Objectivement, le soutien de Marine Le Pen au candidat LR Elad Chakrina est logique. La Présidente du Front National avait obtenu à Mayotte un bon score à la présidentielle. Elle a donc une légitimité à s’exprimer. Le candidat FN avait au contraire enregistré le résultat piteux de 3 % aux législatives. Si l’on analyse ce résultat au lieu de le brandir comme un trophée comme le font des représentants de LR, on doit en conclure que le potentiel des voix « de droite » à Mayotte est important, et que l’insécurité pèse sur le vote des Mahorais. C’est la raison pour laquelle, ils ont clairement voté pour une droite ferme, voire dure, à plus de 60% au premier tour de la présidentielle, en reléguant Macron à 19%. Les 42% obtenus par Marine Le Pen au second tour sont supérieurs à sa moyenne nationale, et cela dans un département habité par des Français musulmans et noirs : ce fait devrait attirer l’attention sur un parti souvent accusé d’islamophobie ou de racisme. Manifestement beaucoup de Mahorais ont surmonté les préjugés alimentés en permanence à l’encontre du FN parce qu’ils placent en priorité leur exigence d’un rétablissement de la loi et de l’ordre. Lors des législatives, le FN n’ayant aucune chance de participer à un gouvernement, ils ont plutôt donné l’avantage à LR, puisque Mansour Kamardine a été élu largement avec 64,6 % des voix dans la 2e circonscription, et que le candidat LR de la 1ère circonscription, Elad Chakrina, n’a été battu que de 54 voix dans un scrutin tellement douteux que son résultat a été annulé, et que l’élue, de justesse, est mise en examen pour une fraude électorale éventuelle. On ne s’attardera pas sur le fait que Ramlati Ali est une socialiste qui a rejoint En Marche par opportunisme, comme beaucoup d’autres socialistes qui ont choisi le radeau de la Méduse plutôt que de sombrer avec le PS, dont le fort n’a jamais été la sécurité. LREM et son inventeur ne font pas non plus de cette question leur tasse de thé. Le recul présidentiel récent sur la politique pénale en témoigne clairement.
Or, sur cette question, contrairement à celles qui portent sur l’économie ou l’Europe et l’Euro, il y a une convergence entre le Front National et Les Républicains, surtout si, avec Laurent Waucquiez, LR retrouve le muscle perdu du RPR de Chirac, voire de Sarkozy, avant que l’un comme l’autre cèdent aux modes idéologiques du microcosme parisien qui règne dans les antichambres à défaut d’avoir la majorité dans les Chambres. Des débuts du RPR jusqu’à la fin peu glorieuse de la Droite Populaire au sein de l’UMP, je me souviens avoir défendu des idées reprises par le FN tandis qu’elles étaient abandonnées par les gouvernements de « droite » : préférence nationale, restriction drastique de l’immigration, expulsion des clandestins, abolition du « droit du sol » etc… Comme la situation catastrophique dans l’île appelle une politique musclée de restauration de l’autorité républicaine et de la souveraineté territoriale, l’idée de soutenir un candidat qui exigera du gouvernement une politique ferme n’est pas absurde. De plus, à travers l’exemple extrême de Mayotte, c’est une manière habile d’attirer l’attention sur le devenir de la Métropole, elle-aussi touchée par une immigration excessive qui engendre des problèmes analogues dans certains secteurs du territoire. Les chiffres de l’île sont en proportion très supérieurs à ceux de la métropole. Par exemple, les clandestins, « mineurs non accompagnés », seraient compris entre 18 000 et 25 000 en France continentale, mais il y en a 3000 à Mayotte, soit 32 fois plus en proportion. Toutefois, il n’y a pas entre les Comoriens et les Mahorais, la distance culturelle qui accroît les difficultés, comme l’a souligné Hughes Lagrange, dans le Déni des Cultures. Autrement dit, Mayotte est le lieu d’une rencontre entre deux politiques soucieuses de l’intérêt national et du bien-être des Français, et qui a le mérite de mettre entre parenthèses la question de l’identité raciale ou culturelle. Le Front National aurait eu tort de manquer cette opportunité.
C’est la raison pour laquelle beaucoup de réactions des « Républicains » sont indigentes voire stupides. Au lieu de choisir le terrain solide de la politique, celui des problèmes et de leur éventuelle solution, appuyée sur sur une analyse et une doctrine, ils en sont à une attitude de cour de récréation : « je ne veux pas jouer avec lui, mon papa m’a dit qu’il n’était pas gentil ». C’est à peu près le niveau de Mme Calmels, porteuse de l’interdit de M. Juppé dont la clairvoyance politique est devenue légendaire. Elle préférerait perdre sans le FN que gagner avec lui… Emouvant retour au déclarations des Chirac et autre Noir, qui ont cassé la dynamique de droite aux régionales et aux municipales en assurant l’implantation durable de la gauche. Autre femme d’avenir, Valérie Pécresse, qui fait carrière à droite, sans avoir la moindre idée de ce que doit être la droite, ramène l’événement à sa conception de la politique qui doit être une pure communication en vue de gagner l’élection suivante. Pour quoi faire ? Mais pour être élue, bien sûr ! Peut-on vouloir autre chose ? » Marine Le Pen essaie de faire parler d’elle » dit Valérie avec une hauteur de vue sans pareille ! C’est le drame de l’UMP qui se poursuit : le désert de la pensée politique au profit d’un arrivisme effréné grimpant d’une branche à une autre au hasard de l’actualité. Le porte-parole du parti, Gilles Platret, n’hésite pas à généraliser sa conception de la politique : » Mme Le Pen est en mal de buzz. Elle se raccroche aux branches ».
Heureusement, certains, comme Thierry Mariani, ont une vision plus réaliste. Comme dans de nombreux pays européens, les droites seront appelées à s’unir en France. Cela nécessitera des évolutions sur les projets, sans doute des changements de personnes, et en définitive des accords. Qui parierait sur l’impossibilité d’une entente entre Laurent Waucquiez et Marion Maréchal ? En attendant, le soutien du FN ne méritait ni mépris, ni enthousiasme. C’est d’ailleurs ainsi que le candidat LR, Elad Chakrina l’a reçu. Et on lui souhaite bonne chance !
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