Il y avait 6 élections législatives partielles dimanche dernier. Celles-ci seraient presque passées inaperçues si le numéro 2 de LREM n’avait pas démissionné dans la foulée et qu’un bureau exécutif du « parti » n’avait pas laissé apparaître le désarroi de ses dirigeants. La France est atteinte d’une maladie politique infiniment plus grave que le Covid-19 pour les Français. C’est la démocratie française qui est en phase terminale. Les symptômes sont nombreux. Le virus mortel est le Macron-2017, mais il a atteint un corps terriblement affaibli.
Apparemment, la routine : lors de législatives partielles, les électeurs boudent les urnes et avertissent la majorité toujours décevante. Mais l’amplitude est, elle, exceptionnelle. L’abstention est allée de 79% dans le Haut-Rhin à 87% dans le Val-de-Marne. Aucun candidat du parti majoritaire LREM ne survit à l’issue du premier tour, y compris dans la 11e circonscription des Yvelines où le siège était occupé par Nadia Hai, devenue ministre de la Ville. Le monde d’avant est de retour avec le PS, la gauche et LR en tête dans les circonscriptions traditionnellement favorables. Dans trois circonscriptions, l’écologisme est en seconde position, le RN dans une seule.
La plupart des grandes démocraties connaissent l’alternance de la droite et de la gauche. Dans certaines, l’un des camps s’impose durablement, non sans permettre des évolutions internes. Dans d’autres, avec le scrutin proportionnel surgissent au bout de longues tractations des majorités insolites et colorées. Dans tous les cas s’affrontent la ténacité de l’oligarchie politique à sauvegarder ses places et l’expression de la volonté populaire qui suivant son humeur accrédite, remplace ou renverse la table. Contrairement à l’idée reçue, la proportionnelle qui fait élire des étiquettes et non des personnes, celles-ci étant placées sur les listes de manière à ce que certaines soient systématiquement élues ou réélues, est la plus favorable à l’oligarchie, comme c’est le cas en Belgique. En revanche, la votation suisse est le seul moyen de faire entendre la voix du peuple par-dessus une caste politique consensuelle et particulièrement stable dans la Confédération.
Les Français, fatigués par des alternances improductives, et déçus par un candidat, professionnel de la politique comme beaucoup, mais visé comme aucun autre par une scandaleuse campagne de dénigrement, politique, judiciaire et médiatique, ont cru renverser la table. Ils se rendent compte avec la gueule de bois que l’ivresse du nouveau monde n’était qu’une arnaque d’une taille inconnue jusqu’alors. Ils ont élu un homme dénué d’expérience, à la compétence surfaite, mais doté d’une surestimation de soi à peine croyable, soutenu par des milieux d’affaires qui voyaient en lui le moyen de satisfaire leurs intérêts en dépit de l’opinion montante, de plus en plus hostile au mondialisme et à la construction européenne. Là-dessus, ils ont, suivant l’habitude acquise depuis l’instauration du quinquennat, élu une chambre introuvable pour permettre au jeune et beau génie de faire ce qu’il voulait. On passait d’un choix en grande partie négatif à un choix très positif. Après Hollande, plus de socialiste. Après Sarkozy et Fillon de la morale en politique. Et surtout, pas de Marine Le Pen. Moyennant quoi, le président était un socialiste devenu banquier… Alors, ce fut la foire à l’opportunisme : réunis sous une seule étiquettes, les socialistes accrochés à leur siège, les arrivistes de tous bords, et des Républicains flairant la bonne affaire formèrent une majorité dont le seul credo commun est la survie. Peu à peu, ceux qui avaient le tort de nourrir des convictions sont partis.
La légitimité populaire est le fondement de la démocratie. Le pouvoir en France n’en possède aucune : il est l’autorité légale, mais n’a aucune racine dans le pays. Malgré l’avantage qu’il tire de la muselière imposée au-delà du nécessaire par la crainte exacerbée du virus, on sent bien que, si l’opposition est réduite au silence ou à une parole mesurée, le soutien au président est des plus faibles. La gestion de la crise sanitaire a été calamiteuse de bout en bout, enfilant les maladresses les unes derrière les autres. On manquait de tests quand ils étaient nécessaires. On en fait trop aujourd’hui pour les rendre efficaces ! Le tsunami économique et social révèle l’état de notre pays, et l’impuissance du gouvernement à y remédier. La sécurité des Français est gravement altérée. La politique étrangère qui se voulait ambitieuse va de déconvenue européenne en mésaventure méditerranéenne.
Malheureusement, le bébé s’en va avec l’eau du bain. L’absence de confiance dans la politique actuelle a entraîné la disparition de toute confiance dans la politique : les taux inouïs d’abstention, la montée apparente de l’écologisme politique, cette idéologie gauchiste pleine de dogmes contradictoires et totalement inadaptée aux besoins de la France, l’incapacité du Rassemblement National à présenter une solution alternative, le manque de personnalités aptes à incarner un avenir positif pour le pays dessinent un paysage morne et décourageant alors que la vie démocratique a besoin de ferveur. Ce n’est pas la Cinquième République qui est en cause, sauf à rétablir le septennat et à accroître l’usage du référendum, mais la qualité du personnel politique, de plus en plus une profession recrutée par cooptation, sans compétence professionnelle, si ce n’est dans le domaine de la communication, et dont les niveaux de formation, de culture et d’expérience sont tragiquement insuffisants. Les Français ont souvent eu recours dans leur histoire à des hommes providentiels, avec plus ou moins de bonheur. Le militaire, attaché par essence à l’intérêt supérieur de la nation, spécialiste du commandement, et dont la connaissance des problèmes d’un Etat est particulièrement élevée représente idéalement le profil de l’homme dont la France a besoin…
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