La Révolution est un mythe politique qui fait croire que le renversement d’un régime permet d’en instaurer un autre plus juste. On sait après 1789, 1917, etc. qu’il s’agit surtout d’installer une autre caste au pouvoir souvent plus intolérante et répressive que la précédente. Seules les contre-révolutions rendent possible un certain équilibre. Mais dans ce processus qui consiste à mettre en haut ce qui était en bas, la révolution des valeurs est bien plus profonde que celle des hommes. Or c’est celle-ci qui éclaire la fascination des penseurs gauchistes des années 70-80 pour Nietzsche, ce philosophe auparavant présenté comme l’inspirateur sulfureux de l’extrême-droite. Le renversement des valeurs est depuis devenu l’objectif obsessionnel de la gauche idéologique.
Évidemment, le socle auquel s’attaquent avec le plus d’ardeur les dynamiteurs, c’est celui des valeurs chrétiennes qui soutiennent notre civilisation. Parmi elles, la vie est devenue la cible privilégiée. Le Persan d’aujourd’hui qui visiterait l’Europe ne pourrait qu’être surpris en voyant qu’on y supprime les enfants à naître, qu’on précipite la mort des personnes âgées, mais qu’on s’interdit d’exécuter les criminels monstrueux. Sa naïveté exotique lui suggérerait peut-être que c’est la trouble séduction exercée par le criminel plus que le respect de la vie qui suscite cette étonnante exception. De même, son ignorance le conduirait à imaginer que les bébés dans les congélateurs ou les aides-soignantes compatissantes et mortifères aient un lien avec la désacralisation de la vie. De tels préjugés ne pourraient qu’éveiller les pires soupçons chez nos adeptes du progrès. L’Europe est le foyer de la libération des moeurs. Il est révélateur que la Belgique, ce pays qui a si peu d’État qu’il aspire à voir son fédéralisme s’étendre à une Europe dont Bruxelles serait la capitale, est aussi celui où la déliquescence bat des records. Le Sénat vient d’y voter l’euthanasie des mineurs. Un député développe longuement devant les rares collègues demeurés dans l’hémicycle les raisons pour lesquelles il accuse le Premier ministre de pédophilie et n’hésite pas à évoquer l’ignoble affaire Dutroux. Son discret voisin néerlandais, traditionnellement plus soucieux de commerce en tout genre que de morale ou de politique, a depuis longtemps légalisé le cannabis, autorisé les mariages unisexes et l’euthanasie y compris pour les mineurs. Un parti ouvertement pédophile vient d’y être créé.
L’argument européen est renversant : quand une transgression est légale à deux pas de chez vous, au-delà d’une frontière totalement perméable, le bon sens, et peut-être l’intérêt vous commandent de l’importer au plus vite. C’est l’une des raisons invoquées par le lobby de la mort douce qui se rappelle au bon souvenir des Français d’une bien étrange manière. Un panel de 18 personnes sélectionnées par un institut de sondages propose d’instaurer le suicide assisté et d’ accepter l’euthanasie. Pour le coup, il s’agit d’abord d’une transgression de la démocratie : dans un pays où l’on s’acharne à faire obstacle au référendum d’initiative populaire, où l’oligarchie des partis et des lobbys a depuis longtemps donné congé au peuple, où le ministère de la Justice a renoncé à l’extension des jurys populaires, voilà qu’on en utilise un pour remettre en cause un des travaux parlementaires les plus sérieux et les plus pertinents de ces dernières années. La Loi Léonetti avait conduit à un texte équilibré et consensuel au bout de mois de travail et de dizaines d’heures d’audition. Membre de la mission, j’en garde le souvenir d’un des rares moments où j’ai pu accomplir sérieusement mon rôle de député.
Les instigateurs sont faciles à identifier : nos chères « pastèques » plus attachées à la mort qu’à la vie, à la déconstruction de notre société qu’à la protection de l’environnement. Une conseillère régionale verte appelée à la rescousse et l’appellation de « conférence des citoyens » pour désigner le panel sondagier et l’ériger en avant-garde de la démocratie participative dévoilent le pot-aux-roses. Voilà donc des citoyens plus citoyens que d’autres et qui montrent à quel point la démocratie participative des gauchistes badigeonnés de vert est aux antipodes de la démocratie directe. Les Français sont, d’après les sondages, favorables à l’euthanasie, dont ils n’ont guère eu le loisir de mesurer les risques. Le Parlement a voté, il n’y a pas longtemps un texte sur le sujet. Si certains souhaitent que LES citoyens se penchent sérieusement sur cette question extrêmement délicate et complexe, comme l’ont fait les représentants du peuple en auditionnant toutes les parties prenantes, alors qu’ils favorisent l’instauration de vrais référendums qui donnent aux électeurs le temps et les moyens d’être informés. Les résultats pourraient décevoir les transgresseurs.
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