d’œuvre. Mais comme Pierre est sûrement intelligent, j’ai subodoré qu’il avait demandé à ses potes de ne pas créer d’emplois avant 2017 histoire de ne pas inverser la courbe du chômage, tu sais cette promesse des socialistes qui conditionne… Bref, tu as compris la stratégie de ce rusé gredin.
Mais revenons à notre affaire. J’en connais un qui doit sabrer la pinte dans son cercueil, c’est Karl. Franchement, avec un tel discours, tu valides en quelques lignes toute sa théorie sur l’armée industrielle de réserve et l’exploitation des travailleurs par les détenteurs du capital. Alors bien sûr qu’on est content de faire rentrer toutes ces « chances » en Europe et de mettre un bon coup de pression aux ouvriers blancos qui ont tendance à roupiller et à ronchonner sur leur salaire. Mais tout Tom Enders que tu es, tout patron d’Airbus Group que tu es, il y a des choses qui ne se disent pas.
A l’avenir sois plus prudent, Tom. Tiens des propos moins directs ou plus ampoulés si tu préfères. Laisse parler l’esprit bisounours qui sommeille en toi. Comme tu es mon ami, je te laisse ces quelques lignes pour inspirer ton prochain discours. Avec ton accent allemand, elles feront leur effet, j’en suis certain.
« Ach, je suis déterminé à recevoir avec beaucoup de chaleur tous ces pauvres êtres que la vie a brisés, ces flots humains rejetés par les vagues, ces familles en quête d’un peu de bonheur et de paix. En Allemagne, nous avons une grande tradition de l’accueil ferroviaire : vous serez amenés à l’usine directement et rapidement. Après, on vous emmènera à Munich, dans des cabarets. On vous bourrera de quiche et d’énormes pintes de bière. Vous finirez en farandole en hurlant des tyroliennes et en vomissant partout. Vous ne regretterez pas votre voyage ! »
> Henri Dubreuil prend sa plume pour s’adresser à des personnalités qui font l’actualité, en toute amitié…
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