Déboussolée : tel est le mot qui décrit le mieux l’état d’esprit de la société française. Passant d’une émotion à une autre, d’une mobilisation des braves gens marchant dans un sens puis dans l’autre, d’une opinion publique tirée sans cesse à hue et à dia. Que penser, par exemple, du soutien à Serge Atlaoui ? Qu’un élan de solidarité nationale se manifeste est compréhensible. Mais si, en connaissance de cause, il a participé à la production de drogue, son appartenance nationale doit-elle lui octroyer un privilège ? La France a abandonné la peine capitale. D’autres pays qui n’ont pas les mêmes traditions religieuses, culturelles ou juridiques l’appliquent avec sévérité contre l’ensemble du trafic de stupéfiants. C’est le cas en Indonésie ou à Singapour. D’autres pays encore condamnent à mort pour blasphème. C’est le cas du Pakistan qui détient dans le couloir de la mort Asia Bibi, laquelle n’est pas française, mais risque sa vie pour avoir bu un verre d’eau dans un puits musulman et dit préférer le Christ à Mahomet. Autant le droit à la liberté de penser et de s’exprimer est une exigence universelle, autant le droit à la vie, quelques soient les atteintes commises envers la vie des autres, peut dépendre du contexte propre à un pays. Il est possible que Serge Atlaoui ait participé à la réalisation d’un « laboratoire » dont il ignorait la finalité. Dans ce cas, la peine subie serait tragiquement disproportionnée. Dans le cas contraire, il faut faire preuve d’une grande retenue à l’égard d’une région du monde qui a décidé de mener une lutte impitoyable contre la drogue. Les ravages que celle-ci provoque chez nous devraient susciter notre réflexion.
En France, en effet, l’actualité récente agite confusément l’opinion. Depuis 2010, les tests de dépistage sont en vente libre. Comme d’habitude, l’idéologie soixante-huitarde qui domine notre microcosme avait crié au « contrôle social » éthiquement inadmissible, voire au flicage parental. Cinq ans après, les chiffres sont alarmants. L’Observatoire français des drogues révèle que près d’un jeune sur deux dans notre pays a fumé du cannabis. La consommation habituelle voire quotidienne progresse. 25% des fumeurs occasionnels s’exposent à des risques importants. Ceux-ci vont des échecs scolaires dus aux défauts de mémoire et d’attention jusqu’aux dérives psychiatriques en passant par les accidents mortels provoqués par l’usage des drogues. La gauche, faute de moyens pour cultiver sa « générosité sociale » avec l’argent des autres, après avoir déjà ruiné le pays économiquement, entreprend de le tuer sociétalement. Que nous dit-elle ? La drogue est un fait. C’est bien connu : on ne peut rien contre les faits, surtout lorsqu’ils transgressent les valeurs conservatrices. Mais, bien sûr, on peut tout dès lors qu’il s’agit d’interdire des comportements ou même des idées liées à ces valeurs. De plus, « l’herbe », c’est une pratique jeune. C’est une déviance d’importation, une addiction qui a le parfum troublant de la transgression, bref un côté gauchiste qui rappelle aux plus vieux l’esprit frondeur de leur jeunesse, aux plus jeunes les réflexes idéologiques à quoi se résume leur pensée. Avec une sympathie mal dissimulée, et après avoir confessé avec plaisir les « fumettes » d’une adolescence bourgeoise, dorée, et néanmoins révolutionnaire, pour le « fun », plus bêtes que jamais, comme le dit Jacques Brel des bourgeois en général, les élus de gauche vont « accompagner », comme les dames patronnesses de jadis pour les pauvres, les toxicomanes d’aujourd’hui dans des salles de shoot, où ils pourront poursuivre en toute sécurité et aux frais du contribuable leur descente en enfer. Comment espérer lutter efficacement contre les drogues, éradiquer les réseaux qui minent les quartiers et empoisonnent une partie de nos jeunes avec un discours aussi ambigu ? Comment mettre un coup d’arrêt à la consommation, sans être impitoyable avec les trafiquants, ceux qui apportent le hashish d’Afrique du Nord ou la cocaïne d’Amérique latine ? Le 23 Avril, deux tonnes de cocaïne étaient saisies au large de l’écosse. Huit jours auparavant, la douane française saisissait 2,5 tonnes près de la Martinique. Il faut saluer les succès de ce combat contre le trafic. La différence entre les prétendues drogues douces qui touchent une partie importante de la population, et les drogues dures qui, en raison de leur coût, seraient réservées à des cercles plus restreints, et particulièrement branchés, est une illusion. La porosité s’installe entre les unes et les autres. En raison des dégâts provoqués, du coût pour la santé publique, des liens entre la drogue et la délinquance, et de la nocivité mondiale des réseaux de trafiquants, cette lutte doit être considérée comme une guerre. C’est la raison pour laquelle lorsqu’un Etat croit devoir employer des moyens qui relèvent de la guerre, il faut respecter sa volonté tout en exigeant de lui qu’il la mette en oeuvre avec justice et équité.
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