Le sens d’un suicide

« Il n’y a qu’un problème philosophique vraiment sérieux : c’est le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d’être vécue, c’est répondre à la question fondamentale de la philosophie » écrivait Albert Camus au début du Mythe de Sisyphe. Le suicide de Dominique Venner mardi renvoie à cette introduction célèbre. Mais son écho est multiple. Mort d’un vaincu fasciné et comme attiré par les défaites ? Drieu La Rochelle ? Nostalgique d’un ordre ancien offrant sa mort en sacrifice ritualisé à ceux dont ils espère le réveil et la renaissance ? Mishima ? Vieil homme fatigué d’une vie vidée de toute espérance ? Montherlant ? Vengeance de celui qui, déçu par l’Église (et non la religion) et par la nation auxquelles il a trop cru, va volontairement souiller un des plus hauts lieux symboliques de l’une et de l’autre ? Cet acte a un caractère exceptionnel qui le fait échapper à la sociologie mais dont il faut chercher la signification politique.

C’est la notion de sacrifice qui paraît le mieux rendre compte de la démarche. Au bout d’une vie consacrée à des combats sans issue, à la mémoire blessée d’un passé idéalisé et aux soldats perdus de toutes les causes vaincues par la marche de l’histoire, cet homme a jeté sa mort au visage d’un pays dont le devenir lui était insupportable. Il l’a fait le jour du triomphe du lobby gay, qui avait commencé par de nouvelles sottises de Bergé, contre la liberté de conscience cette fois, s’était poursuivi par l’annonce élogieuse du dernier film de Soderbergh et devait s’achever par la « fête » à la Bastille, célébrant la promulgation de la loi. Il l’a fait à Notre-Dame de Paris pour toucher l’un des lieux les plus représentatifs de l’identité française. Il y a de la vengeance dans cette mort ambivalente qui est un reproche violent adressé à tous ceux qui laissent couler la France et aussi un appel au réveil d’un pays qui ne cesse de tomber. L’évènement a mis mal à l’aise les partisans de la loi, et n’a pas atteint ceux à qui le message était sans doute destiné : ceux, « à droite » dont l’imposture et les calculs électoraux sont chaque jour plus visibles.

“L’homme du 18 Juin nous laisse un double message que le suicide de Notre-Dame doit nous rappeler en contrepoint : d’abord, dans les pires moments, ne jamais renoncer ; ensuite réunir les moyens de la victoire afin de restaurer l’ordre légitime un moment supplanté par le règne du « nul et non avenu ».”

Entre ce cri lancé aux « consciences assoupies » et l’injonction de Bergé aux consciences pour qu’elles se soumettent à la loi, le respect ne peut se partager. Il penche évidemment vers Antigone, vers le cœur rebelle à la médiocrité et au renoncement, vers celui qui pense qu’il y a une Loi supérieure à la loi. Celle de Dominique Venner, qui ne croyait pas au ciel, n’était pas divine, mais elle avait sans doute la force de la nature et de la vie, celle des peuples qui ne veulent pas mourir. C’est pourquoi il mêle assez justement l’idée de la sauvegarde de la famille traditionnelle qui est le support naturel de la vie et de sa transmission à celle de la défense de l’identité nationale et de la résistance au remplacement de la population et de sa culture par une immigration excessive. Lorsqu’on lit De Gaulle de bonne foi, on se dit que ces soucis ne lui étaient pas étrangers, que ce soit dans son allusion à Colombey-les-deux-mosquées ou à travers l’hymne à la continuité de la vie qui clôt les Mémoires de Guerre. D’ailleurs, le Général était un rebelle, comme beaucoup d’extrêmistes de droite qui l’avaient rejoint dès 1940, et qui n’étaient pas tous, d’ailleurs, des adeptes de la famille traditionnelle.

Mais là s’arrête la comparaison. Dominique Venner était un nostalgique, un admirateur des soldats magnifiquement vaincus, des Sudistes aux réprouvés Corps-Francs de la Baltiques en passant par les Russes Blancs. De Gaulle, lui, croyait en la victoire et en la nécessité d’offrir à celle-ci les moyens les plus modernes de sauvegarder l’essentiel. C’est ce que font semblant de ne pas comprendre les imposteurs qui prétendent parfois le continuer en confondant le progrès avec la décadence, en dissolvant la France dans l’Europe, en ouvrant les portes de l’immigration massive ou en participant à la destruction de la famille. Parce qu’il était chrétien, De Gaulle était un homme d’espèrance, patriote et humaniste à la fois. Parce qu’il a été contraint de mettre fin à la colonisation avec une cruauté qui n’était pas nécessaire, beaucoup de patriotes l’ont combattu et détesté, et Dominique Venner était sans doute de ceux-là. Mais, l’homme du 18 Juin nous laisse un double message que le suicide de Notre-Dame doit nous rappeler en contrepoint : d’abord, dans les pires moments, ne jamais renoncer ; ensuite réunir les moyens de la victoire afin de restaurer l’ordre légitime un moment supplanté par le règne du « nul et non avenu ». Ainsi doit-il en être de la loi absurde du mariage unisexe ou des renoncements à l’identité et à la souveraineté nationales.

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63 Comments

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  • mariedefrance , 24 mai 2013 @ 11 h 34 min

    Dommage que vous n’ayez pas lu :

    http://ab2t.blogspot.fr/2013/05/le-dernier-geste-de-dominique-venner.html

    “”””../..un prêtre parlait d’un geste anti-chrétien.
    Quelle sottise !

    Lui qui s’est suicidé pour défendre l’Europe chrétienne et ses valeurs contre la décadence et l’invasion des hordes barbares

    S’il a choisi Notre-Dame, ce n’est évidemment pas pour souiller cet édifice symbolique mais pour donner plus de solennité et de portée à son acte.”””””””””””””””

  • degabesatataouine , 24 mai 2013 @ 12 h 41 min

    Merci.Je fais de mon mieux pour réinformer mais je peux me tromper aussi bien que je vérifie avant.
    Oui ,Alphonse Juin,pied noir, fils et petit fils de gendarme.
    Beaucoup auraient voulu le voir au pouvoir dans les années 50.

  • Nonobstant , 24 mai 2013 @ 17 h 42 min

    Il est certain que du point de vue militaire, la “France libre” n’a existé que grâce à de vrais grands officiers : Juin; Leclerc, Montsabert, Koenig, De Lattre, etc. Sans nier le courage de certains maquis, seule l’Armée d’Afique a permis la reconnaissance de la France par les Anglo-Américains comme ayant contribué de façon significative à la victoire finale.
    Rendons aussi hommage aux Polonais, trahis par Churchill, et abandonnés aux mains rouges de Staline …

  • Nonobstant , 24 mai 2013 @ 17 h 53 min

    Je regrette de vous contredire. Venir dans Son Temple pour enfreindre le 1er commandement de Dieu est un vrai sacrilège.

  • Bang , 24 mai 2013 @ 19 h 19 min

    De Gaulle a trahi tous les Français qui avaient fait appel à lui pour garder l’Algérie Française.
    Il a accepté lui-même de venir au pouvoir, il a dit lui ‘Algérie Française’ et ensuite, très rapidement, il a trahi. Oui, dans l’affaire algérienne, De Gaulle est un traître et un lâche. C’est pour cela que Bastien Thierry et JJ Susini ont voulu le tuer comme il a laissé assassiner les Harkis.
    L’Histoire le verra demain comme Pétain aujourd’hui et sans doute en pire

  • mariedefrance , 24 mai 2013 @ 19 h 38 min

    alors… laissons faire l’Histoire.

    La GB avait déjà engagé sa décolonisation. Il était temps pour la France de se défaire de l’Algérie.
    (par contre, les accords d’Evian ont été mal négociés, de mon point de vue.)

    Ne me faites pas de leçons svp. Je ne suis pas moi même “pieds noirs” mais mon père a donné sa vie pour l’Algérie Française.

    Merci.

  • mariedefrance , 24 mai 2013 @ 19 h 42 min

    Pourquoi dites-vous “SON” Temple ?
    Dominique Venner était athée.

    relisez l’hommage précédent de l’abbé :

    RE :
    “”Lui qui s’est suicidé pour défendre l’Europe chrétienne et ses valeurs
    contre
    la décadence et l’invasion des hordes barbares

    S’il a choisi Notre-Dame, ce n’est évidemment pas pour souiller cet édifice symbolique mais pour donner plus de solennité et de portée à son acte.””””””””

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