La mise en scène de la célébration de l’héroïsme par les politiciens, qu’il s’agisse d’Obama ou de Hollande, présente pour eux une double opportunité. Tant qu’on parle des héros, on oublie d’abord les défaillances voire les responsabilités des dirigeants politiques dans ce qui s’est passé dans le Thalys qui reliait Amsterdam à Paris. Ensuite, la remise d’une médaille permet toujours à celui qui la remet de bénéficier de la publicité de la cérémonie, voire du reflet d’honneur de celui qui reçoit sur celui qui donne. Avec un rare culot, ceux dont l’incurie génère la dérive terroriste actuelle vont donc, une fois encore, comme en Janvier, essayer de récupérer à leur profit le drame qu’ils n’ont en aucun cas évité. Le premier s’était déroulé jusqu’à son terme. Le dernier n’a pas entraîné de mort par un concours de circonstances où se mêlent la chance, la providence et le courage. Ni les Etats, ni leur Sécurité, ni leurs services publics n’y ont la moindre part.
La chance, c’est sans doute une arme qui s’enraye parce que son utilisateur n’est pas un professionnel. La providence, ce sont trois Américains, dont deux militaires ainsi qu’un Britannique présents dans la voiture 12. Le courage leur appartient. Il n’a rien d’instinctif, pour employer le terme utilisé par la responsable de Thalys pour justifier le comportement de ses agents. Le premier à s’élancer est Spencer Stone qui revient d’Afghanistan et a été formé pour réagir à une agression. Il traversera le wagon sur une dizaine de mètres en s’exposant. Il sera blessé à l’arme blanche. Chris Norman, un Anglais vivant en France, qui est le quatrième à maîtriser le terroriste, fait preuve d’une maîtrise de soi et d’une modestie qui doivent être soulignées. Sa réaction n’est pas un réflexe, mais la conséquence d’une réflexion ultra-rapide : plutôt qu’accepter une mort passive, mieux vaut risquer sa vie pour la sauver. Cet esprit de résistance, sans espoir cette fois-là, est ce qui avait, sans doute, préservé la Maison Blanche le 11 Septembre. Deux Français, l’un au début, l’autre à la fin sont apparemment intervenus, mais on n’en parle guère.
En revanche, une fois encore, notre appareil d’Etat n’a rien empêché. Pour s’en tenir à l’année 2015, les frères Kouachi et Amedy Coulibaly, puis Moussa Coulibaly, à Nice, Sid Ahmed Ghlam à Villejuif, Yassin Sahli en Isère, et aujourd’hui, Ayoub El Khazzani étaient tous connus des services de police, avaient fait l’objet de fiches de sécurité et étaient liés à la mouvance salafiste.. On savait de plusieurs d’entre-eux qu’ils avaient commencé par la délinquance, parfois la prison, qu’ils avaient beaucoup voyagé malgré leur absence de ressources claires. Mais cette « connaissance » n’a servi à rien et prouve seulement l’impuissance des services de sécurité qui n’ont effectivement pas les moyens de surveiller tous les suspects, tout le temps. Avis aux amateurs : le risque avant d’agir est faible. Il n’est grand que pour les futures victimes. La polémique qui oppose Jean-Hugues Anglade à la SNCF invite à la prudence. On observera que l’acteur est surtout mécontent de n’avoir pas bénéficié de l’accueil des contrôleurs dans leur local verrouillé et que les explications fournies par la SNCF sont confuses voire contradictoires. Les agents auraient respecté la procédure, tiré avec bravoure la sonnette d’alarme et auraient permis à des voyageurs de se réfugier dans leur compartiment. Pourquoi ces voyageurs plutôt que d’autres ? L’un des contrôleurs aurait cru à une altercation, fréquente, paraît-il, surtout dans l’ambiance feutrée des 1ères… Une diatribe, une Kalachnikov à la main, quoi de plus normal ? Mais, tout compte fait, le personnel visé par le comédien était celui de la restauration et non celui de la SNCF. On respire. On n’a jamais vu les « cheminots » disparaître lorsqu’il s’agit de faire face au mécontentement des clients qui subissent sans être informés un retard de plusieurs heures… D’ailleurs, le PDG qui est à l’aise dans le microcosme médiatique saura rétablir l’image de la maison…
Après la remise de décoration, on continuera donc à faire monter en masse les passagers des TGV mis à quai tardivement ; on verra avec satisfaction policiers et militaires de Vigipirate nous offrir une sécurité illusoire ; on aura toujours la chance de vivre dans un pays où le port d’armes est sévèrement réglementé, ce qui évite aux Français, le risque effrayant de blesser un agresseur qui se sera, lui, procuré très facilement un véritable arsenal ; on laissera pénétrer sur notre territoire des milliers de « réfugiés »qui statistiquement représentent un risque potentiel ; on fera semblant de faire la guerre à l’Etat islamique dont les métastases de plus en plus proches sont autant de bases pour le terrorisme… Il est temps de rompre avec les faux-semblants. Il est urgent de réarmer les Français, au moins moralement. C’est le message qu’à mon sens nous envoient nos quatre « héros » anglo-saxons.
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