Tribune libre
Le condamné à mort Warren Hill vient d’obtenir un sursis deux heures avant l’exécution programmée, sur décision de la Cour suprême de l’état de Géorgie, suite à un changement dans la procédure d’injection létale. Mais le problème de fond posé par cette condamnation à mort, relativement médiatisée en raison du débat sur la peine capitale, porte sur la responsabilité pénale de Warren Hill. Condamné à mort pour le meurtre d’un codétenu en 1991, ce dernier aurait un QI inférieur à la moyenne, ce qui en ferait un handicapé mental et lui épargnerait donc le châtiment suprême puisque la Cour suprême américaine interdit cette punition aux handicapés mentaux. Mais la Cour suprême a également laissé le choix aux États de fixer les conditions de l’état mental du condamné. La Géorgie a instauré des conditions plus restrictives que la moyenne des États qui requièrent que le retard mental doit être prouvé « au-delà d’un doute raisonnable ». Le débat de fond porte donc davantage sur la légalité de l’exécution d’un éventuel handicapé mental.
Sans entrer dans un nouveau débat sur la peine de mort, il convient de poser la question de la pertinence de l’utilisation du handicap mental comme circonstance atténuante, d’autant plus qu’il semble essentiellement utilisé pour des condamnés à mort noir. Il est vrai qu’il est beaucoup plus politiquement correct et commode de défendre des personnes non blanches et le fait d’utiliser systématiquement le handicap mental comme quasi-excuse du crime commis peut paraître suspect. Cette tactique est très répandue : la semaine dernière encore, Yokamon Hearn, également noir, a été exécuté au Texas pour le meurtre crapuleux d’un homme blanc. Lui aussi était soupçonné d’être un handicapé mental. Et ce ne sont là que les exemples les plus récents et connus. En revanche, que je sache, l’excuse du handicap mental ne semble jamais avoir invoqué par les adversaires de la peine de mort concernant Timothy McVeight (auteur de l’attentat à la bombe d’Oklaoma City) ou Laurence Brewer (co-auteur de l’atroce meurtre raciste d’un noir). Attention, je ne dis pas que ces deux cas devraient recevoir la même indulgence de la part des autorités – je pense même leur peine parfaitement mérité, mais que cette indulgence suscité par l’excuse du handicap mental ne devrait pas être systématiquement utilisé en faveur des noirs condamnés à mort, surtout lorsque l’on voit la légèreté avec laquelle s’en servent les opposants à la peine de mort et la complexité réelle de ce problème. En faisant du mauvais esprit, on pourrait dire que la sélection des condamnés à mort à défendre devant l’opinion publique fait l’objet d’une discrimination raciale patente. Est-ce cela ou les abolitionnistes (et aussi les grands médias bien-pensants) usent-ils seulement d’une stratégie de bons communicants ? L’avenir proche nous le dira.
1 Comment
Comments are closed.