Ainsi donc le Front national arrivé très largement en tête au premier tour des élections régionales n’obtient finalement la présidence d’aucune région. Le front dit « républicain » UMPS a bien fonctionné. La démocratie est sauvée ! Est-ce si sûr ?
Nouvelles du front républicain
L’un des atouts majeurs du Front national est qu’il n’a aucune responsabilité directe dans le « suicide français ». L’intuition fulgurante de Jean-Marie Le Pen aura été d’avoir compris et exprimé le premier que l’enjeu majeur des années à venir serait celui de l’identité des peuples. « A celui qui n’a rien, la Patrie est son seul bien » dit Jean Jaurés. Face à l’utopie européiste et mondialiste qui, par nature, veut ignorer l’existence de peuples et de cultures émerge progressivement dans toute l’Europe une réaffirmation identitaire. Plus que par le talent de ses actuels porte-parole, cette prise de conscience est désormais accélérée par l’arrivée continue sur notre continent de populations étrangères à notre culture, installées sur notre sol et financées pour y rester si tel est leur souhait. Le « petit blanc » qui a travaillé toute sa vie et qui touche une retraite de quelques centaines d’Euro, désormais, voit rouge à l’idée d e se voir dépossédé de sa terre, de ses coutumes et de ses biens.
Son teint rubicond s’est assombri pourtant quand il a pris conscience que son vote pour le Front national ne serait pas pris en considération. Au soir du second tour les représentants des « partis de gouvernement » se sont certes acharnés à déclarer qu’il n’y avait ni vainqueur ni vaincu, que le message de défiance, voire de colère des électeurs du premier tour avait bien été entendu. Le malheur est que le même discours avait été tenu par les mêmes personnes en 2002 lorsque Jean-Marie Le Pen avait accédé au second tour de l’élection présidentielle. Pourquoi croire aujourd’hui ceux qui ont tant menti et qui ont, tous, à leur passif l’état désastreux dans lequel se trouve notre pays ? A peine connus les résultats du premier tour du scrutin régional, les dirigeants de l’UMP et du PS s’étaient d’ailleurs empressés, non de chercher à répondre aux inquiétudes et à la colère des électeurs du FN, mais de mettre au point la combinaison qui leur permettr ait d’empêcher ce parti d’accéder aux commandes d’un exécutif local. Les électeurs du FN se sont, dès lors sentis une fois de plus exclus et méprisés par de beaux parleurs pontifiants très éloignés de leurs préoccupations quotidiennes : il est peu probable que Mr. Sarkozy ait jamais été empêché de dormir par des voisins fêtant un peu bruyamment, à des heures indues, la rupture du jeûne du ramadan ! La classe politique s’est ainsi, une fois de plus révélée comme un monde où la lâcheté le dispute à l’opportunisme, et où l’avidité tient plus de place que la recherche du bien commun.
Les responsabilités du Front national
Il serait cependant puéril de croire que la responsabilité de cet état de fait incombe exclusivement au « Système ». Si le FN a certes été rejeté par l’appareil politique et les médias dominants il a également, volontairement, cultivé cette exclusion. Jean-Marie Le Pen par ses provocations, Marine par son rejet abrupt d’une classe politique uniformément désignée comme mondialiste, et au sein de laquelle il serait inutile de faire des distinctions entre, par exemple, Laurent Wauquiez et Claude Bartolone. Ce choix, stratégique ou de conviction, a permis au Front national de s’assurer le monopole des voix de ceux qui souhaitaient réagir et d’assécher autour de lui toute concurrence. Électoralement, il a permis au parti d’engranger un maximum de voix au premier tour, et il explique ses succès. Mais il lui interdit, dans le même temps, les alliances avec des concurrents désignés comme des traîtres. Il empêche, par voie de conséquence tout accès du F N au pouvoir, sauf à faire, tout seul 50 % des voix, ce qui n’a jamais été le cas d’aucun parti sous la Véme République. Dès lors, la part de responsabilité, indirecte, du FN dans ce processus de décadence tient à ce qu’il a préféré et préfère encore l’aggravation de la décadence, parce qu’elle lui permet seule d’espérer la grande alternance, à un partage du pouvoir qui aurait pu lui permettre de limiter les dégâts. C’est un choix qui peut se défendre, mais qui interdit de jouer les victimes quand on en subit soi-même les conséquences.
Le résultat concret de tout cela, est que la protestation prophétique de Le Pen a été stérilisée par ses choix électoraux. Il a montré les solutions mais les a rendues infréquentables. Marine a accentué ce phénomène puisqu’elle a associé ces solutions, non seulement à des préoccupations purement matérialistes mais à un programme économique d’inspiration socialo-chevènementiste. .
La souveraineté pour quoi faire ?
La souveraineté n’est pas un but en soi. Elle est la condition préalable pour échapper au carcan européiste, permettre à la France de renouer avec son destin et mener l’indispensable réforme intellectuelle et morale dont notre pays a besoin. Il est conforme à la dure loi de la vie que les peuples jeunes et prolifiques rejettent dans les poubelles de l’histoire les peuples vieillissants, surtout s’ils doutent d’eux-mêmes. La terre appartient aux vivants ! Il n’est un secret pour personne que le Front national est partagé entre deux lignes politiques qui correspondent en fait à deux analyses différentes de la crise que vit notre pays.
La ligne Marine Le Pen- Florian Philippot privilégie les questions économiques dans une approche étatiste et jacobine : retour de la retraite à 60 ans, augmentation des bas salaires de 200 Euros, renforcement du rôle du ministère de l’Éducation nationale, etc. Marion Maréchal privilégie au contraire les questions identitaires et de société en participant à La Manif Pour Tous, prévoyant de supprimer les subventions du Planning familial, acceptant de prendre sur sa liste Philippe Vardon, responsable desIdentitaires à Nice. Les urnes ont tranché le week-end dernier. Dans une configuration identique, face à un candidat de droite, le candidat socialiste s’étant retiré, le score de Marion Maréchal est très sensiblement supérieur à celui de sa tante. Être ferme sur les questions de société ne nuit donc pas au report des voix, en particulier de droite, bien au contraire. Wallerand de Saint-Just, candidat du Front national en région parisienne qui avait été d’une lâcheté insigne lors de sa campagne à propos des subventions au Planning familial, s’en est aperçu à ses dépens, laissant prospérer, au premier tour, sur sa droite, la liste de Nicolas Dupont Aignan et perdant un grand nombre de voix au second .
L’expérience montre qu’il sera difficile au Front national d’accéder au pouvoir s’il n’accepte pas de rompre avec certaines figures imposées de la Pensée Unique comme il a rompu avec la doxa mondialiste. Marine Le Pen est-elle consciente que, vis-à-vis des catholiques de France, il en reste !, défendre l’avortement libre c’est faire l’apologie de la shoah devant le consistoire israélite ou agiter la muleta devant le taureau ?
Reste que Marion Maréchal a fait voir, elle-même, ses faiblesses en refusant publiquement de s’associer avec le « vieux Font national » incarné par Bruno Gollnisch. Elle a semblé montrer par là qu’elle préférait sa position de chef de bande, et un « jeunisme » qui entretient sa relative popularité dans les médias, à la réunion, au sein d’une même équipe, d’élites capables de faire face à la situation catastrophique de la France.
La démocratie moderne
De nombreux commentateurs se sont émus de la piètre image de notre démocratie transmise par le résultat de ces élections. C’est, me semble-t-il, n’avoir rien compris à ce qu’est la démocratie moderne. En effet la démocratie moderne, fille en France de la Révolution française et de la Terreur n’est pas le « pouvoir du peuple, par le peuple, pour le peuple ». Elle est le culte de l’individu-roi, déraciné, massifié, libéré de tout déterminisme, réduit aujourd’hui à sa seule dimension de producteur et de consommateur. Tout vote en ce sens est un vote démocratique, tout vote à rebours de ce prétendu sens de l’histoire est un vote populiste. Ce qui est encore reproché par le Système au Front national, celui-ci s’étant rallié aux valeurs dominantes sur les questions de société, c’est qu’il refuse, par son attachement à la nation cet ultime déracinement. Il est d’autant plus triste que les intellectuels (Gollnisch, Chauprade, Couteaux, etc.) qui auraient pu, en son sein, prendre de la hauteur sur ces questions de fond n’aient désormais plus voix au chapitre dans ses instances dirigeantes.
> Jean-Pierre Maugendre est le président de Renaissance catholique.
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