La dernière crise grecque aura eu, au moins, le mérite de mettre à découvert toute la dureté de l’Union Européenne dans sa forme la plus haineuse. Cette haine s’est déversée, avec toute la violence politique possible, sur un gouvernement n’ayant pas l’heur de plaire à la troïka, en l’occurrence une administration d’extrême gauche (dans une majorité européenne libérale, cela fait désordre) pourtant élue démocratiquement et qui, de plus, a eu l’outrecuidance d’organiser un référendum pour laisser le choix au peuple d’entériner ou non les nouvelles mesures d’austérité préconisées par Bruxelles. Le peuple a dit non à 61 %. Et “non”, c’est “non” ; ce n’est pas “oui” ! On pouvait dès lors espérer une position très ferme de la part du Premier ministre grec, Alexis Tsipras, pour reprendre, en situation de force des négociations qui, cela ne faisait aucun doute, allaient être âpres. Déception pour l’extrême gauche européenne : Alexis Tsipras s’est couché devant la troïka et a mordu la poussière. Mais aussi, échec, pour tous les patriotes de tous bords. Pourtant, le pire n’est pas là.
La vraie nature de l’UE – pour ceux qui en doutaient encore, ou pour ceux, qui de bonne foi croient encore à l’idéal européen – est maintenant démasquée. Même Dominique Strauss-Kahn, ancien directeur général du FMI (Fonds Monétaire International) et ancien ministre français de l’Économie, des Finances et de l’industrie, dit que le dernier accord européen est pour la Grèce, la mise en place d’une politique “mortifère” qui va installer “un climat dévastateur”. Si même lui, social libéral, qui n’a jamais caché ses préférences politiques le dit, c’est que vraiment, les Grecs peuvent se faire du souci. Déjà pendant la crise de 2008, il avait évoqué pour la Grèce une dévaluation intérieure. Pourquoi ne pas aller jusqu’au bout de la logique et préconiser une sortie de l’euro ? C’est sûrement trop demander à un socialiste euro béat… Aussi euro béat que le premier, mais sans esprit critique, François Hollande propose le pire : renforcer l’union économique du Parlement européen…
Pourtant, dans le conteste actuel, il serait assez sage de préparer ce pays à une sortie de la monnaie unique. De plus en plus de voix se font entendre pour envisager ce scénario, quitte à jouer double jeu comme le très européiste, Wolfgang Schäuble, Ministre allemand des Finances, un proche de Merkel, qui dit soutenir le plan d’aide et qui en même temps évoque toujours une possible sortie de la zone euro : ” Ce pourrait être une meilleure solution ” pour la Grèce, estime-t-il… Faudrait savoir ! À quoi joue-t-il ? Visiblement il a enfin compris que la Grèce ne pourra jamais rembourser ses dettes et il s’inspire pour cela des travaux d’un des économistes les plus influents d’Allemagne, Hans-Werner Sinn, qui, lui, préconise une sortie temporaire.
D’autres économistes ¹, chez nous et dans le monde occidental – deux prix Nobel, Joseph Stiglitz et Paul Krugman – et une centaine d’autres tout aussi éminents comme, Jacques Sapir, Jacques Généreux, Frédéric Lordon, Philippe Murer, Bruno Lemaire, Jean-Jacques Rosa, Jean-Richard Sulzer, Jean-Pierre Vespérini, etc… militent pour mettre fin à cette horreur économique qu’est la monnaie unique, qui ne produit que de l’austérité, de la misère et qui est assurément inadaptée à la plupart des économies européennes. Pour le prix Nobel de l’économie, Paul Krugman, c’est un jugement sans appel : “l’élite européenne, de toute son arrogance, a bloqué le continent en un système monétaire qui a recréé la rigidité du modèle d’excellence, et – tout comme le modèle d’excellence des années 30 – celui-ci s’est transformé en piège mortel (…) l’Europe se porterait sans doute mieux s’il s’écroulait plutôt aujourd’hui que demain”. Faut-il encore rappeler, que Philippe Séguin nous l’avait dit dans sa “plaidoirie” du 6 mai 1992 contre le Traité de Maastricht : « Dès lors que, dans un territoire donné, il n’existe qu’une seule monnaie, les écarts quelque peu significatifs de niveau de vie entre les régions qui le composent deviennent vite insupportables. » et il rajoutait en guise d’avertissement : « Puisqu’il s’agira de redistribuer, ce sera bien entendu aux pays les plus avancés d’en supporter la charge. C’est dire combien la France devra payer. » On ne pouvait être plus clair !
L’euro est une monnaie qui ne profite qu’à l’Allemagne parce que parfaitement adaptée à l’économie de ce pays. On comprend mieux l’acharnement d’Angela Merkel à défendre l’euro. Pour les autres, c’est l’austérité à des degrés divers, mais il n’en reste pas moins que de toutes les économies mondiales, c’est la zone euro qui connaît la plus faible croissance : 0,9 % en 2014. L’Italie, troisième économie de la zone euro, a connu une croissance à l’arrêt : 0,0 %… ²
Dans le monde en moyenne, c’est 3,3 % pour 2014 ; pour la Chine, c’est 7,4 %… ³
Et ces écarts durent depuis la création de la monnaie unique. Où est l’erreur ?
Pour en savoir plus en détail :
1. http://altereconomie.l.a.f.unblog.fr/files/2014/04/france31.pdf http://www.wikistrike.com/2014/12/la-liste-s-allonge-159-economistes-envisagent-desormais-de-sortir-ou-de-dissoudre-l-euro.html
2. http://www.lesechos.fr/06/03/2015/lesechos.fr/0204206370394_la-zone-euro-affiche-une-croissance-de-0-9–en-2014.htm
3. http://www.imf.org/external/French/pubs/ft/survey/so/2014/NEW100714AF.htm
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