Au nom des trois évêques de la région, syrien catholique, syrien orthodoxe et assyrien oriental, ainsi qu’au nom des différentes composantes ethniques : syriaques, arabes, kurdes, yazides, arméniens et autres, je lance cet urgentissime appel à :
S.S. le Pape Benoît XVI, à tous les chefs d’État, surtout à ceux qui ont une influence dans ce qui se passe dans la région et surtout en Syrie, au secrétaire général de l’ONU et à toutes les personnes de bonne volonté, de vouloir fermement intervenir pour que notre région, la préfecture de Hassaké au Nord-Est de la Syrie, demeure encore et reste un havre de sécurité et de paix, elle est, à ce moment la seul en partie épargnée en Syrie.
Cette région de la Jézireh, dont les deux plus grandes villes sont Kamichli et Hassaké, abritent plus de quatre cents mille réfugiés venus de toutes les régions du pays: Alep, Idlib, Homs, Der-Ez-Zor… etc ainsi que les anciens réfugiés irakiens généralement oubliés.
Ce que nous voulons, et avec insistance, c’est que tous ceux à qui nous lançons cet appel urgent fassent pression sur les différents groupes armés et l’Armée libre pour qu’elles n’entrent pas dans notre région afin qu’elle demeure toujours ce qu’elle est : le seul havre de paix et de sécurité en Syrie. Nous insistons sur la sortie des groupes armées qui occupent Ras El-Aïn, ville-frontière et aujourd’hui ville fantôme, afin que les trente mille réfugiés qui l’ont quittée, rentrent chez eux.
Dans le cas où les différents groupes armés attaquent nos villes et s’y installent, nous verrons les quatre cents mille réfugiés sur les routes de l’exil une deuxième fois et plus de huit cents mille nouveaux réfugiés prendre les routes de l’exil, vers l’inconnu, mais surement, dans une débâcle total, vers la faim, le froid et les massacres. Suite à une entrée préalable, ce qui attend les villes et leurs populations c’est, à part les dangers de mort, la destruction totale des quartiers et des villes car l’armée syrienne, dans sa logique, bombardera partout, c’est alors la désolation de la désolation.
Ce qui nous attend, paraît-il, ce sont des camps lugubres qu’on prépare déjà en Turquie, triste sort pour une population qui n’aspire qu’à vivre chez elle en sûreté.
À tous nous crions d’intervenir, car, nous avons déjà notre lot d’angoisse, de peines et les souffrances du manque de tout genre, que nous supportons et que supportent les réfugiés eux-mêmes.
À tous nous crions :
Épargnez notre région, nos villes et nos villages qui vivent malgré tout, dans la sécurité des personnes et des biens.
Épargnez-nous les massacres, les destructions et toutes les affres de la guerre.
Au concert des nations nous crions nos craintes, et nous disons de ne pas vous taire et laisser faire comme jadis en Afrique et aux Balkans, en la présence, dite pacifique, des force des Nations-Unies.
Épargnez-nous de toute intervention militaire ; nous gérons nous-mêmes notre situation. Nos comités civils, hors de toute machination politique, ont en main la situation dans la région. La bonne entente de toutes les composantes de notre société, réalisent la sécurité et la paix. Nous nous occupons aussi à remédier aux manques de tout genre, dans la mesure du possible.
Notre travail est neutre et nous ne voulons pas être la chaire aux canons des belligérantes.
De grâce épargnez-nous ce supplice. Nous attendons seulement, et seulement des aides humanitaires, et rien d’autre.
À vous tous nous crions : Ayez la volonté, ayez le courage de laisser de côté les stratégies politiques et les intérêts et les raisons d’État, pour sauver plus de deux millions d’hommes et de femmes des affres de la guerre.
À vous d’agir, à nous d’attendre, avec angoisse, certes, mais avec beaucoup d’espoir.
Une dernière fois je lance : SOS, vous ne pourrez pas dire demain avec l’hypocrisie bien diplomatique : nous n’en savions rien.
Hassaké le 22/11/2012
Behnan Hindo, Archevêque syrien catholique de Hassaké-Nisibe
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