J’ai écrit mon livre Le Vote Libéral avec deux intentions bien claires : affirmer que l’heure libérale approchait dans notre pays, expliquer qu’on peut presser le pas libéral en tirant parti et des primaires et des présidentielles. La plupart des associations, instituts et think tanks se réclamant des idées de la liberté ont partagé ce double espoir en constituant le « Collectif des libéraux », qui s’est montré très efficace à cette heure.
L’heure libérale a sonné aussi pour les candidats : tous se veulent libéraux (comme Georges Marchais en 1974). Nous sommes allés jusqu’au social-libéral de Macron. Mais il y a le mot et la chose. Chacun est libéral à sa manière. Certes, parmi les candidats à la primaire de novembre, il y a consensus apparent sur quelques mesures précises : la suppression de l’ISF, la baisse de l’impôt sur les sociétés, l’assouplissement du Code du Travail, voire l’annulation du quota de logements sociaux et du blocage des loyers, une certaine autonomie pour les chefs d’établissements scolaires. Cette communauté de vue était naguère impensable : il n’y a plus de pudeur à s’affirmer libéral, quitte à subir les assauts verbaux des deux côtés extrêmes, qui ne cessent de dénoncer l’ultra-libéralisme. On en est au libéral, l’ultralibéral c’est pour bientôt !
Quant à la chose libérale, le bilan est moins séduisant. En premier lieu sur le rôle de l’Etat : tous les candidats ne veulent pas le réduire à la portion congrue. Ensuite, le système social trouve encore grâce, malgré quelques aménagements mineurs, mais certains ne remettent pas en cause le monopole d’un assureur public et ne vont pas jusqu’à la liberté des honoraires et tarifs des médecins libéraux et des hôpitaux privés. Peu nombreux sont ceux qui veulent brûler le Code du Travail et supprimer le paritarisme avec des syndicats sans représentativité. Enfin, le protectionnisme et le « made in France » ont toujours leurs partisans et l’avenir de l’Europe trouve les candidats hésitants entre souverainisme, intégration et fédération. Au demeurant, la sécurité, prolongée par l’identité, a été le thème majeur des premiers grands discours et a occulté à ce jour tout le reste – l’actualité hélas y poussait.
Un candidat pouvait à mon sens capter le vote libéral : c’était Hervé Mariton. Son programme (Le Printemps des Libertés) et ses discours (souvent relatés dans cette Lettre) correspondaient globalement aux attentes d’un électeur libéral, surtout si cet électeur était aussi un « conservateur », c’est-à-dire attaché aux valeurs morales en honneur en France. Partisan de la flat-tax, du libre choix scolaire, de la privatisation d’une grande partie des services publics, hostile au logement public et au zonage, hostile à loi Taubira, Hervé Mariton défendait ses idées au nom d’une profonde réflexion sur la dignité de l’être humain sur la tyrannie du statu quo. Il avait d’ailleurs discuté longuement avec les participants à la rencontre organisée par le Collectif le 7 juin dernier : il avait réellement la cote. Hervé Mariton va fixer aujourd’hui même celui des sept candidats en lice qui aura son soutien. C’est un signe de maturité, de responsabilité et d’élégance.
Le champ du vote libéral se concentre donc maintenant sur certains candidats qui ont placé leur engagement sous le signe du choix de société, au lieu de multiplier des promesses aussi alléchantes qu’incohérentes. Au cours du week-end libéral passé à Dax à l’initiative du cercle Frédéric Bastiat, le vote libéral semblait s’orienter sur François Fillon. Mais, bien que marginalisé par les sondages, Jean Frédéric Poisson attirait aussi plusieurs libéraux conservateurs. Le vote libéral va-t-il tomber à la trappe ?
C’est difficile de l’exprimer clairement dans le contexte actuel. Le duel Juppé-Sarkozy retient l’attention générale, mais demeure toutefois un premier tour qui garde encore quelque signification. Comme Mariton l’a fait, les oubliés du premier tour peuvent faire savoir où devraient aller leur soutien, sachant très bien toutefois que nul n’est propriétaire des votes qu’il a pu recueillir.
Il nous reste donc presque deux mois pour y réfléchir. Continuons à observer les candidats à la primaire, ils vont sans doute évoluer. Il y aura des débats télévisés où chacun s’exprimera. Qui fera référence à nos principes, de nature à guider les vraies réformes ? Pour quelques-uns l’évolution me paraît indispensable puisqu’à ce jour leur jeu électoral se calque sur les positions et la cote de Hollande, Macron, Le Pen, allant jusqu’à escorter le Président-Candidat dans ses manifestations. N’en doutons pas : il y aura un vote libéral, et notre tâche est de le faire valoir le plus tôt possible. On recherche le vote des harkis, le vote des victimes des attentats : pourquoi pas le vote libéral ?
> Jacques Garello est le président de l’ALEPS.
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