Aucun hommage ne lui a été rendu dix ans après sa disparition. Jacques Faizant est pourtant le grand caricaturiste de droite de la seconde moitié du XXe siècle. Il fut à la caricature ce qu’Hergé fut à la bande dessinée. Leur trait, à tout deux, était étonnement figuratif et évocateur. Leur crayon, discipliné, va droit au but. Leur dessin a juste ce qu’il faut, comme dans une hypothèse d’école. Cette quasi perfection, pure et limpide, ressortit de ce que l’on appelait jadis l’harmonie française. La caricature de Faizant est plus achevée que ne l’était l’ébauche typée du talentueux Trez, sans le côté brouillon de Plantu ou, a fortiori, du regretté Cabu.
Quant à l’humour, il est ravageur, désopilant, réconfortant. En effet, en des temps difficiles que furent, pour l’homme de droite, l’arrivée au pouvoir d’une gauche mitterrandienne à la fois donneuse de leçons et calamiteuse, le dessin de Faizant fut comme une sorte de pied de nez à l’occupant du terrain intello-artistique. Face à cette prétention hégémonique à détenir le monopole de la culture et de l’esprit, le dessin de Faizant permettait à l’homme de droite de recouvrer sa fierté. Chaque jour, au premier coup d’œil, on savait qu’on avait raison de penser ce que l’on pensait. Et l’on jubilait, de surcroît, de vérifier que l’humour, le talent et la fantaisie n’étaient pas, résolument pas, la chasse gardée de la gauche. Savourer le petit croquis moqueur qui lui jouait un tour pendable, c’était comme siffloter un air frondeur.
> Marc Crapez est politologue. Sa page Facebook.
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