par Alexandre Latsa
Un coup d’Etat
Oui un coup d’état dans le sens que pour la première fois sans doute dans l’histoire de la France, le déroulé d’une élection a pu suivre un scénario prévu et exécutée avec le soutien actif du désormais premier des pouvoirs : le pouvoir médiatique. Un pouvoir médiatique ayant permis que ne soit respecté un agenda planifié en amont par ceux la mêmes pour qui l’élection d’Emmanuel macron était, et de loin, la meilleure solution pour « leurs » intérêts. La plateforme En Marche est juste le nouvel emballage d’un produit destiné à maintenir l’hyper structure actuelle (ses élites et ses réseaux) mais avec un peu de maquillage, en l’espèce quelques nouveaux visages, mais surtout l’affirmation martelée que En Marche serait le médicament nécessaire a l’organisme France.
Le peuple francais qui était sur le point de manifester sa colère, son insatisfaction, ses inquiétudes et son rejet profond et viscéral du système sociétaliste s’est fait voler son destin par une incroyable manipulation des esprits et des cœurs.
L’élection d’Emmanuel Macron s’est faite sans programme, sans idée, sans projet mais par des phrases vides et des slogans, présentés comme des paroles quasi-divines par le premier pouvoir. Son élection a été rendue possible par une incroyable campagne marketing ayant vendu l’image du candidat et notamment « sa jeunesse, son énergie, sa volonté de rendre les choses différentes » (SIC) pour citer Ruth Elkrieff.
Jamais dans l’histoire de France une campagne n’avait pourtant vu de candidats avec des projets authentiques et radicalement différents (Fillon, Mélenchon, Le Pen, Asselineau …) mais c’est le candidat du vide qui l’a emporté. La machine médiatique a noyé toute réflexion authentique et toute velléité de débat dans un bruit de fond confus mais en assénant une image : celle d’Emmanuel Macron, censé porter un projet nouveau comme un sorcier congolais devant des disciples en transe. Emmanuel Macron n’avait-il pas lui-même du reste parlé de magie en politique ?
Hagards, sonnés par cette hyper matraquage médiatique les électeurs francais se sont fait voler leur élection en se faisant indirectement priver de tout droit à une quelconque réflexion indépendante. La victoire d’Emmanuel Macron et de la plateforme EM est la victoire des artisans de la société liquide dont Emmanuel Macron est l’artefact le plus abouti. François Fillon, lors d’un de ses meetings à Besançon, affirmait lui-même discerner «dans le projet d’Emmanuel Macron le souhait d’une société d’individus et non plus de citoyens, une société plastique, une société liquide.» Une société liquide, médiatique et financière dont l’extase provoquée par ce 7 mai 2017 est inversement proportionnelle avec le vide abyssal des Champs Elysées qui accompagna la prise de fonction du nouveau président.
L’incroyable scénario médiatico-totalitaire visant à présenter le socialiste libéral et pro-européen Emmanuel Macron comme le candidat dont le destin était de gagner s’est accompagné d’une opération de guerre médiatique totale à l’encontre du candidat François Fillon dans le but d’effriter au maximum sa base électorale en noyant ce dernier sous l’acte d’accusation de « corruption ».
L’objectif était double :
– Permettre à Marine Le Pen d’arriver au second tour et ainsi assurer une victoire qui plus est « morale » d’Emmanuel Macron en lui permettant d’achever la libéralisation de la gauche, dynamique entamée en 1983.
– Affaiblir au maximum le parti LR en vue des Législatives de juin 2017 et sans doute sur la plus longue durée historique en vue des élections présidentielles de 2022 afin d’empêcher l’émergence d’une quelconque dynamique conservatrice, seul danger politique réel pour la vague sociétaliste et pro-européenne. Une vague conservatrice que François Fillon représentait, peut être meme malgré lui.
Objectif premier : achever la gauche francaise
L’effritement et la cannibalisation de la droite francaise pour la contraindre à se centriser est un objectif stratégique et politique limpide, pendant historique du processus qui a frappé la gauche francaise depuis 1971. Un processus ayant vu la destruction du parti communiste (jugé trop proche de Moscou) par une nouvelle gauche socialiste (SFIO) devenue peu à peu proto-libérale (PS) puis dès 1983 la mort de cette gauche « socialiste » (7% à la présidentielle de 2017) par sa lente libéralisation et sa mue vers une troisième gauche, toujours plus diversitaire (« il n’y a pas de culture francaise ») toujours plus sociétale et surtout toujours plus atlantiste et libérale.
Cette troisième gauche que l’on peut qualifier de libéro-sociétaliste, euro-fédéraliste dont l’émergence fortement appuyée médiatiquement a entrainé l’avènement et la prise de pouvoir d’Emmanuel Macron, Young Leader de la fondation franco-américaine, banquier d’affaires ayant réussi à constituer un gouvernement de socialistes et centristes libéraux et l’émergence d’un ersatz de société civile sans queue ni tête visant à donner l’illusion d’une promotion des minorités. C’est le long mais inévitable avènement de cette gauche diversitaire qui nait en France sur le modèle américain et avec du reste l’aide active des réseaux américains comme on peut s’en rendre compte ici, là ou là.
Un processus qui n’est pas un hasard de l’histoire mais bel une évolution politique et historique accompagnant sur la période récente la reconversion de l’extrême gauche francaise, antisoviétique, à l’économie de marché et la construction européenne mais surtout sous drapeau atlantiste, sorte de réalisation d’une fusion plus qu’inattendue que certains qualifient de nouveau courant de pensée maoccidentaliste.
Objectif second : tuer toute dynamique conservatrice / néo-gaulliste.
Le Chiraquisme a vu la « droite » tomber dans un piège stratégique qui allait neutraliser de facto toute possibilité de résurgence souverainiste et conservatrice.
Sous pression de la pensée dominante et du politiquement correct, la droite allait moralement se voir interdire d’aborder les thématiques d’identité, de souveraineté, de patriotisme et de civilisation en se faisant systématiquement accusé de faire le jeu du Front national. En cédant cette rhétorique, la droite allait de retrouver contrainte de laisser prospérer un Front National à sa droite, Front national qui allait prospérer sur ces thématiques pour capter les électeurs de cette France dite périphérique, menacés par l’immigration et mondialisation économique.
Prise en étau et acculée, les brillants stratèges de l’UMP puis des LR allaient terminer de faire perdre à leur famille de pensée la légitimité même morale à occuper le terrain sécuritaire, identitaire, et se retrouver contrainte de se lancer dans une course au centre, une course avec la gauche.
Ce concept d’union de la droite et du centre aurait peut-être pu fonctionner si dans la même séquence historique, le centre n’allait pas lui glisser inexorablement vers la gauche que l’on pense au soutien de François Bayrou à Ségolène Royal en 2007 puis à François Hollande en 2012.
L’élection présidentielle de 2017 sera la consécration de l’echec de cette stratégie puisque le centre et même la gauche de la droite (les LR constructivistes) se trouveront en parfaite harmonie morale et politique avec la nouvelle gauche au sein de la plateforme En Marche. Une nouvelle harmonie pour une nouvelle alliance politique et un nouveau front républicain mais sans les courants de droite francaise incarnée par le courant réaliste des LR, et sans la mouvance souverainiste de droite, soit les électorats conservateurs de Fillon, sécurito/identitaires de Le Pen et souverainistes de Dupont-Aignant.
L’objectif est limpide comme de l’eau de roche : stériliser les pans fondamentaux de l’héritage Gaulliste afin d’empêcher un potentiel parti de conservateur de s’y référer, prendre le pouvoir et porter atteinte au grand agenda d’intégration européenne et euroatlantique.
L’élection de 2017 ne devait permettre qu’une pseudo-alternance destinée à leurrer les électeurs mais ne remettant en cause ni la construction Européenne, ni l’OTAN, ni le mariage pour tous, ni l’agenda de Bruxelles qu’Emmanuel Macron ne cesse de confirmer dans sa communication « Reconquérir la souveraineté par l’Europe pour bâtir ensemble une puissance européenne. Nos défis ne sont plus à l’échelle de nos Nations. ». Un processus européen piloté d’un pôle bruxellois sans souveraineté et qui ne peut nous empêcher de repenser a cette question du Général de Gaulle : « mais qui est le vrai fédérateur derrière tout ça ? ».
On comprend mieux la guerre totale menée par « le système » contre tout ce qui aurait pu faire resurgir cette sève historique nationale, conservatrice et gaullienne, capable de remettre en cause ces trajectoires et de replacer les intérêts supérieurs de la nation francaise au centre du jeu. Lire la suite !
> Alexandre Latsa anime le blog Dissonance.
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