Dimanche, rien ne se passait comme prévu. La Manif pour Tous parisienne avait réuni plusieurs dizaines de milliers de personnes et l’ambiance, très tendue à deux jours du vote en seconde lecture par l’Assemblée nationale du projet de loi Taubira, avait justifié une mobilisation exceptionnelle des forces de l’ordre, notamment autour de l’événement et au point d’arrivée du cortège. Mais à 15h59, on lui signala un attroupement suspect avenue des Gobelins. 3 CRS étaient sur le coup. À 16h02, une trentaine d’individus s’asseyaient sur la chaussées des Champs, le slogan “Un père, une mère, c’est élémentaire !” à la bouche, l’avertissait-on. 2 CRS sur le coup. À 16h03, on lui signalait que des jeunes s’étaient allongé sur les rails du tramway T2 à au moins deux endroits dans la capitale. Les gendarmes mobiles allaient s’en occuper. Impossible en effet de réduire le dispositif autour de LMPT où de nombreux manifestants n’avaient pas l’air d’être de ceux qui rentrent à la maison quand Frigide ou Albéric le demande. À 16h04, Bernard Boucault, le Préfet de police de Paris, l’appelait en catastrophe : on lui signalait des dizaines d’attroupements dans tout Paris : Rivoli, Les Halles, l’Hôtel de ville, Bourse, Sorbonne, Saint-Michel, Luxembourg, Etoile, Barbès, Magenta… et des dizaines d’avenues bloquées pacifiquement. Que faire ? Redéployer les forces de l’ordre ? “Et merde ! On me rapporte au moins dix autres attroupements, deux intrusions sur le périphérique et des individus sur les voies du RER C à hauteur du parc André Citroën !” l’interrompit dans ses pensées Bernard Boucault. Son ton était paniqué. “Sur la Tour Eiffel et Montmartre aussi. Mais, c’est quoi ce délire ?”
“Arrêtez tout !”, lui répondit-il. “Tout !”
“Arrêter quoi, bon sang ?” lui répondit Boucault. La tête lui tourna. Qu’est-ce qui lui avait fichu de tels manifestants ? Il devait en référer au Président. Tout de suite.
“Oui allô ?”
“Allo, Ségo… pardon, allô Valérie, est-ce que je pourrais parler à François s’il te plaît ?”
“François, c’est Kommandantur, il n’a pas l’air bien, on dirait qu’Anne Gravoin l’a quitté.”
“Oui, Manuel ?”
“François, c’est la cata, les anti-mariage pour tous manifestent partout dans Paris, j’ai Boucault qui me rappelle, là, attends, deux secondes !”
“Oui, Bernard ?”
“Manuel, je ne sais pas ce qu’il se passe. On me signale huit autres rassemblements et certains signalés par des appels à la Préf’ n’ont en fait pas lieu, j’ai trois CRS qui se sont rendues pour rien à Rivoli tandis que certaines avenues sont bouchées depuis cinq minutes…”
Manuel se réveilla en sursaut. Anne était toujours à ses côtés, il était 2h05 du matin ce samedi. “Waouh… Heureusement que dimanche, ce sont des bons petits cathos qui ne font pas de vague qui manifestent” pensa-t-il, en sueurs, avant d’aller aux toilettes.
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