par Pierre Guinot
Monsieur Valls,
Je n’ai rien contre le violon.
Je ne fais pas partie de ceux qui vous reprochent amèrement d’avoir préféré, le 24 mars dernier, assister à un agréable concert plutôt que de veiller à éviter les bavures policières contre la « Manif pour Tous ». Après tout, vous n’étiez pas censé savoir que les CRS, policiers et gendarmes procéderaient au gazage des enfants et des paisibles vieillards qu’ils rencontreraient sur leur route.
Ce qui m’a gêné davantage, c’est votre refus hautain et opiniâtre de prononcer le moindre mot d’excuse envers les victimes des bavures. Mais je ne m’en suis pas scandalisé outre mesure. J’ai mis ces dénégations sur le compte de la mauvaise foi commune à tous les politiques. J’ai supposé que, malgré tout, vous regrettiez, quand même, au fond, ces bavures policières, même si, par orgueil mal placé, vous refusiez de l’avouer clairement. Nous sommes habitués à ce que les ministres nous jouent ainsi du violon.
Votre mélomanie ne me pose donc aucun problème.
Votre mégalomanie me gêne davantage.
Dimanche soir, vous avez mobilisé trente cars de CRS uniquement pour vous accompagner à une audition musicale, salle Pleyel, avec votre compagne. Trente cars, ça fait du monde, vous savez. C’est difficile à garer. Et ça fait vraiment beaucoup pour s’opposer à quelques étudiants chahuteurs et empêcher qu’ils vous huent un peu bruyamment à la sortie du concert. Je serais incapable de calculer exactement le coût, mais, au pris des heures supplémentaires, ça fait quand même cher le youyou. Il est vrai que, quand on aime, on ne compte pas. Et vous êtes mélomane.
Vous êtes mégalomane, surtout. Vous rêvez de prendre la place d’Ayrault : c’est un secret de polichinelle. La place d’Hollande, aussi, tant qu’à faire. Mais ce n’est rien. Vous désirez surtout être entouré d’une garde prétorienne. Quel plaisir, quelle jubilation de se sentir l’homme le plus important de France, obligé d’entraîner trente cars de CRS dans ses moindres déplacements. Quelle extase de se sentir la cible d’une gigantesque conjuration terroristo-fâchiste, et seul homme capable d’empêcher la France de sombrer dans le chaos.
Pour un peu, cette sinistre conjuration, et cet horrible chaos, vous les créeriez de toute pièce. Vous en avez besoin pour vous sentir exister.
Et là, rien ne va plus.
Vous êtes mélomane, monsieur Valls, et personne ne vous le reproche.
Vous êtes mégalomane, et c’est fort coûteux pour la France (assez ridicule, aussi, vous savez…)
Mais vous êtes aussi pompier pyromane.
Vous voulez apparaître aux yeux de tous comme l’homme fort du gouvernement. Pour prendre la place d’Ayrault, vous voulez être non seulement celui qui réussira à faire passer de force la loi Taubira (dont 55% des Français ne veulent pas, selon le dernier sondage BVA-Le Parisien), mais aussi celui qui a sauvé la République face à l’hydre fââchiste toujours renaissante.
Aussi, volontairement, vous faites tout depuis des semaines pour créer de toute pièce ce danger fââchiste. Alors qu’il suffirait, pour apaiser une France en pleine crise économique, de supprimer ce projet de loi totalement inutile, vous faites exprès, au contraire, d’exaspérer au maximum les opposants.
Multipliant les provocations, vous allumez volontairement l’incendie aux quatre coins de la France, uniquement pour pouvoir ensuite montrer vos talents de pompier.
Non content d’avoir, dans ce but, manipulé les chiffres (meilleur moyen de mécontenter les manifestants) puis fait gazer des bébés et des vieillards, vous faites arrêter des promeneurs pour la seule raison qu’ils portent le sweat de la « Manif pour Tous ». Vous organisez des rafles. Vous empêchez brutalement des jeunes gens de chanter quelques chants devant le Sénat. Vous multipliez dans Paris les barrières anti-émeute, uniquement pour créer une atmosphère d’émeute.
Votre attitude est criminelle, Monsieur Valls.
Dans le seul but de favoriser votre promotion personnelle (ah, qu’il est beau le fauteuil de premier ministre !), vous simulez la guerre civile. N’est-ce pas la meilleure manière de la faire éclater ?
Mardi soir, vous avez battu des records.
Pour créer une crise, vous vouliez à tout prix qu’il y ait des affrontements. Pour cela, vous avez fait violemment pousser dans le métro quelques centaines de manifestants qui commettaient le crime impardonnable de déclamer pacifiquement quelques vers de Péguy. Mais, dans ce métro même, les attendaient d’autres forces anti-émeutes qui les repoussaient en sens contraire !
Grâce à ce traquenard, cette prise en sandwich, il était inévitable qu’il y ait des coups, des blessures, du sang. Est-ce que vous vouliez ?
En plusieurs endroits (notamment Saint-Étienne), les participants à la Manif pour tous ont été agressés. Vous n’avez aucunement protesté contre ces violences. En revanche, vous conduisant non pas en ministre de l’Intérieur – veillant à l’ordre public – mais au contraire en chef de gang politique, vous essayez de diaboliser les opposants à la loi Taubira en dénonçant des agressions « homophobes ».
Le problème, Monsieur Valls, c’est que vous n’êtes pas crédible sur ce coup-là. Vous avez déjà trop menti. À Versailles, ce sont vos policiers en civil qui ont essayé d’exciter la foule à enfreindre la loi. Ils ont été clairement repérés et dénoncés par les responsables de la Manif pour Tous. Il est donc logique de supposer que les prétendues agressions “homophobes” ont également été montées par vos services. Peut-être même dans votre bureau.
Et, cachant à la hâte votre boîte d’allumettes, vous essayez de vous faire admirer en uniforme de pompier.
Vous espérez vraiment tromper grand monde, comme ça ?
Non, monsieur le pyromane, votre attitude irresponsable ne peut être tolérée plus longtemps.
Démissionnez immédiatement.
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