Tribune libre de Christian Vanneste*
Les amis de Nicolas Sarkozy se réunissent à Nice tandis qu’une majorité de sympathisants du parti souhaitent son retour. Il a reçu plusieurs responsables de l’UMP au Cap Nègre et a fait entendre sa voix sur une question de niveau éminemment présidentiel, puisque du domaine de la politique internationale, la Syrie. Manifestement, Sarkozy, c’est pas fini. Le souvenir de l’ancien Président hante à tel point l’esprit de ceux qui rêvent de lui succéder que leur positionnement dans la course à la présidence du mouvement se situe essentiellement par rapport à lui.
On peut simplement s’interroger sur le chassé-croisé qui s’est opéré. Pendant la plus grande partie du mandat présidentiel, le Premier ministre avait joué à la perfection le rôle de lieutenant fidèle, avec les qualités logiques d’une ombre, la discrétion, la sobriété, et une vision plus sombre de l’avenir. Aujourd’hui, il tente de transformer cette différence de style en atout de fond. Fort du soutien potentiel d’une majorité de sympathisants, il souhaite incarner une synthèse de ceux qu’il imagine volontiers comme ses prédécesseurs : un Président normal au service d’une politique efficace de réforme. En revanche, l’actuel secrétaire général, qui n’avait pas toujours été avare de petites phrases et de propositions dérangeantes pour le Président, s’est mué en héritier, gardien des reliques, prêt à tenir le sceptre jusqu’au retour. Ce jeu est révélateur de ce qu’est devenue la politique, dominée par ce que Milan Kundera appelle avec justesse, l’“imagologie ». Les idées importent peu, leur mise en œuvre, moins encore. Seule compte la posture, qui n’est souvent qu’une imposture. Nicolas Sarkozy avait compris cette évolution : posture de « droite », pendant les campagnes, afin de siphonner le FN, puis ouverture à gauche. Cela a failli fonctionner deux fois, ce qui prouve le talent.
Pour qui considère la politique dans une grande démocratie comme l’affrontement loyal entre des convictions opposées, mais capables de s’incarner dans la responsabilité du pouvoir, l’UMP représentait la chance de structurer la droite, dans le cadre logiquement bipartisan de notre système électoral dominant. En elle devaient se regrouper le gaullisme et son souci national, le libéralisme et sa préoccupation économique, la démocratie-chrétienne et son exigence sociale. Pour ma part, je me sentais proche de ces trois familles et j’ai donc beaucoup espéré dans la naissance de l’UMP. J’ai toujours manifesté plus de réticence à la présence des radicaux. Ce parti fossile de la IIIe République est paradoxalement celui qui appartient le plus au règne actuel des images mouvantes et fugaces, des postures et des impostures. Prêts à toutes les démagogies et à toutes les alliances avant-guerre, il se situe aujourd’hui, comme son jumeau de gauche, au centre, là où prospèrent les ambitions et les carrières, dans le marais des coteries si présentes au sein de l’UMP. Lorsque le nom d’un parti est une antiphrase, cela devrait éveiller la méfiance !
“Manifestement, Sarkozy, c’est pas fini.”
La compétition qui s’ouvre pour la présidence de l’UMP devrait être plus claire et devrait répondre à trois exigences :
Le Président, contrairement au secrétaire général, n’est pas un simple gestionnaire du mouvement. Il a vocation à incarner l’opposition durant le mandat présidentiel, et, s’il n’a pas déçu, à être le prochain candidat.
Le choix en sa faveur doit être fondé sur une orientation idéologique sincère et non sur une posture mensongère. La France réclame des réformes structurelles profondes. Il faut s’engager à les faire et pas seulement le temps d’une campagne pour prendre ensuite comme ministres Fadela Amara, Bernard Kouchner ou Martin Hirsch…
La politique française ne peut pas se résumer à un chassé-croisé d’une gauche verbeuse et irréaliste et d’une droite avide de pouvoir et incapable de l’exercer. L’opposition, comme le renard de la fable, sans même se donner la peine de la flatterie, mais par la simple usure du pouvoir, dans une situation difficile, attend que les fromages des collectivités locales, lui reviennent dans deux ans, puis le Sénat, enfin les palais nationaux dans cinq. Les Français vont-ils se satisfaire de cette alternance, qui finalement, laisse toujours les mêmes professionnels de la politique au pouvoir, ou vont-ils exiger un vrai changement, une alternative plus franche disposant d’un soutien plus large. Voilà aussi une question à laquelle le futur Président de l’UMP devra répondre.
*Christian Vanneste est un ancien député UMP du Nord.
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