Depuis le début de la semaine, de nombreux médias ont évoqué le sort d’un jeune Rom de 16 ans « qui se trouve entre la vie et la mort » après avoir été passé à tabac par des « riverains » victimes de vols à répétition. Le maire de la commune de Pierrefitte où s’est déroulé le drame, confirmait même aux journalistes que « les habitants du quartier avaient fait savoir qu’ils étaient excédés de voir des cambriolages et des véhicules dégradés » et que le jeune Rom avait sans doute été victime d’une forme de justice expéditive. Jamais en retard d’une aubaine, SOS Racisme n’hésitait pas à se caricaturer elle-même en écrivant que « ce grave passage à l’acte renvoie à la dégradation alarmante de l’image des citoyens roms ou supposés roms dans notre société et au résultat manifeste des tensions nauséabondes dans lesquelles sont plongés nos concitoyens » et le président de la République lui-même jugeait opportun d’abandonner temporairement les commentaires footballistiques pour se fendre d’une déclaration dénonçant « des actes innommables et injustifiables qui heurtent tous les principes sur lesquels notre république est fondée ». À lire ou à entendre distraitement les gros titres et les éléments mis en évidence, il était clair qu’une bande de Dupont-la-Joie avinés, carte d’adhérents FN dans la poche et matraque en main, s’était mis en tête de se faire justice elle-même en rouant de coups un petit délinquant roumain.
Et puis, en creusant un peu, on apprenait que le jeune homme avait été enlevé dans son campement et très vraisemblablement séquestré dans une cave avant d’être laissé pour mort dans un caddie de supermarché : voilà qui ne ressemblait plus tellement à des méthodes de pères de famille improvisés justiciers. On apprenait aussi qu’un proche de la victime aurait reçu des appels téléphoniques lui proposant de libérer son ami en échange d’une forte somme d’argent, que les auteurs du lynchage seraient originaire de la « cités des Poètes » – ça ne s’invente pas – connu pour ses trafics de stupéfiants et enfin que la modalité de l’agression ressemblait beaucoup aux méthodes d’intimidation des trafiquants. Le papier du Figaro remarquait même en fin de page que ce fait divers en rappellait un autre survenu en juillet 2013, près du Stade de France où « une expédition punitive menée, selon la description faite par la police à l’époque, par une quinzaine d’individus de types africain et nord-africain, armés de barres de fer, de battes de baseball et portant des casques, avait pris pour cible un camp de Roms. »
In fine, l’hypothèse la plus probable, c’est qu’une bande de délinquants et de criminels issus de l’immigration ont séquestré, tabassé et laissé pour mort un Rom, et que la classe dirigeante – au lieu de s’interroger sur sa responsabilité dans la survenu de tels faits divers dans la France de 2014 – en a profité pour se livrer à une énième et grossière manipulation médiatique visant à la dénonciation de la droitisation de la société française. Cela pourrait prêter à rire si la situation n’était pas franchement alarmante.
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