Le rêve fou d’une démocratie directe à la française

Devant le CESE c’est le sourire des grands jours. Tous les militants des Yvelines sont là : Emmenés par Philippe Brillault, ils ont réussi ! Pendant des jours et des nuits ils ont ouvert des enveloppes, vérifié des signatures, comptabilisé des feuillets. La hantise : qu’un excité de la LGBT commette un attentat au vitriol sur les précieux cartons, en détériore ou, plus grave, blesse quelqu’un. Les bénévoles de la sécurité forment une haie d’honneur aux volontaires qui déchargent le fruit de leur labeur. On retrouve quelques têtes connues, on se congratule, j’aperçois Philippe D. que je n’ai pas vu depuis 10 ans. Frigide froufroute à grand bruit de talons dans ce palais art déco avec un nuage de journalistes. Virginie Tellene, Frigide Barjot, c’est la porte parole, le combattant médiatique. Un instinct redoutable, un tempérament de feu, une passion infatigable, un talent pour convaincre l’autre, elle bouillonne d’idées, de sentiments et d’émotions : elle est habitée par la cause. Son look est travaillé, face caméra, elle se met en scène, se costume ; blouson de cuir, robe de princesse, sweat à capuche, cheveux au vent ou chignon d’actrice. Elle prend à partie le Président de la République et le peuple de France à témoin. Elle tonne, exige, tempête. Guidée par sa foi, son émotion, elle improvise et réagit, elle attaque et se défend. Dans la rue, dans les médias, devant les institutions le mouvement monte en puissance. Nous sommes certains de notre force. Plus de 700 000 pétitions sont déposées par deux camions de livraison pour saisir ce conseil d’experts « éclairés ». Eclairés d’une sombre lueur qui leur fera balayer d’un geste large et définitif ces centaines de milliers de signatures. Le sujet, ni économique, ni social, ne les concerne pas. Après les mensonges du 13 janvier, c’est le second déshonneur de la république.

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Les couples de même sexe n’ont pas attendu cette loi pour vivre leur vie. Aussi ne constitue-t-elle en rien un changement ni une révolution : elle pérennise et confirme un état ancien, à savoir le fait que des personnes de mêmes sexes vivent en couple. Ce « changement » est l’affaissement d’une autorité qui n’en a plus et entérine a posteriori ce qu’elle n’a su ni limiter, ni impulser. Par la crainte de ne pas susciter l’adhésion, l’autorité s’affaiblit et la société, de compromis en pondérations, devient lentement immobile, se fige, se crispe et s’enkyste, se croyant moderne, bercée de l’illusion d’une liberté « originelle ». Le bonheur est devenu impossible dans un monde qui invoque un changement obsessionnel qui ne vient jamais. Peu à peu étouffée par les idées en vogue, l’autorité est aujourd’hui inversée dans l’esprit commun avec ce qu’elle n’est pas : le pouvoir et la puissance. Cette nouvelle réalité rejoint cette pratique très américaine que les anglo-saxons appellent le soft power. Un pouvoir mou, ectoplasmique, étouffant comme le serait un édredon. La sensation est douce mais l’issue fatale. Plus que la force, c’est le temps qui est la variable. Si le soft power n’obtient pas ce qu’il veut, il postpone son échéance, ralentit le rythme « la société n’est pas mûre » et pousse pas à pas ses pions en-dessous du seuil de visibilité des radars citoyens. Dans la pensée classique, autorité et pouvoir sont différenciés : Auctoritas et Potestas. L’auteur, auctor est l’autorité qui inspire, qui conçoit et qui fonde, et l’artisan, artifex est la puissance qui fait, qui réalise et qui exécute. C’est en l’absence d’autorité que le pouvoir devient artifice et par la contrainte prospère en tyrannie. L’autorité est première, elle s’impose d’elle-même sans recourir à la force ni au compromis. La racine du mot est celle du verbe latin augeo qui regroupe plusieurs significations : accroître, développer, enrichir, exalter, agrandir. Cette racine a donné les mots auguste, augure, augmenter, auteur. L’autorité est liée à la fondation de l’institution. Elle préserve de toute dérive en rattachant l’action aux augures, aux auspices, dans une transmission, une continuité, un développement, une croissance. Elle n’est pas simplement « autorité morale » elle est surnaturelle, ancestrale, divine. Auctoritas et Potestas sont liées par la fides, la confiance, qui suscite l’action. Prééminente, l’autorité ne se délègue pas : elle est consubstantielle à l’auteur. Si le pouvoir et la puissance défaillent, seul l’auteur est le garant. Dans la république romaine classique le pouvoir était le fait des citoyens et du peuple et l’autorité appartenait au Sénat et aux augures. Dans la famille, elle est aux fondateurs que sont les parents. L’autorité est propice au changement, car elle engendre l’action ne serait-ce que par réaction. Car elle a pour contrepartie nécessaire et indispensable la liberté.

Le CESE s’est comporté avec les 700 000 signataires de la pétition à l’image de bien des institutions qui protègent la société et la famille. Entre 2007 et 2012 j’ai demandé 7 ou 8 fois à la justice de changer la résidence de mes enfants. J’ai été traité avec le même mépris. Même lorsque le compagnon de leur mère, Valetas était violent avec mes enfants. Même lorsqu’ils ont réclamé par écrit ce changement. Même lorsque leur mère était en partance pour l’étranger et refusait de donner son adresse à la justice. Même lorsqu’ils étaient à ma charge ou à la charge de mes parents. Et même lorsqu’ils ont physiquement vécu avec moi. Jamais la justice n’a varié. A aucun moment, jamais, jamais, jamais je n’ai été jugé digne par mon pays, de voir résider sous mon toit mes trois enfants éloignés de force par la volonté d’un tiers. Saint-cyrien, chef d’entreprise, propriétaire d’une résidence secondaire, finançant études, loisirs, vêtements, pour ces magistrats des « affaires familiales », l’auteur, le fondateur, par un renversement de situation, en est artificiellement démis. Père à 20 ans et patron à 29, ai-je bousculé les nouvelles convenances ? Dans le nouvel ordre bourgeois, cela ne pardonne pas. J’aurais du me montrer raisonnable, refuser cette chance de donner la vie à 20 ans dans la force de l’âge, prendre mon temps, j’aurais du attendre sagement d’hériter du cabinet de papa, ou rester dans le chemin de la plus belle des carrières : celle des armes. Bref, j’ai eu trois autres enfants avec Lisou. Lisou, c’est la compagne de toutes ces mésaventures. Un sang eurasien coule dans ses veines. Son grand père a servi dans la Légion Etrangère de 1939 à 1963. En Indochine il encadrait des partisans. Je ne connais pas ses états de service mais je me plais à imaginer qu’il était l’un des chefs de section d’Hélie de Saint-Marc, qui a commandé une compagnie autochtone en garnison à Vientiane, là où le père de Lisou est né. Je l’imagine aussi côtoyant le parrain de mon père et le frère de mon grand père tous deux tués là-bas, et les autres guerriers célèbres, Vandeberghe, Sassi, ces chefs de commandos qui opéraient aux confins du Laos et du Cambodge et vivaient comme les « viets ». Lisou c’est une miette d’empire, l’enfant de cette si grande France dont on ne parle plus, cette France d’autrefois, trop grande, trop vieille, qui encombre le bon bourgeois et dont il ne veut plus. Comme dans le design actuel il faut faire table rase : la beauté contemporaine est clinique, étanche, lisse, froide, si impénétrable que l’on se voit dedans. Le bourgeois n’aime pas les perdants, ceux qui sont du mauvais côté de l’histoire. Il n’aime pas les russes blancs, les harkis, les nationalistes viets ou chinois, les pères divorcés, les équipes de France de foot battues. Il n’y a que les soldats, les duellistes et les rugbymen qui savent que même si seule la victoire est belle, le combat l’est aussi.

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12 Comments

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  • PG , 18 juillet 2014 @ 21 h 27 min

    @ Maxime de la Devèze

    Vous qui louangez la MPT comme un monument de cnscience et de logique politique, et souhgaitez une démocratie directe, comment ne pas vous rappelez cette phrase de votre conclusion : ”les bourgeois n’aiment pas les perdants”.
    Car elle se téléscopent très directement avec le réel : la démocratie directe est une idée imposée en France par un homme, Jean-marie LE PEN.
    Or cet homme les bourgeois (au sens où vous l’entendez) catholiques et conservateurs, l’ont considéré comme un perdant, ou le représentant des perdants/ Il était de bon ton dans les dîners de la banlieue Ouest des années 80-90 de dire : Oui, il pense juste, mais il ne représente que les inadaptés, les sans diplômes, le petit peuple, bref le sgens qui ne sont pas dans la course. Course de quoi ? Du fric hérité ou des réseaux familiaux ? Ou de qq autres plus discrets, mais fermés au vulgus. C’était déjà très ”bourgeois” (au sens où vous l’entendez) car il y avait déjà dans cet électorat des Français de tous milieux et niveaux sociaux.
    Mais cette proscription des bourgeois catholiques (au sens où vous l’entendez) les a conduit à ne pas voter pour ce perdant, et donc pour al dméocratie directe : al démocratie faussée de Chirac Veil et de Sarkozy Veil leur suffisait, elle ne bougeait rien et leur promettait à chaque présidentiellenon pas une politique de la vie, mais de sbaisses d’impôts voire la fin de l’ISF, Graal absolu. Car qquand on ets catholique bourgeois (ausens où vous l’entendez) voter démocratie directe et politqiue de la vie obtenue par ce moyen démocratique contre baisses d’imôts et fin de l’ISF, la cause était entendue : entre Isf et Ivg, quelle valeur promouvait le vote Chirac puis le vote Sarkozy ?
    Aussi, regardez bien autour de vous, les Brillault et autres élus, les cadres de la MPT issus de l’UNI-UMP, sans parler de qq autres plus discrets et moins connus, mais porteurs de l’argent et des contrats des sociétés de service et de conseil en com etc…….. : Isf ou Ivg ?
    Aussi, souffrez que je vous dise sans détour : votre article est plaisant, mais il est une jérémiade sur les erreurs et els manquements de vos amis. Inutile d’incriminer le système ou le système sous la gauche : c’était sous la droite qu’il fallait également exiger la démocratie directe, ne pas attendre une réforme qui ne concerne que qq dizaines d emilliers de personnes, alors que l’Ivg (pas l’Isf) concerne toutes les femmes de France, et les pères s’ils veulent encore l’être.
    Democratie directe quand cela vous arrange, sous la gauche, mais pas démocratie directe quand cela ne vous concerne pas, sus la droite ?
    Je ne sais pas si vous percevez la contradiction de ces bourgeois (au sens où vouis l’entendez) mais avec lesquels vous avez mené une MP vouée à l’échec : quand on a lâché sous la droite, il est vain de se faire plaisir en vaticinant sous la gauchedes ”On ne lâche rien ”.
    Réfendum d’initiatiive populaire : telle était le programme de J-M Le Pen en 1988. Mais le mot populaire, sans dout, était-il trop connoté ”perdant” au sens où vous le définissez pour vos amis de la MPT, bourgeois au sens où vous l’entendez..
    Mais en 2012, 2013, 2014, ce sont eux les perdants, au sens où vous le définissez.

  • albatroce , 19 juillet 2014 @ 8 h 10 min

    et d’ajoute” quand un peuple cesse d’estimer il cesse d’obeir”

  • mino , 19 juillet 2014 @ 11 h 11 min

    ‹‹ Quand un peuple cesse d’estimer il cesse d’obéir. ›› Est-ce une (belle) citation de Rivarol ou simplement un souhait qui résonne dans le vide infini des consciences populaires sans produire d’effet ?

  • champar , 19 juillet 2014 @ 11 h 19 min

    J’aimerais avoir l’avis éclairé des juristes de droit constitutionnel : Le tribunal administratif a annulé le rejet de la pétition par le bureau du CESE donc cette pétition était valide avant le vote de la loi.
    Il nous avait été indiqué à l’époque que la loi ne pouvait être votée qu’APRES l’avis du CESE, je pense qu’il y a là une cause de nullité de la loi, qu’en pensent les constitutionnalistes ?
    Evidemment j’écris sans incorporer la pourriture du conseil con stitutionnel.

  • hectorgalb , 19 juillet 2014 @ 12 h 18 min

    “les bénévoles de la sécurité”.. Euh, les bénévoles de la sécurité ont e ce travail inutile puisque aucun incident ne s’est produit sauf causé par l’excitation de cette “sécurité” ; et le travail de dépouillement des courriers s’est fait sans ces clowns.

  • hectorgalb , 19 juillet 2014 @ 12 h 22 min

    edit: Cela dit, à part ce prologue qui m’a irrité, le reste de l’article est bon, hein ;)

  • xtemps , 19 juillet 2014 @ 13 h 29 min

    Quand on parle de la démocratie, c’est du peuple que l’on parle, pas des élus qui ne sont que les représentants du peuple.
    Les dictatures n’ont jamais voulu la démocratie et nous sommes dirigés par une dictature, ils ont toujours écarté le peuple et sa souveraineté, pour avoir le pouvoir à la place du peuple et, cette même dictature “union européenne” a confisqué la démocratie de tous les peuples Européens, ” nous les Européens” les plus grands exclus, discriminés, diabolisés et persécutés, avec leurs politiques bon pour les peuples et fermez la.
    Il est temps de se battre, nous les peuples autochtones, pour la démocratie ” la nôtre, la vrai” notre pouvoir contre les dictatures qui n’ont jamais représenté les peuples Européens, vive la démocratie!, vive la liberté!.

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