Contrairement à ce que racontent dans les grands médias français les « spécialistes » des États-Unis, la vie politique américaine n’a pas toujours été teintée de conservatisme. Dire que l’Amérique a toujours été dominée par une forme de religiosité, c’est relativement vrai, mais affirmer que les valeurs morales traditionnelles ont toujours eu du poids à Washington D.C., c’est très loin de la réalité. De plus, le mouvement conservateur américain n’est pas un bloc figé, qui serait pour l’éternité porté par le Parti républicain, mais est au contraire composé d’une multitude de courants qui souvent se sont affrontés.
En effet, la droite chrétienne en tant que force politique aux États-Unis est un phénomène tout à fait récent, qui a été la résultante d’une double mobilisation. D’abord, la plus importante, est évidemment celle des chrétiens américains qui ont massivement réinvesti à partir des années 1960 – 1970 le champ politique trop longtemps abandonné aux progressistes, au sein même du Parti républicain. Cette stratégie coordonnée a aussi conduit à la création d’une vaste société civile agissant dans le domaine du para-politique. Des centaines d’associations, de fondations, de groupes d’intérêts ont ainsi été créés à Washington pour porter un certain nombre de valeurs au plus près des décideurs politiques et des institutions publiques. Le terrain des idées fut aussi envahi par de nouveaux instituts comme la Heritage Foundation créée en 1973. L’avènement d’intellectuels conservateurs à l’université et dans les médias devenait une réalité. La seconde stratégie relève d’une logique interne au Parti républicain dont certains élus – sans être nécessairement chrétiens eux-mêmes ou bien pratiquants – ont vu l’opportunité de capter l’électorat chrétien conservateur au sens large pour revenir au pouvoir.
D’une manière générale, les chrétiens américains (qu’ils soient protestants ou catholiques) n’étaient pas particulièrement actifs dans la sphère politique, et notamment nationale, longtemps considérée comme matérialiste, corrompue et l’État fédéral comme une menace d’oppression. Entre 1933 et 1969, les Républicains n’ont gagné que 3 élections présidentielles sur 10 ! Dwight Eisenhower, bien qu’anticommuniste, n’avait pas remis en cause le New Deal et avait au contraire poursuivi une politique keynésienne et modérément conservatrice. Son vice-président, également un modéré, n’était autre que Richard Nixon. Devenu plus tard président, il a totalement discrédité la gauche du parti par l’affaire du Watergate. L’aile conservatrice du parti a pu prendre l’ascendant sur l’aile modérée du Grand Old Party et porter la candidature de Ronald Reagan à l’élection présidentielle. La « révolution conservatrice » reaganienne dans les années 1980 ancre définitivement le parti dans une ligne en accord avec les valeurs chrétiennes.
Cette révolution des valeurs aux États-Unis, et son influence notamment à droite, ne peut être comprise sans l’engagement des chrétiens en politique à partir des années 1970, même si d’autres mouvements ont contribué au changement culturel. C’est le cas notamment des néoconservateurs, courant en partie porté par la communauté juive. La « droite chrétienne » ou la « droite religieuse » comme on l’appelle outre-Atlantique a en fait émergé comme une force politique majeure suite à deux décisions de la Cour suprême : la première interdisant la prière à l’école en 1962, et surtout la seconde autorisant l’avortement en 1973. À partir de là, la violence morale de l’establishment de Washington a rassemblé les catholiques (déjà opposants depuis longtemps à l’avortement), et les protestants évangéliques (plutôt nouveaux sur cette thématique). Cette nouvelle génération politique a dès le début trouvé toute sa place au sein de la coalition conservatrice.
Depuis le ralliement de cet électorat, les Républicains ont gagné 5 des 9 élections présidentielles, ont dominé le Sénat ainsi que la Chambre des représentants pendant 8 des 17 dernières sessions du Congrès, alors que la droite américaine était à l’agonie seulement quelques années plus tôt. Aujourd’hui encore, la droite chrétienne détermine la ligne du Parti républicain et influence la vie politique comme jamais. La plupart des leaders nationaux s’y identifient et le mouvement populaire du Tea Party n’existerait pas sans la participation des chrétiens.
Il existe aujourd’hui une vraie opportunité pour les chrétiens français, et en particulier les catholiques, de prendre la tête d’une pareille révolution culturelle. La fenêtre de tir est là. Le pays est au bord du gouffre, il connaît une véritable crise identitaire et sociale, le pouvoir socialiste attise les haines et s’attaque aux plus fragiles d’entre nous. Cette situation révoltante a conduit des millions de Français dans la rue pour protéger la famille d’une filiation artificielle, l’école de la théorie du genre mais aussi la vie encore et encore rabaissée. L’actuel débat sur l’IVG doit nous interpeller. S’il est une excellente nouvelle qu’il soit enfin rouvert, les projets socialistes en la matière visent à répandre toujours plus la culture de mort dans notre société. Nous observons impuissants quelques députés UMP résister tant bien que mal, essayer de sauver ce qui ne peut politiquement pas l’être. Ainsi la détresse des femmes qui avortent de leur enfant leur est désormais légalement déniée. Les slogans simplistes nient la vie humaine, renvoient des êtres à la notion d’ « amas de cellules », le terme « fœtus » étant sans doute encore trop criant d’humanité.
La solution à cet infernal acharnement est pourtant là, devant nous. On peut penser ce qu’on veut de l’UMP, et on peut en penser du mal, souvent à juste titre. Mais le fait est qu’il est aujourd’hui en France le grand parti de gouvernement de la droite. Un certain nombre d’élus partagent nos valeurs, mais à l’évidence, une petite minorité au Parlement (7 députés ont voté favorablement l’amendement pour le déremboursement de l’IVG). Que doit nous dire ce triste événement ? Qu’il faut des élus pour la vie ? C’est une chose de le dire, mais il faudrait pour cela commencer à y travailler. Ce qu’ont fait les Américains pour la famille et la vie, nous ne pouvons l’attendre les bras croisés. Le changement viendra de l’engagement, la politique changera de l’intérieur. Entrez en politique, adhérez à l’UMP, prenez la tête d’équipes militantes, affirmez vos valeurs, intégrez les comités de circonscriptions, le conseil national, devenez élus ! Je trouve à cet égard l’initiative de Sens commun d’une formidable actualité. Le temps est vraiment venu de prendre nos responsabilités.
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