Sub Petro et cum Petro

Les moulins à parole n’ont pas fini de fonctionner au sujet du synode sur la famille qui vient de se clôturer. Le texte est assez évasif dans certaines de ses formulations pour laisser libre court à toutes les interprétations et à l’expression de toutes les tendances, de l’extrême rigueur jusqu’à l’apostasie.

Tout le monde y va de son commentaire et trouve midi à sa porte. Chers lecteurs, ce n’est pas des conclusions du synode que votre serviteur vous entretiendra. Il y a bien assez de canonistes, de moralistes, de théologiens et de journalistes soit-disant spécialisés pour le faire, et ils ne s’en privent pas. S’il ne fallait lire qu’un seul résumé des conclusions du synode, nous vous conseillerions celui donné par Jeanne Smits, la seule à avoir dépassé la question des divorcés remariés pour livrer un commentaire intégral du texte, même succinct. La seule, enfin, qui ne crie ni défaite, ni victoire, et ne tire par la couverture à elle. Lisez et faites lire l’article de Jeanne Smits sur le synode.

Il y a par contre un sujet dont personne ne parlera, alors qu’il est, sans doute, le plus lourd de conséquences ; c’est la conversion des cœurs.

Pendant un an, l’Eglise universelle s’est livrée à une procédure inédite ; chaque diocèse, chaque église nationale, chaque paroisse, chaque congrégation a été consulté et a dû répondre aux questions posées par les pères synodaux à l’issue de la première session, en octobre 2014. Le peuple catholique au grand complet s’est mis en prière. Partout, on s’est rencontré, on a discuté et bataillé ferme entre soit pour savoir ce qu’il convenait de penser et d’espérer pour les familles dans l’Eglise, pour la vie chrétienne familiale.

En France, dans tous les diocèses, des équipes paroissiales volontaires se sont réunies sur ces thèmes, et les grands médias catholiques, La Croix, Famille chrétienne et l’Homme nouveau notamment, mais pas seulement, ont consacré plusieurs dossiers de fonds à ce sujet pour éclairer les fidèles.

Cet immense travail dans les consciences portera sans doute des fruits. Une chose est sûre, il a contribué à réveiller les esprits chrétiens sur les affaires familiales, à préciser ce qui était flou. Dans notre France, dans les années à venir, si on voit augmenter le nombre des équipes Notre-Dame, les groupes de foyers, les prières en couple et les engagements de familles auprès des écoles ou des mouvements de jeunesse, si les préparations au mariage s’améliorent, si les ménages tiennent plus ferme devant les ornières, nous saurons que cette année de discernement y aura contribué.

Ce qui est immédiatement observable l’est dans l’Eglise hiérarchique.

La première session du synode fut une sorte de délire nauséabond où, au cœur même de Rome, des évêques et des cardinaux vantaient en des termes mielleux les vertus propres de la vie homosexuelle, du divorce et du concubinage ; mettant au rancard les familles unies, ne traitant pas les problèmes autrement plus graves de l’adultère, des mariages forcés et de la polygamie. Dans l’Eglise universelle, des prêtres et des évêques brandissaient déjà le schisme, dans un camp ou dans l’autre. Des clercs, sincèrement blessés, étalaient leur bile, se désolant de ce que le synode semblait bazarder l’enseignement de Jean-Paul II et Paul VI sur la famille, enseignement sur lequel ils avaient bâti tout leur travail d’accompagnement des couples.

Dans les semaines qui suivirent, la presse dressa les cardinaux les uns contre les autres. On était pour le cardinal Marx et contre le cardinal Burke, contre le cardinal Kasper et pour le cardinal Müller, pour le cardinal Sarah et contre le pape lui-même ! Derrière ces luttes partisanes où l’obéissance à la chaire de Pierre s’effritait, où l’amour de Dieu disparaissait, reluisait le sourire pervers et suffisant de cette grande tête à claques de Lucifer.

Au bout d’un an de prières, si les luttes ont continué, elles ont pris une toute autre tournure. Les prélats se sont concentrés sur la foi et sur ce qui leur semblait bon pour les fidèles. Les cardinaux Burke et Sarah, érigés en chefs de partis malgré eux, n’ont pas cessé de protester de leur fidélité au pape et de leur souci de l’unité de l’Eglise. Le cardinal Marx a cessé de brandir le risque de la sédition. Le cardinal Kasper en a rabattu de sa superbe, et les prêtres dans les pays se sont fait plus humbles, plus silencieux, en somme plus respectueux du travail de ces évêques dont on oubli un peu vite que, par le lien de l’imposition des mains et la grâce de Dieu ils sont, sans aucune discontinuité, depuis l’origine et tous sans exception, les successeurs directs des apôtres, institués eux-mêmes dans l’épiscopat par le Christ.

Enfin, c’est sans doute le fait le plus notable, le pape François a prouvé, s’il en était besoin, qu’il était véritablement, complètement et dignement le successeur de saint Pierre. Pierre était abrupt et franc, il n’avait pas sa langue dans sa poche. Lent à la détente, il voulait un messie guerrier, et il ne crut pas d’abord que Jésus-Christ devait mourir. Au jardin des Oliviers, il s’endormit. Son maître pris par les gardes, il tira l’épée. Au parvis du Temple, il le renia. En mission après la Pentecôte, il lui fallut le même songe à plusieurs reprises pour admettre que le Salut s’étendait hors des limites du peuple hébreu. Ce solide galiléen fut pourtant le premier pape. Et si Jean était l’apôtre que Jésus aimait, Pierre a bâti l’Eglise avec Paul. Il s’est rattrapé de ses fautes soixante-dix fois, sept fois et il est mort crucifié pour l’amour Jésus-Christ. C’est le modèle des papes. Un homme rude capable de toutes les conversions, au service du seul vrai maître, le divin maître.

François, il y a un an, était ouvertement favorable à la mise en place d’un chemin de pénitence rendant possible l’accès à la communion des divorcés remariés. Il voulait lever sans condition toutes les interdictions contre cet état de vie. Il reconnaissait, par le biais des pères synodaux, le caractère positif propre au concubinage ou au mode de vie homosexuel, capables, visiblement, d’enrichir l’Eglise à leur manière. Tant de positions ouvertes à débat mais contraires à l’enseignement des papes précédents. La position de François était au minimum maladroite, au maximum hétérodoxe. Ce qu’il ne disait pas lui-même, le cardinal Kasper le disait pour lui en proclamant « c’est le pape qui le veut ». Et comme une validation de cette affirmation étrange, l’ouvrage conservateur du cardinal Müller était retiré des salles de presse du synode ; tandis que dans le même temps, aucun démenti des propos de Kasper ne venait du père Lombardi, responsable de la salle de presse, ou de quelque autre membre de l’administration vaticane, ni du pape lui-même, pourtant d’habitude si bavard.

Nous sommes à mille lieues de ces écarts, aujourd’hui. La prudence et la pondération furent de mise durant cette deuxième session. Le pape François n’est pas qu’un homme de gouvernement et un habile stratège. C’est avant tout un prêtre, un homme de Dieu. Nous avons trop souvent tendance à l’oublier. Or, il est évident que durant un an, lui aussi a prié, pris conseil, lu et écouté. A n’en pas douter, s’il conserve certainement de ses positions anciennes dont d’ailleurs le rapport de la deuxième session porte la marque, il a aussi certainement vécu un chemin de conversion intime, sur ce sujet, dont la chrétienté devrait s’inspirer, à commencer par les évêques belges, dont les commentaires post-synodaux sont pour le moins navrants de sottise.

Au-delà du texte synodal, dont la valeur n’est pas contraignante et qui sera suivi de décrets pontificaux, l’essentiel à retenir, dans l’immédiat, pour nous, simples fidèles, c’est l’expérience de cette année de prières et d’enseignements, où le pape a montré l’exemple de la capacité d’évolution, sous la houlette du Saint-Esprit.

Nous ne sommes certainement pas au bout de nos peines. Désormais, des laïcs empressés, des prêtres et des évêques vont tenter d’utiliser les textes du synode à des fins de dévoiement de la foi. Nous souffrirons sans doute, car ces mêmes personnages nous dirons, la bouche en cœur et l’âme froide : « Mais c’est la volonté du synode ! » ou encore : « Mais c’est le pape lui-même qui le veut! »

Mais justement, l’expérience de cette année et son souvenir nous soutiendrons, pour peu que nous gardions l’esprit tournés vers Dieu.

> Gabriel Privat anime un blog.

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40 Comments

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  • 0 / 10
  • Charles , 27 octobre 2015 @ 10 h 56 min

    Le plus faux culs des faux papes: Au cours de son retour du Brésil,
    il avait improvisé une conférence “informelle ” avec les journalistes.

    Ceci pour aborder des questions de fond de notre société….
    Ce type d’intervention “spontanée “est en soi simplement lamentable.

    bref passons au “contenu”. Voir au point 33 secondes.
    Son argument repose sur un constat fallacieux:
    Il n’ aurait jamais vu une personne présentant une carte d’identité
    avec l’appartenance “gay” inscrite dessus.

    Il indique que “il n’existe pas de syndicats gay” comme forme
    d’influence (visible ou invisible)ou forme d’exigence/lobbying.

    Certes, il n’existe pas de syndicats ou de partis sodosexuels.
    la belle affaire. Ils n’ont pas besoin de ce genre de “machin”.

    En effet, nous savons bien que les sodosexuels constituent entre eux
    la plus forte organisation d’influence au sein du Vatican comme ailleurs.
    Faire semblant d’ignorer cette réalité, c’est se moquer du monde.
    Comme le dit justement Stéphane Berne;
    ” Sans se connaitre, On se reconnait entre nous à 50 m, même de dos”

    Ce personnage est tellement pitoyable qu’il ne peut pas avoir été élu de manière valide.

    https://www.youtube.com/watch?v=ZDCPEjnKuco

  • Marie Genko , 27 octobre 2015 @ 10 h 57 min

    @Gabriel Briat,

    Merci pour votre intéressant article.
    Si j’ai bien compris, l’Eglise catholique, sous la houlette du Pape François, avance avec prudence vers une vision plus orthodoxe des règles évangéliques!

    Nous devons nous en réjouir et espérer que ce rapprochement permettra d’accélérer une union entre nos deux entités ecclésiales!

    L’Union des chrétiens et leur témoignage commun est plus que jamais nécessaire dans le monde qui nous entoure aujourd’hui.

    Ce qui m’afflige est de voir combien la déchristianisation de la France a marqué les esprits! Nombreux sont ceux qui s’expriment ici avec un irrespect ahurissant en parlant de leurs prélats et même du chef de leur Eglise…

  • eric-p , 27 octobre 2015 @ 11 h 40 min

    Si je suis cru dans les termes, c’est pour de bonnes raisons.
    Je ne suis pas là pour faire des cadeaux à Gabriel privat que j’aime bien malgré tout.J’applique simplement le dicton:
    “Qui aime bien châtie bien !”
    Les “recettes” proposées par l’église pour soi-disant consolider le mariage n’en sont.
    Celà me rappelle les “recettes” de l’éducation nationale pour “lutter” contre l’illetrisme: On propose de distribuer des…tablettes !!!
    L’arme fatale…

  • eric-p , 27 octobre 2015 @ 11 h 48 min

    +1 !
    Le problème dure depuis au moins 1958 et l’élection d’un probable
    maçon au titre de souverain pontife.
    Malheureusement, les catholiques préfèrent vivre dans le déni.
    La situation dans laquelle vit la société chrétienne est terrible:
    Elle refuse la réalité…

  • eric-p , 27 octobre 2015 @ 12 h 00 min

    Le problème, c’est qu’il a été élu pape alors qu’il est membre honoraire du Rotary club (la presse a été très discrète là dessus, préférant insister sur sa carte d’adhérent à un
    …club de football !).
    Comme vous le savez, l’église catholique interdisait l’appartenance au Rotary Club à ses fidèles avant de lever
    celle-ci pour des raisons mystérieuses (L’église ne s’est jamais justifiée là dessus).
    On soupçonne également ce pape d’appartenir à la FM mais
    on manque de preuves…
    Ce qui est certain, c’est que l’élection de Bergoglio a été
    APPROUVÉE par le Grand Orient d’Italie, ce qui pose question…

  • eric-p , 27 octobre 2015 @ 12 h 06 min

    Bien sûr, les dés étaient pipés dès le départ et certains membres “conservateurs”
    ne se sont d’ailleurs pas privés pour le faire savoir…

  • eric-p , 27 octobre 2015 @ 12 h 18 min

    Si l’église protestante apporte de bonnes idées, pourquoi l’église catholique ne devrait-elle pas s’en inspirer ?
    Non , ce qui me tue avec ce synode, c’est qu’on réunisse des tas de gens très compétents qui connaissent PARFAITEMENT les problématiques liées à la famille…et qui n’arrivent pas à se mettre d’accord pour prendre des mesures simples et de bon sens…
    parce qu’elles seront impopulaires (c’est la même chose en politique):

    La montagne a une fois de plus accouché d’une souris…

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