L’égalitarisme fou

L’égalité est une notion abstraite. La vie nous plonge dans le concret où l’inégalité règne sans partage. Elle se déploie entre les choses selon leurs qualités physiques, techniques ou esthétiques, leurs valeurs ou leurs performances. Elle crée des hiérarchies peu contestables entre les êtres vivants et singulièrement parmi les hommes. Dans nos sociétés démocratiques, le sport, si populaire, est le triomphe de l’inégalité, la voie royale du classement. Les concours et les examens sont des parcours d’obstacles destinés à la sélection des meilleurs. Le champion ou le génie sont des réalités humaines reconnues. Simplement, l’évolution de la pensée dominante a réduit le poids des inégalités naturelles. Elle a, au contraire, à la suite d’un Bourdieu par exemple, insisté lourdement sur la discrimination sociale. On aura tendance à dire que si la hiérarchie des résultats est inévitable, il doit y avoir égalité des chances quitte à pratiquer une discrimination positive en faveur de celui qui est désavantagé au départ. Afin de gommer l’influence des inégalités sociales jugées essentielles pour la plus ou moins grande réussite scolaire, on pourra renforcer les moyens pédagogiques dans les milieux défavorisés ou abaisser le niveau général d’exigence, ce qui sera alors préjudiciable à tous.

De manière générale, notre société est parcourue par une idéologie qui la contraint soit à l’hypocrisie, soit au malaise dès lors qu’il est question d’inégalités. Les notes existent toujours, mais on cherche à évaluer sans classer. Les notions d’inférieur et de supérieur sont devenues aussi suspectes que celle de race. La pensée démocratique a rejeté le concept d’aristocratie. L’égalité des droits, et notamment l’égalité civique, ont été instaurées et tendent à gagner du terrain : l’impôt, le sexe, l’âge, et au-delà du raisonnable, la nationalité desserrent les limites du droit de vote. Mais cette égalité juridique a été mise au pilori par la pensée marxiste. Elle ne serait que formelle, et sans égalité réelle, notamment par la diminution des différences de revenu et de richesse, elle ne serait qu’une vaste tromperie. C’est cette idéologie qui est une obsession dans les discours de notre gauche « nationale ». L’égalité des sexes ou des « sexualités », l’égalité des origines, l’égalité des étrangers avec les nationaux, celle des religions face à la laïcité, piaffent sans cesse à l’entrée des Assemblées voire des tribunaux. Pendant ce temps, la fiscalité et la redistribution, l’une des plus généreuses au monde en apparence, sont animées par la volonté de réduire les différences de niveau de vie. Le résultat est pittoresque : une performance globale du pays diminuée, des inégalités après impôt certes atténuées, mais encore considérables, si on ne tient compte que de ce qui est connu, et un certain nombre de situations privilégiées que la gauche défend néanmoins par clientélisme. Les mesures d’équité anciennes deviennent des avantages indus auxquels s’attachent, bec et ongles, des corporations : la retraite des agents de la SNCF, par exemple. Quant à la démocratie, elle est une oligarchie monopolisée par la « profession » politicienne.

Mais nos oligarques, bardés de privilèges, compensent cette tartuferie institutionnelle, par une véritable course à l’égalité rhétorique dans tous les domaines : le processus parcourt deux étapes. C’est d’abord le nivellement. Le principe en est que tout se vaut. L’adjectif « grand » devient suspect. Il n’y a pas de grande musique, par exemple. Un rappeur est aussi indiqué pour commémorer Verdun que le Requiem de Berlioz. Pourquoi accorder le monopole de la violence légitime à la police ? Il faut aussi écouter les casseurs. Le policier qui fait usage d’une arme doit prouver sa légitime défense. On en arrive à l’idée aberrante d’une sorte d’égalité des armes entre forces de l’ordre et délinquants. En second lieu, ce sera le renversement avec la discrimination positive, c’est-à-dire l’équité inversée qui va mettre en haut ce qui était en bas, préférer la minorité à la majorité. La démocratie posait le principe de la proportion. Les récompenses étaient accordées en proportion du mérite, le pouvoir en fonction du nombre de voix. La démocratie atteinte de démence idéologique va donner plus à celui qui a ou qui est moins, au dernier arrivé sur celui qui est là depuis longtemps. La majorité est priée de descendre de son piédestal : place aux damnés de la terre. L’immigré clandestin logé aux frais de l’Etat, dont les enfants sont scolarisés et soignés gratuitement bénéficiera davantage de la solidarité « nationale » que le SDF ou le retraité pauvre et isolé. On en arrive à une société, la tête en bas, qui a perdu tout bon sens.

Les images de l’attaque d’une voiture de police à deux pas de la Place de la République sont l’aboutissement de cette dérive : des individus masqués et armés ont pu se regrouper en plein centre de Paris et agresser, à l’aide d’engins divers pouvant entraîner la mort, deux policiers qui n’ont pas fait usage de leurs armes. La violence légitime serait-elle désormais passée dans le camp des jeunes casseurs en vertu de la discrimination positive ?

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9 Comments

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  • Catholique & Français , 23 mai 2016 @ 10 h 36 min

    L’un des textes les plus beaux, les plus sensés, les plus intelligents sur le mythe délirant de l'”égalitarisme” démocratique est la préface de “Mes Idées Politiques” de Charles Maurras. Impossible, lorsque l’on a lu et médité une seule fois dans sa vie cette préface sublime, de ne pas être déniaisé et vacciné à tout jamais contre la quincaillerie idéologique, les délires, les élucubrations et les discours démagogiques des politiciens contemporains sur la “lutte contre les inégalités”, la devise “…Egalité…” ou les “Hommes égaux en Droits”… Pour ceux que cela intéresse et qui ne le connaissent pas, ce document irremplaçable, écrit dans un français magnifique, peut être facilement trouvé sur Internet (attention tout de même aux versions incomplètes ou expurgées !).

  • Catholique & Français , 23 mai 2016 @ 10 h 38 min

    Pardon, j’ai oublié le titre de cette préface de Maurras : “L’inégalité protectrice”.

  • rudi , 23 mai 2016 @ 10 h 39 min

    l’égalité !!!!!!!!!!
    pourquoi ne suis jamais invité sur les chaines de tv pour donner mon point de vue, celui n’est il pas égalitaire a la castes officiel ?
    pourquoi ne suis pas invité a l’Elisée ? seuls les élus ont droit d’entrée ?
    pourquoi en tant qu’ouvrier et participant à l’ économie de mon pays , ne suis pas payé comme un élu, qui lui profite du système ?
    pourquoi dans le monde le l’entreprise, un chef donne les ordres et les autres obéissent ?
    pourquoi ” le bon peuple des sans dents ” n’a t’il pas les mêmes privilèges que les idylles ?
    pourquoi n’ai je pas le droit d’imposer “mon politiquement correcte” ? celui des socialistes est il meilleurs que le mien ?
    pourquoi le barème des impôts n’est pas le même pour tout le monde ?
    pourquoi dois je payer pour les autres, alors que les autres profitent de moi ?
    pourquoi n’ai pas droit aux même avantages a la sécu que les immigrés ?
    etc………
    le monde égalitaire n’existe pas et n’existera jamais !
    c’est une utopie pour occuper ” le bon peuple des sans dents” !
    c’est une tromperie des politiciens pour manipuler ” le bon peuple des sans dents” aux élections

  • Marcus , 23 mai 2016 @ 16 h 19 min

    Je rejoins Rudi :
    L’égalité n’existe pas, n’a jamais existé et n’existera jamais.
    Elle n’existe pas dans la nature. Chez les animaux, il y a des prédateurs et il y a des proies. Chez les plantes, il y a des petites, des grandes, des vertes, des jaunes, des carnivores, etc.
    L’égalité, c’est un concept inventé par les idéologues, uniquement pour endormir le petit peuple. Il y aura toujours des premiers, des derniers, des médecins, des avocats, des ouvriers, des techniciens, enfin bref, ainsi va le monde depuis toujours.
    Nier cela, c’est être stupide, et surtout ne pas connaitre la nature humaine. L’égalitarisme, c’est autre chose, c’est une construction virtuelle socialo-marxiste qui veut imposer l’égalité en tout et pour tout. Exemple le plus stupide connu : la parité ! On ne choisit plus une équipe sur les compétences de chacun mais sur une égalité des sexes ! C’est du délire !
    Je me permets de vous donner mon avis personnel : moi je ne suis pas pour l’égalité, je suis pour que chacun ait ce qu’il mérité, selon ce qu’il a travaillé, ce qu’il a fait, ses qualités, etc.
    Par contre je souhaite qu’il y ait l’égalité des chances pour tous au départ de leur vie, ce qui n’est pas la même chose que l’égalitarisme.
    J’aime les femmes (pour donner un autre exemple) par ce qu’elles ont des jolies formes, par ce qu’elles sont belles, par ce qu’elles sont sensuelles, etc. Je n’ai pas envie qu’elles aient toutes une tronche d’androgyne, un froc déchiré, des cheveux courts, des fringues moches parce qu’il faut ressembler aux hommes….
    Donc qu’ils arrêtent de nous emmerder avec leur égalité dans toutes leurs phrases….

  • Catholique & Français , 23 mai 2016 @ 16 h 29 min

    Petite anecdote anté-diluvienne sur l'”égalité”, parole insupportable pour des oreilles modernes, laïcistes et démocratiques : c’est, sauf erreur de ma part, un conseil du Dauphin, fils de Louis XV, parlant à ses enfants de leurs futurs “sujets” : “Vous êtes leurs supérieurs sur terre; vous serez leurs égaux dans la mort; prenez bien garde à ne point leur être inférieurs au delà !”

  • the artful , 23 mai 2016 @ 23 h 00 min

    on est loin, très loin des nains actuels et particulièrement de l’idiot du village qui réside à l’élysée…

  • delaye , 24 mai 2016 @ 10 h 00 min

    à Marcus, bravo et entièrement d’accord.

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