C’est un Cameron victorieux qui a été reconduit le 8 mai dernier au poste de Premier ministre du Royaume-Uni. Et pour cause, avec 331 sièges à la Chambre des Communes (soit 24 de plus que lors de la précédente législature), les Tories ont décroché la majorité absolue et peuvent gouverner sans allié. Un éclatant succès qui repose sur un enseignement central : l’économie, toujours l’économie !
Si Cameron a largement triomphé et que les sondages se sont magistralement plantés, c’est qu’il pouvait s’appuyer sur un bon bilan économique, fruit notamment de réformes courageuses et libérales ! En 2013, je soulignais déjà que le Royaume-Uni avait pris le bon chemin en réduisant drastiquement le poids de l’état. Son niveau de dépenses publiques est ainsi passé de 50% du PIB en 2009 à 44% fin 2014. Et le résultat est sans appel : le pays a enregistré en 2014 une croissance de 2,6% contre 0,4% en France et 2,4% aux Etats-Unis. Son taux de chômage qui dépassait 8% en 2011 est retombé à 5,6% fin 2014.
Evidemment, en France, patrie de l’étatisme maladif, politiques et experts se sont relayés pour dénigrer le bilan de Cameron, accusé d’avoir généré de la pauvreté à la chaîne.
Certains ont expliqué que les créations d’emplois étaient des contrats précaires. Faux ! Début 2010, le nombre d’employés à taux plein tournait autour de 20,8 millions au Royaume-Uni. Depuis cette date, le pays a créé 2 millions d’emplois et le nombre d’emplois à taux plein a grimpé à près de 22,2 millions. Trois quart des emplois créés sont donc des emplois à taux plein.
Dans la même veine, d’autres ont dénoncé le flot de contrats « 0 heure ». Encore faux ! Ces contrats ne représentent aujourd’hui que 2,3% de la population active.
Une autre critique s’est concentrée sur l’idée que la croissance serait tirée par une bulle immobilière et que le pays poursuivait sa désindustrialisation. Toujours faux ! Si les prix de l’immobilier se sont certes remis à monter, le poids de l’emploi manufacturier dans le total des emplois représente 8%, stable depuis 2010. Dans la valeur ajoutée, le poids de l’industrie reste également stable à 20,2% en 2013. Ce taux est de 19,8% en France.
Enfin, il a été répété que le taux de pauvreté serait beaucoup plus élevé au Royaume-Uni comparé à la France. Décidemment c’est encore faux ! Les derniers chiffres connus concernent l’année 2012 et le taux de pauvreté anglais (16,2%) n’est supérieur que de 2 points au taux français pour un niveau de dépense publique 12 points inférieur à la France !
Au-delà de cette cure d’amaigrissement imposée à l’état, Cameron a misé sur les entreprises et les libertés économiques. En plus de réduire massivement l’impôt sur les sociétés, il s’est employé dès 2010 à garantir une vraie stabilité de l’environnement réglementaire en direction des PME britanniques permettant aux patrons de faire des projets de long terme.
La seule vraie ombre au tableau se situe en réalité sur la question budgétaire. Malgré les efforts monumentaux du pays, son déficit atteignait encore 5,7% du PIB en 2014. Si le redressement est notable, comparé au déficit de 10% laissé par Gordon Brown en 2010, il ne permet pas d’enrayer la progression de la dette publique qui atteint désormais 90%. Mais là se situait son argument de campagne : Cameron souhaitait terminer le job !
En France, et surtout dans les milieux de droite, il est coutume de dire qu’une élection se gagne sur les questions sécuritaires ou sociétales. Cette élection confirme qu’il n’en est rien. Dans nos sociétés matérialistes occidentales, une élection se gagne d’abord sur l’économie ! L’électeur regarde l’état de son portefeuille avant toute autre considération. Et, n’en déplaise à certains, il faut être catholique pratiquant (vs. homo militant) ou patriote assumé (vs. mondialiste convaincu) pour placer le mariage gay ou les questions identitaires au cœur de son vote… soit une fraction, certes bruyante, mais minoritaire de l’électorat.
Obama aux Etats-Unis, Merkel en Allemagne et maintenant Cameron au Royaume-Uni ont été réélus car ils avaient un bilan économique flatteur ou une économie en redressement (dans le cas américain). Sarkozy fut battu car il avait été incapable d’incarner une alternance au socialisme ambiant qui pourri la France depuis plus de 40 ans. Zapatero en Espagne ou même Berlusconi en Italie ont été remercié pour leur absence de résultats économiques. Mais la réélection de Cameron est encore plus frappante car son bilan en matière d’immigration était désastreux, loin de ses promesses qui visaient à réduire les flux de migrants, et son étiquette de conservateur ne l’a pas empêché de faire voter le mariage gay. Les Anglais l’ont bien plébiscité… pour l’économie, ni plus, ni moins !
En France aussi, 2017 se jouera sur l’économie. Et ceux qui ont enterré le PS se trompent lourdement. Faut-il leur rappeler qu’à la mi-2012, les Travaillistes avaient plus de 10 points d’avance sur les Conservateurs dans les sondages ? Que la croissance revienne, portée par la dépréciation de l’euro, la baisse du prix du pétrole et les taux bas, mais surtout qu’elle génère des emplois (ce qu’elle fait à partir de 1,5% en rythme annuel), et Hollande le veinard retrouvera toutes ses chances pour 2017. Que Le Pen s’enferre dans ses promesses économiques absurdes et elle plafonnera au mieux à 25% sans disposer d’aucune chance de gagner au second tour. Que les républicains se complaisent dans leur socialisme allégé et ils ne seront qu’un vote par défaut pour nombre d’électeurs en devenant tributaires du rejet ou non d’Hollande.
Pour gagner une élection, il n’y a pas de recette miracle. Pour la majorité au pouvoir, il faut un solide bilan économique. La nullité des socialistes les contraint désormais à prier Sainte Rita pour espérer que les vents de la croissance atteignent la France. Pour l’opposition, il faut un projet économique viable, c’est-à-dire fondé sur la réduction massive de la dépense publique et la libre entreprise, ce qu’aucune force politique ne propose aujourd’hui. Pour gagner une élection, il faut surtout modifier son logiciel de pensée et admettre que l’économie reste le premier moteur du vote pour une majorité de citoyens…
> Henri Dubreuil est diplômé en économie et en finance.
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