Avec le temps, le bilan de George W. Bush, élu à la Maison Blanche de 2000 à 2008, ressort peu reluisant. Suite aux attentats du 11 septembre, l’homme s’est posé en chef de guerre. Il a engagé l’armée américaine sur deux théâtres d’opération et déstabilisé durablement le monde. Sur le front intérieur, il a promis la sécurité aux Américains en enchaînant des dispositions et lois sécuritaires avec notamment le Patriot Act et Guantanamo.
La victoire des islamistes d’Al-Quaïda à l’issue du 11 septembre fut ainsi triple. La démocratie et les libertés individuelles se sont affaiblies aux Etats-Unis. L’armée américaine a échoué à la fois en Irak et en Afghanistan forçant le successeur de Bush au retrait des troupes. De nouveaux islamistes, préludes à la formation de l’Etat islamique, ont émergé dans le chaos irakien.
Cette rapide remémoration est aujourd’hui troublante pour qui veut bien dépasser la dictature émotive de ces derniers jours. Car en écoutant les déclarations de François Hollande depuis le 13 novembre, le sentiment de retrouver Bush à l’Elysée se fait de plus en plus prégnant.
Premier acte, Hollande s’est posé en chef de guerre en pointant un adversaire : Daesh. Cette stratégie, avec laquelle Bush a su pleinement jouer, vise à rassembler la nation face à un ennemi commun. Elle est simple, efficace mais fait commettre à Hollande sa première erreur puisqu’une majorité des terroristes sont des Français, d’origine extra-européenne et de confession musulmane.
Ainsi, si guerre il y a, elle est d’abord à mener contre une petite partie de nous-mêmes. L’ennemi est intérieur et, n’ayons pas peur des mots, cette situation débouchera sur de fortes tensions internes si le pays tarde à réagir. A force de nier des réalités comme la multiplication des discours radicaux chez certains Musulmans, le refus des minutes de silence dans certaines écoles, la « hallalisation » de certains quartiers ou les viviers d’islamistes dans les prisons, la France prend le risque de s’engager dans une spirale funeste. Des mesures comme la déchéance de nationalité pour les binationaux condamnés, la fermeture des mosquées salafistes, la dissolution de l’UOIF liée aux Frères Musulmans ou l’éradication des revendications communautaires constitueraient des premières réponses à ce danger.
En se posant en chef de guerre face à l’Etat islamique, Hollande a rajouté du ridicule à son erreur puisqu’à la différence de Bush, il n’a pas les moyens de ses ambitions. A force d’avoir rogné les crédits militaires et construit une société anesthésiée à toute souffrance, la France n’est plus en mesure de soutenir un conflit d’une telle ampleur et aux conséquences difficilement prévisibles. Le décompte quotidien par le ministère de la Défense du nombre de bombes larguées en Syrie démontre la misère matérielle de l’armée française. Hollande n’ignore pas cette situation, lui qui s’est résolu à quémander l’aide de Poutine après l’avoir tant combattu ! En outre, dans cette guerre, Hollande compte également sur son allié américain, celui-là même dont le jeu dans la création de l’Etat islamique reste très trouble.
Si la France n’a plus les moyens de combattre à l’extérieur et qu’il lui faudra du temps pour restaurer un outil militaire puissant ainsi que pour redessiner une politique étrangère cohérente, notamment une prise de distance vis-à-vis du wahhabisme saoudien ou de l’islamisme turc tant soutenus par Washington, elle aurait pu en revanche prendre une mesure simple et aux résultats rapides : l’arrêt définitif de l’immigration qui, outre la déstabilisation culturelle du pays, accroit la menace terroriste, en témoigne la présence d’au moins deux faux réfugiés dans les commandos du 13 novembre.
Deuxième acte, Hollande s’est paré de discours sécuritaires. Alors que toutes les lois antiterroristes ont échoué, sauf à surveiller un peu plus les honnêtes citoyens, il a fait voter l’état d’urgence pour trois mois, profitant de l’effet de panique des attentats et des 84% de Français favorables à cette mesure. Outre les traditionnelles possibilités d’interdiction de circulation, de fermeture provisoire de certains lieux publics ou d’interdiction des réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre, cette loi prévoit l’extension du régime des assignations à résidence à des personnes dont le comportement constitue une menace ainsi que la dissolution de groupes et associations extrémistes. A n‘en pas douter, ces dispositions floues feront des victimes collatérales aux problématiques terroristes… au nom de la sécurité, bien sûr !
Mais le redoutable argument sécuritaire n’a pas fini d’emporter les digues des libertés sur son passage, renforcé par l’infantilisation de citoyens déboussolés. Nombre de politiques ont ainsi pour modèle le Patriot Act américain dont le régime d’exception, initialement d’une durée de quatre ans, est toujours en vigueur depuis 2002 ! Et le scandale de la NSA outre-Atlantique ne semble pas avoir refroidi les ardeurs. A droite, la folle proposition du député Laurent Wauquiez demandant l’internement des 4 000 fichés S pour terrorisme, c’est-à-dire d’individus surveillés et non coupables, démontre qu’il existe encore des nostalgiques de Guantanamo. Comme les Etats-Unis après le 11 septembre 2001, la France brade ses libertés et l’Etat, noyauté par de nombreux lobbies, renforce son emprise. Encore une victoire pour les terroristes ? Peut être. Une défaite pour le citoyen ? Sûrement…
Habitué à avoir été pendant trois ans le roquet des Etats-Unis en alignant sans aucune réflexion ses décisions sur les désidératas américains et en acceptant nombre d’humiliations comme l’affaire des écoutes, Hollande cherche désormais à enfiler le costume de son nouveau modèle, George W. Bush, avec la bénédiction d’une majorité de Français pourtant si hostiles à l’ancien président américain. Après les tartufferies BHLo-sarkozystes en Lybie, la France ferait mieux de préférer aux lois d’exception des hommes d’exception !
> Henri Dubreuil est diplômé en économie et en finance.
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