Dimanche 19 février, le journal publiait un article intitulé « Donald Trump invente un acte terroriste en Suède ». Pour le cas où cet article viendrait à être opportunément modifié, et plus particulièrement son titre « racoleur » (selon la terminologie décodexienne). Je vous livre ci-dessous la copie du chapeau, tel qu’il figure encore sur le site, ce lundi 20, à 10h du matin.
En quoi est-ce une fausse nouvelle ?
Tout simplement parce qu’à aucun moment le président américain n’a parlé d’un « acte terroriste ». Je vous place ci-dessous la transcription exacte de la déclaration incriminée, telle qu’elle a été publiée par le Telegraph.
A day after falsely suggesting there was an immigration-related security incident in Sweden, US president Donald Trump said on Sunday that his comment was based on a television report he had seen.
Mr Trump, who in his first weeks in office has tried to tighten US borders sharply for national security reasons, told a rally on Saturday that Sweden was having serious problems with immigrants.
«You look at what’s happening last night in Sweden,» Mr Trump said. «Sweden. Who would believe this? Sweden. They took in large numbers. They’re having problems like they never thought possible.»
No incident occurred in Sweden and the country’s baffled government asked the US State Department to explain.
«My statement as to what’s happening in Sweden was in reference to a story that was broadcast on @FoxNews concerning immigrants & Sweden,» Mr Trump said in a tweet on Sunday.
Que je traduis librement par :
Regardez ce qu’il s’est passé la nuit dernière en Suède. En Suède, vous croiriez ça ? En Suède. Ils les ont accueillis en grand nombre. Ils ont des problèmes qu’ils n’auraient jamais cru possible.
Vous avez dit « acte terroriste » ? Si cela n’était pas assez clair, et voyant que les médias avaient déformé ses propos, Donald Trump a précisé en soirée que ses déclarations faisaient référence à un sujet diffusé par la chaîne FoxNews.
Or l’article du Monde, pourtant mis à jour ce lundi à 8h29 reste intitulé « Donald Trump invente un acte terroriste en Suède », et on peut y lire :
Le président américain a expliqué devant ses partisans, samedi 18 février en Floride, qu’il était dangereux d’accueillir des réfugiés. Pour étayer son propos, Donald Trump a même voulu en fournir la preuve séance tenante : la Suède, pays particulièrement accueillant, vient de subir un attentat, dit-il. Problème, cet attentat n’a jamais eu lieu.
Le plus fort, c’est que tout de suite après ils livrent leur propre traduction des propos du président américain dans laquelle il n’est nulle part question d’un « attentat ».
« Regardez ce qui se passe en Allemagne, regardez ce qui s’est passé hier soir en Suède. La Suède, qui l’aurait cru ? La Suède. Ils ont accueilli beaucoup de réfugiés, et maintenant ils ont des problèmes comme ils ne l’auraient jamais pensé », a-t-il lancé, dans un discours virulent en Floride, en défense de sa politique anti-réfugiés. Il a également cité les attentats, réels ceux-là, de Bruxelles, Nice et Paris.
Que faut-il en penser ?
Dans le contexte particulièrement tendu lié à la crainte des attentats terroristes qui pourraient être perpétrés par des combattants revenus de Syrie ou de Libye au titre de réfugiés, une telle déformation intentionnelle des propos du président américain relève sans l’ombre d’un doute de la désinformation volontaire. Et d’une intention malveillante.
La rédaction du Monde ne pourra pas prétendre qu’elle n’avait pas en main tous les éléments lui permettant de publier sereinement un article objectif, puisque l’article reprenait mot pour mot les véritables déclarations de Trump. C’est une manipulation, c’est totalement contraire au premier devoir des journalistes tel que stipulé dans la Charte de Munich.
Responsabilité
Que l’article soit issu de la rédaction ou basé sur une dépêche AFP, dès qu’il est publié, la responsabilité éditoriale du journal est engagée. C’est déjà la deuxième fois en quelques semaines que l’AFP publie des fausses nouvelles, mais cette fois, Le Monde avait tous les éléments en main et l’obligation déontologique de relater fidèlement les faits.
On ne peut être juge et partie, c’est une évidence. Quand, par prétention ou par désespoir on en arrive à s’arroger pareilles prérogatives, il vaudrait mieux se montrer exemplaire. On en est loin.
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