Tribune libre
Concernant la vie de la cité et la construction de son existence, j’ai peu, voir très peu d’idées en commun avec Michel Onfray. Cependant, celui-ci propose un enseignement renouvelé qui passerait par la lecture des auteurs plutôt que par ce qu’on en dit. C’est plutôt sain comme approche, cela devrait d’ailleurs être appliqué aux journalistes qui, « présidentielles » obligent, passent leur temps à nous livrer leurs analyses plus ou moins vaseuses sur tout ce que les politiques disent ou déclarent en ce moment.
Je ne partage pas les postulats philosophiques et politiques de Michel Onfray mais c’est un honnête homme, car en tant que postanarchiste favorable à un capitalisme libertaire, ayant soutenu Olivier Besancenot, lors des dernières présidentielles, il ne votera pas Jean-Luc Mélenchon aux prochaines. Il a déclaré ne pas suivre l’homme du Front de gauche parce qu’il se réclame de Robespierre, explique que le régime de Fidel Castro n’est pas une dictature, cite Hugo Chavez comme un interlocuteur censé et crache sur Soljenitsyne. L’air de rien, c’est beaucoup de pendules remises à l’heure, surtout pour un homme engagé bien loin de la droite, mais qui possède une qualité en voie de disparition : « l’honnêteté intellectuelle ». Il faut se rappeler que son livre déboulonnant le père de la psychanalyse lui a valu de se faire traiter de nazi, de pédophile et autres gracieusetés par une bande de bien-pensants excités qui n’ont aucune idée de ce que peut être le sens de la mesure. Michel Onfray, c’est l’antithèse de BHL. Le premier pense avec sa tête, le deuxième ne pense pas, il récite son propre catéchisme. Le premier restitue Camus dans une perspective libre de toute récupération idéologique de droite comme de gauche quand le deuxième se prend pour un sauveur voulant à tout prix marquer l’Histoire de son auguste ego surdimensionné, et persuadé de l’avoir fait en Libye. L’un crée une université populaire quand l’autre entretient son réseau pour mieux empêcher d’exister littérairement toute personne ayant le mauvais goût d’oser le contredire. Michel Onfray travaille au paradis sur terre, et c’est loin d’être gagné, quand son coreligionnaire gratifie de sa présence les coteries à la mode. Bref, l’un travaille pour l’idée qu’il a de l’homme et l’autre aussi, sauf que l’approche qu’ils en ont semble bien différente et qu’à tout prendre, entre deux philosophes de gauche, je choisis celui qui a la décence de prendre acte des faits historiques et politiques et l’honnêteté de les interpréter à la lumière de son intelligence, même si je ne partage pas les solutions qu’il préconise pour une infatigable « sculpture de soi ».
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