Stratège minable, mais brillant tacticien, notre Président s’est trompé sur tout et tout le temps. Il n’est parvenu à donner de l’importance à la France que dans la mesure où elle est victime, et victime de son incurie qui lui fait cumuler des résultats économiques piteux et une diplomatie confuse, ridicule et dangereuse. La France apitoie et François Hollande invite les Etats étrangers à la consoler en souscrivant à ses demandes environnementales lors de la prochaine COP 21. En attendant, il essaie d’utiliser les conséquences de ses fautes pour se refaire une santé en politique intérieure. Comme si tout cela était naturel et en pleine continuité, il propose au Congrès réuni à Versailles des mesures que le PS n’a cessé de combattre quand il était dans l’opposition et qu’il a dédaigneusement rejetées depuis qu’il est aux commandes nationales. L’air de rien, l’enveloppe sémantique change de couleur. De rose pastel, elle passe au bleu du même ton. C’est désormais la guerre contre les djihadistes. Le « pas d’amalgame » a subrepticement disparu. Mais ce n’est pas une guerre de civilisation, seulement une guerre contre Daesh. En douce, ça veut dire que « Assad » n’est plus l’objectif prioritaire, même s’il ne peut pas être l’issue. Comme si ce dictateur d’occasion, fils de son père, et ophtalmologiste avait vraiment souhaité prendre la place de son frère, comme si ce qui était en cause était la famille Assad et non le pouvoir baassiste allié des Russes, qui fera, bel et bien, partie de l’issue. D’ailleurs, François Hollande va rencontrer Vladimir Poutine avec au menu, un chapeau qu’il lui faudra manger avec un verre de vodka pour faire passer. Bon, il ne dit toujours pas « Etat islamique », mais il est en bonne voie puisqu’il parle « d’idéologie djihadiste ». La peur des mots ne se guérit pas en un jour.
Pour lui, l’essentiel est ailleurs, c’est-à-dire chez nous dont il veut faire un chez lui. Récupérer politiquement la catastrophe qu’on n’a pas su éviter, ni même prévoir, malgré les précédentes, et transformer le plomb d’une politique calamiteuse en or de la reconquête de l’opinion, tel est le programme. Pour ce faire, il y a d’abord l’image d’un Congrès réuni comme l’avait voulu son prédécesseur, mais pas lui, par refus en 2008 de l’hyperprésidence. Tous les parlementaires, les représentants de la nation y applaudissent le discours présidentiel et entonnent la Marseillaise à l’unisson. Le chef de guerre est venu à Versailles pour exposer le plan de bataille. Le ton est martial, l’éloquence lyrique et l’allure déterminée. Personne n’aurait l’indécence de remarquer que les mesures annoncées, non seulement auraient pu être prises plus tôt, mais qu’elles étaient proposées depuis longtemps par des opposants. Personne n’aurait l’impudence de dénoncer une tactique qui consiste à tourner les talons à ce qu’on a fait et défendu depuis toujours. Faire en partie le contraire de ses erreurs sans les reconnaître, voilà la feuille de route. Cette union requise aura un nom : le pacte de sécurité. Le pacte, ça sonne bien. C’est une vieille manie et ça permettra de reporter la fin des déficits excessifs aux calendes … grecques, en ajournant l’autre, celui de stabilité. Il faudra contrôler les frontières et recruter policiers et douaniers. Le PS qui qualifiait la politique hongroise de Viktor Orban « d’inhumaine et contraire aux valeurs et aux principes de l’Union Européenne » a une fois encore bonne mine, surtout depuis qu’on a trouvé un passeport de « réfugié » syrien au Stade de France… Les libertaires d’hier sont devenus sécuritaires mais il serait odieux de prétendre que le laxisme de la veille soit pour quelque chose dans le recul des libertés d’aujourd’hui. Les mêmes qui vidaient les prisons vont multiplier les mises en résidence surveillée…L’état d’urgence devra être prolongé jusqu’à 3 mois. La Constitution devra être modifiée… une fois de plus, dira-t-on, mais l’annonce donne de l’importance à de petites avancées, somme toute assez normales, comme celle qui consiste à permettre à un policier de tirer avant d’être mort sans se retrouver en garde à vue. Il y aura donc un troisième état « de crise » entre l’urgence et le siège. Comme les mots sont habiles à faire croire aux choses. La déchéance de nationalité pour les bi-nationaux qui trahissent la France, même lorsqu’ils y sont nés, sera prononcée… mais ça n’a rien de bien nouveau. Ce qui l’est c’est que la gauche le dise, et que les tribunaux devront s’y plier.
Ne boudons pas notre plaisir dans ces tristes circonstances qui ont vu mourir tant de jeunes Français qui pouvaient mettre leurs talents au service du pays : celui qui dirige le pays progresse sur le bon chemin. Versailles est son Canossa. Mais le pays aurait-il grand intérêt à faire une nouvelle fois confiance à qui s’est tant de fois trompé sous prétexte qu’il tente d’utiliser les conséquences de ses erreurs pour se donner un autre visage ?
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