L’Europe est une grande machine à décérébrer les nations européennes. Le poisson pourrit toujours par la tête. Ce dicton peut ici se comprendre de trois manières. L’Europe a produit jusqu’au début du siècle précédent la plus grande partie de l’élite mondiale dans les domaines de la science et de la culture. Elle a imposé au reste du monde sa civilisation soit par la domination, soit par l’imitation de son modèle, soit par la formation des castes dirigeantes. Elle a connu la première une éducation de masse indispensable à une société industrielle et démocratique. Les deux guerres européennes absurdes et suicidaires qui se sont propagées en conflits mondiaux ont en réaction éveillé l’espoir d’une union européenne capable d’assurer la paix et de maintenir l’importance économique et politique du continent face aux nouvelles grandes puissances. Après des décennies d’approfondissement des institutions européennes et d’élargissement de l’Union Européenne, le bilan est calamiteux. On assiste à une implosion de l’Europe.
L’Europe entre 1945 et 1990 était encore constituée de peuples, de nations que l’habitude de la démocratie ou l’espoir de l’instaurer faisaient tendre vers une politique apaisée, soucieuse de l’intérêt national et de son lien avec le Bien Commun continental. L’amitié franco-allemande puis la chute des régimes autoritaires de droite au sud et totalitaires de gauche à l’est ont été les étapes de ce processus qui semblait une nécessité historique incontournable. Dans la plupart des pays s’installait au pouvoir une classe politique globalement respectée parce que jugée apte à l’exercer avec talent. Les alternances nationales entre des responsables qui paraissaient de plus en plus proches les uns des autres n’empêchaient pas les ententes entre nations : les images de Helmut Schmidt et de Valery Giscard d’Estaing, d’Helmut Kohl et de François Mitterrand sont dans tous les esprits.
Cette image s’est aujourd’hui craquelée à mesure que les nations européennes s’affaissaient ou se fissuraient. Le ballet de nos dirigeants à Bruxelles ou ailleurs n’inspire aucun respect. Leurs errements en politique intérieure, leurs résultats médiocres, leur incapacité à assurer la protection du continent, et leur stratégie internationale confuse, plaçant l’Europe dans l’orbite américaine, ne suscitent guère la confiance. La gesticulation de Mme Merkel sur la question des migrants comme naguère sur l’énergie révèle l’amateurisme de celle qui est à la tête de la première puissance économique, sans d’ailleurs qu’elle ait une part essentielle dans cette réussite. En France, leurs multiples bourdes, nous ont révélé que nos dirigeants, s’ils ont appris à communiquer et à faire carrière, n’ont ni la compétence technique, ni le niveau culturel, la hauteur de vue pour assurer leurs missions.
Pour qu’il y ait une démocratie, il faut un « démos », un peuple avec un certain degré de conscience de son unité et de ses intérêts propres. Pour cela, il faut aussi un niveau de formation et un véritable enseignement de son identité. Il faut former les citoyens pour qu’il y ait une Cité, les former à être libres, mais responsables. On s’est aperçu que non seulement les apprentissages fondamentaux reculaient mais qu’il était urgent de réinstaurer une éducation citoyenne. Emberlificotés dans leur idéologie, nos politiciens sous-cultivés imaginent faire naître une citoyenneté abstraite de l’adhésion à une République laïque. Or, l’appartenance à la Cité est le produit d’un long héritage et de la transmission d’une tradition et d’une histoire. Elle peut aussi être le fruit d’une volonté, mais là encore, celle-ci ne peut se limiter à un calcul d’intérêt. Elle doit être portée par un désir d’assimilation, un projet d’appartenance. Les peuples européens, la France en particulier, sont de culture hélléno-chrétienne. Or, cette identité est aujourd’hui menacée par une immigration déraisonnable, voire par une absurde adhésion turque à l’Europe.
Comme si cette menace extérieure ne suffisait pas, on assiste à une implosion des nations européennes. D’une part, des revendications régionalistes, que des fantasmes haussent au niveau de nationalismes, risquent de briser les nations : la Catalogne, l’Ecosse, et pourquoi pas la Corse connaissent cette tentation, ce risque d’involution. D’autre part, et les deux processus ne sont pas étrangers l’un à l’autre, la politique est envahie par une foule de personnages qui n’ont pas le niveau requis. Le vote français aux élections régionales a montré la volonté des Français de résister au déclin. Le plat discours du microcosme veut réduire cette résistance à la lutte contre le Chômage. Et voilà le ludion Tapie qui remonte à la surface avec un plan contre le chômage. Vive le sauveur ! Mais puisque la Grèce a confié son destin à un aventurier comme Tsipras et que l’Espagne sombre aux charmes de Podemos au point de devenir ingouvernable, « Nanar » aurait-il tort de vouloir succéder à des dirigeants dénués de compétence et de courage ? Faute de s’intéresser à des Prix Nobel scientifiques de plus en plus rares, on propose, hélas, aux Français d’aujourd’hui d’autres champions.
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