Le Sarko-Circus est reparti en tournée. Comme tous les artistes en fin de carrière, il prolonge son spectacle après une fausse sortie. L’ancien Président a d’abord lancé sa campagne publicitaire, puis donnera ses premières représentations. Il compte reprendre la gestion du chapiteau, le remettre à neuf, changer le nom de la firme. En somme, il parie que les Français n’auront rien appris et tout oublié, sauf qu’il a été un meilleur Président que Hollande. Comme dirait ce dernier, ce n’est pas difficile, ce n’est pas dur… A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. La comparaison enthousiasme les militants demeurés à l’UMP, est évidemment défavorable au locataire actuel de l’Elysée pour la majorité des électeurs de droite, et plonge dans le désarroi ou la fureur ceux de gauche qui sont conscients du désastre présent. A l’UMP on plébiscite le retour. A droite, on l’attend, mais près de deux Français sur trois ne le souhaitent nullement. De quoi et de qui la France a-t-elle besoin ? Avant tout, de lucidité et de courage ! Depuis quarante ans, à quelques exceptions limitées près, Barre ou Balladur, le pays a été conduit par des politiciens démagogues, accrochés au pouvoir et tremblant à l’idée de dire la vérité aux Français et de conduire les réformes qui s’imposaient. On attendait Thatcher et on a eu l’immobilisme chiraquien et l’agitation stérile de Sarkozy. Jamais la France n’aurait accepté Maggie ? Soit, alors notre pays enlisé dans sa social-démocratie paralysante sous la droite comme sous la gauche aurait pu procéder aux changements nécessaires, comme cela s’est fait dans les pays scandinaves qui partagent avec nous les records des dépenses publiques, ou comme Schröder l’a imposé à l’Allemagne pour son plus grand profit. Mais ni Chirac, ni Sarkozy ne l’ont osé, le premier ayant renoncé depuis Décembre 1986, le second ayant masqué par une habile gesticulation le fait que ses annonces ne seraient pas suivies d’effets, et pourraient même précéder des effets inverses aux annonces. Que penser par exemple du rapport entre la répression proclamée de la récidive et la loi pénitentiaire de 2009, avant tout destinée à éviter la surpopulation dans les prisons ? A propos de récidive, peut-on faire confiance d’ailleurs à un récidiviste ? Je ne fais pas allusion aux affaires, mais aux promesses. Comment croire celui qui à chaque fois qu’il remonte en scène affirme qu’il a changé ? Elu nettement à droite en 2007, il a aussitôt pratiqué l’ouverture à gauche, pour revenir très à droite lors de la campagne de 2012. Cette fois, il sera au centre, parce qu’à droite, Marine Le Pen est plus solidement établie, que la gauche a déçu, et que son concurrent le plus redoutable, Alain Juppé occupera cette place qu’il est urgent de ne pas lui abandonner. Un positionnement, une posture ! Pas le moindre début d’une conviction ! Une énergie exceptionnelle sans autre but que le pouvoir ! Dix ans de communication incessante dont on découvre jour après jour l’absence de résultats ! On devait en finir avec les grèves dans les transports… On devait en finir avec l’afflux des migrants clandestins à Calais… On devait relancer l’industrie, comme il l’avait affirmé à Douai… Et c’est dans le Nord qu’il vient donner son premier « show », là où l’UMP a fait élire député européen l’apparatchik Lavrilleux, lourdement impliqué dans l’affaire Bygmalion ! Comme d’habitude, la « droite » française attend son homme providentiel. Elle n’a toujours pas compris que les institutions entraînaient un choix décisif. Ou notre pays constitue une exception dans les grandes démocraties avec un « césarisme » impénitent que souligne notre « droite » en se donnant des étiquettes fabriquées avec un nom propre suivi d’un « isme », ou elle accepte la primauté des idées et des valeurs sur les hommes. Du bonapartisme au sarkozysme en passant par le boulangisme et le pétainisme, cela n’a fonctionné qu’une fois, avec le gaullisme, pour deux raisons, d’abord le rôle déterminant du Général dans la résurrection de la France malgré le désastre de 1940, et ensuite parce que de Gaulle n’était pas un militaire, mais avant tout un politique avec des idées qui justifient qu’on puisse se dire encore gaulliste aujourd’hui. Cette exception étant unique, la France doit accepter la réalité tout en affirmant sa spécificité. Cela implique à la fois que le futur Président de la République puisse susciter l’espoir et la confiance d’une majorité de Français, c’est-à-dire qu’il ne soit pas l’homme d’un parti, expert en manipulations politiciennes, mais un homme ou une femme solide capable d’exposer au peuple un projet qu’il aura ensuite la volonté de mettre en oeuvre. En cherchant à s’emparer d’un parti pour en repeindre la façade et surtout pour éviter qu’un autre ne l’occupe, le candidat Sarkozy ne correspond en rien à ce profil. La lecture de sa « tribune » m’a effaré ! Le déni, ce demi-frère du mensonge, y occupe la place principale. Il n’est pas une victime, dit-il, mais c’est pour développer longuement la persécution qu’il prétend subir. Toutefois, il ne veut pas se plaindre, ne veut pas de revanche, ne ressent nul désir, n’écoute que son devoir, veut en finir avec les coups tordus, et en appelle aux « principes sacrés » de la République… Un peu de psychologie nous invite devant tant d’insistance à nous méfier, à inverser le discours et à découvrir alors que ça colle infiniment mieux avec le personnage. L’accueil réservé des Français prouve qu’il ne sont pas dupes. La troupe des arrivistes piaffants qui suivent déjà le joueur de flûte sans même savoir ce qu’il veut pour le pays mais en espérant toutes sortes de récompenses pour eux-mêmes devrait inquiéter les militants de droite. Comment tant d’ambitions peuvent-elles se bousculer avec tellement peu de talents que l’on soit obligé de chercher des solutions dans un passé qui n’a guère fait ses preuves ?
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