Elections départementales : la double fausse surprise…

Les résultats du 1er tour des élections départementales ont un peu surpris les sondeurs et les commentateurs. Le tout est de savoir ce qui est vraiment surprenant. L’abstention a été moins forte que prévue. Deux raisons l’expliquent en grande partie. D’abord, la comparaison avec les dernières élections cantonales était faussée. Celles-ci comme d’habitude ne concernaient qu’un canton sur deux et subissaient le sort des partielles. Cette fois, le scrutin touchait pratiquement tout le territoire. Ensuite, la campagne a été nationale dans le fond et la forme et a bénéficié d’une couverture médiatique importante. La participation était de 45% en 2011. Elle est de cinq points supérieure cette année, mais elle était de 65% en 2008. Le décalage par rapport aux prévisions n’a donc rien de rassurant. Un électeur sur deux a considéré que ce scrutin ne l’intéressait pas. Le divorce entre une bonne partie du peuple et la caste politique se confirme. En revanche, la forme baroque et imaginative du scrutin après redécoupage a peut-être détaché certains électeurs fidèles au « devoir citoyen » de leur vote habituel, mais ne les a pas découragés de voter.

La seconde surprise vient de la place respective du Front National et de l’UMP, alliée à l’UDI et au Modem. Avec plus de 25% des voix, le premier annoncé arrive derrière, avec un retard de cinq à six points. C’est là encore une fausse surprise. Les élections locales reposent sur des implantations locales plus fortes pour l’UMP-UDI. La gauche fait moins mal qu’attendu pour la même raison. Le FN a un déficit considérable dans ce domaine. Sa progression de 10 points depuis 2011 est donc remarquable et il bénéficie déjà du résultat des élections municipales : on le voit du nord au sud. Par exemple, à Béziers, ses candidats arrivent largement en tête dans les trois cantons de la ville. Il est premier dans 43 départements, se maintient dans 1100 cantons et voit huit de ses candidats élus. Dans cette élection qui lui était la plus défavorable, ses résultats supérieurs à ceux des Européennes, les plus favorables en raison de leur nature de vote proportionnel défouloir, sont le fait objectivement le plus nouveau. Il reste que l’absence fréquente de personnalités connues, la mobilisation supérieure ont favorisé les partis de gouvernement qui ont croisé leurs feux sur lui. Si ces partis ont déçu tour à tour les Français qui savent à quoi s’en tenir avec les alternances, ceux-ci ne sont pas prêts à confier majoritairement le pouvoir à une formation suspecte d’extrémisme, incapable de nouer des alliances et donc perdante au second tour, avant même que l’on sache si elle est capable de gouverner.

Il reste à transformer l’essai au second tour. Pour le FN isolé, ce sera difficile, à moins que de nombreux électeurs refusent l’alliance contre nature de l’UMP et du PS. Lorsque Sarkozy dit qu’il n’y a rien en commun entre le FN et l’UMP, il oublie singulièrement le patriotisme, à moins que les dernières traces du gaullisme aient disparu de sa « famille ». Néanmoins, il sera difficile au parti de Marine Le Pen de diriger un département. Pourtant, avec cette expérience, la démocratie ne s’en porterait que mieux. L’UMP et ses alliés sont arrivés en tête. Il est probable que dans huit jours ils engrangeront le basculement d’un grand nombre d’exécutifs départementaux en leur faveur. On ne peut que déplorer les mots de « reconquête » ou d’ »alternance », comme si la vie politique française se limitait à n’être que le chassé-croisé entre deux agences électorales menant leurs affaires en faisant appel périodiquement aux électeurs. Après 10 ans d’un pouvoir improductif et décevant de la droite, et trois ans de gestion calamiteuse de la gauche, on comprend que les Français ne soient pas prêts à l’aventure, mais que l’enthousiasme les ait désertés. On souhaiterait tant que les débats qui animent leur vie politique se situent à un autre niveau que celui du cochon dans les assiettes ou du tchador à l’université. On aimerait tant que les politiciens cessent de prendre les électeurs pour des benêts ! On voudrait tant que la démocratie française donne vraiment la parole aux Français par le biais de « votations » à la suisse, plutôt que de les autoriser seulement à désigner des « professionnels » inaptes à bien faire leur « métier ».

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44 Comments

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  • Laurent , 24 mars 2015 @ 17 h 56 min

    Bonjour Stephan,
    Je cite le ministère de l’intérieur :
    —-
    Binôme d’Union des partis de Droite : Pour être nuancée BCUD, une Binôme doit obtenir l’investiture de l’UMP et de l’UDI.
    —-

    Après, on peut aussi imaginer le cas ou l’UMP ne s’est pas présenté en cas d’union modem/UDI ou autre micro partit de droite ou sympathisant de droite sans étiquette UMP.

  • Gwalchavad , 24 mars 2015 @ 18 h 05 min

    Une chose est sure quoi qu’en disent certains.
    Le FN représente le quart des votes. Et si on estime à peu près les votes UMP séparés des UDI, de 31% on passe forcément en dessous es 25%.
    J’habite dans une ville de Seine et Marne qui vote toujours très majoritairement UMP.
    Je peux vous certifier qu’il n’y a jamais eu autant de voix pour le FN que dimanche dernier. Même si l’UMP est toujours devant, la progression est vraiment phénoménale.
    Je vais enfin avoir le plaisir de m’exprimer lors d’un deuxième tour pour le parti qui me convient.
    En ce qui me concerne, je ne mettrai plus jamais un bulletin UMP dans une enveloppe, même face à la peste de gauche. Il faut arrêter de nous prendre pour des pigeons qui leur permettent de continuer à s’enrichir sur notre dos.
    Ah au fait, dans ma circonscription ne figuraient pas les logos du PS sur les bulletins de ses représentants, et ils étaient gris. SUrtout ne pas trop montrer que l’on fait parti de la bête immonde, des fois que des ignorants mettraient notre bulletin en pensant voter pour un sans étiquette

  • Laurent , 24 mars 2015 @ 18 h 18 min

    Si vous voulez suivre les étiquettes collées par le gouvernement, alors il faut additionner UMP, UDI, Modem et les binômes mixtes. Idem avec la gauche.
    Mais là, le FN se retrouve au fin fond du classement …

    Si vous voulez pas suivre les étiquettes du gouvernement, alors vous ne pouvez pas prendre cette élection comme un vote pour des partis, certains partis (surtout l’UMP donc) n’ayant pas présenté de duo UMP dans de nombreux cantons.

    Et c’est faux, nombre de candidats n’ont pas eu d’étiquette bien claire. Voir les 3 groupes nommés ”divers” (environ 7%).

    6 millions de voix, ça ne fait pas du FN un parti majoritaire. On peut tordre les chiffres dans tout les sens que l’on veut, au mieux, ça en fait le parti avec la minorité majoritaire.
    Et les élections se gagnent avec une majorité, soit via les alliances, soit via le ratissage des électeurs des autres partis éliminés.
    Ça peut ne pas vous plaire, mais c’est ainsi.

    On parlera de majorité le jour ou le FN fait 15M de voix, mais on en est très très loin.

  • Laurent , 24 mars 2015 @ 18 h 23 min

    Bonjour,

    Si je dis pas de bêtise, l’UDI a appelé à voter Sarko. Vous confondez avec le MODEM.
    Et pour le post au dessus, l’UMP est derrière à cause de ces magouilles justement. Sans, elle aurait présenté des candidats partout, dispersé les voix de la droite entre les partis, mais aurait eu en son nom propre une majorité de ces 4.2M de voix de l’UD. Donc soit on considère que les partis peuvent faire des alliances, et on prend en compte ces alliances, soit on considère que les partis ne peuvent pas faire d’alliance, et dans ce cas, on ne peut pas tirer de conclusion de ces élections.

    Tout autre posture est une arnaque.

  • Voyageur , 24 mars 2015 @ 19 h 28 min

    @ Laurent
    Autant pour moi ! Et loin de moi l’intention de manipuler qui que ce soit, les médias à la botte et le gouvernement font cela de manière professionnelle !
    Cela dit, j’ai vérifié et je me suis effectivement trompé, mea culpa ! Mais laissez-moi vous dire que vous abondez dans mon sens car si l’UMP “seul” est si basse en terme de pourcentage des suffrages exprimés cela explique “la tête” que faisait Sarko lors de son intervention dimanche soir.

  • Trahi , 24 mars 2015 @ 20 h 31 min

    L’espoir fait vivre Laurent et la vie est très belle. 15 millions et pourquoi pas aux prochaines présidentielles? Vous savez à la vitesse que vont les évènements, la réaction des Français est souvent surprenante.

  • Laurent , 24 mars 2015 @ 23 h 21 min

    Parfaitement d’accord avec la partie progression du FN.
    Par contre, pas d’accord sur votre regard sur les autres formations. Pour se faire élire, présenter des candidats en commun pour porter un projet commun est une bonne stratégie, on l’a vu.
    Et vous pensez qu’il ne faut pas grouper les partis, pourtant même à l’élection présidentielle il y a regroupement des partis (radicaux de gauche allié au PS aussi bien aux primaires que jusqu’à la fin pour avoir quelques ministres). Donc le jour de la présidentielle, c’est pas l’UMP vs FN vs UDI vs PS vs …. Ca va être UMP/UDI vs FN vs PS/radicaux. D’autant plus vrais que les alliances vont pleinement s’exprimer au second tour (l’UMP ou le PS récupérant une grande partie des voix des partis éliminés pour faire face au FN).

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