Libertariens donc conservateurs ? Conservateurs donc libertariens ?

Les libertariens doivent-ils être conservateurs ? C’est la question que posait Jay W. Richards, le 25 avril dernier, dans la publication en ligne The Public Discourse. Le philosophe rappelle qu’il y a plus de cinquante ans, Frank Meyer Straus (1909-1972) a inventé puis développé dans les colonnes de la National Review le concept de fusionnisme », tentant de combiner, d’articuler traditionnalisme et libertarianisme. Meyer et d’autres savaient que le conservatisme fiscal a besoin du conservatisme social, et vice versa. Le marché libre nous permet d’exercer notre créativité et notre vertu, par exemple, mais il a aussi besoin d’acteurs (les citoyens) raisonnablement vertueux. Une population de voleurs créerait l’anarchie, pas la liberté.” C’est pourquoi, pour Richards, un libertarien ne peut qu’être conservateur.

Libertarien donc hostile à la redéfinition du “mariage” homosexuel et au meurtre de l’enfant à naître

Prenez par exemple la question du “mariage” homosexuel : « Tout comme l’État ne peut pas redéfinir nos droits individuels, il n’a pas le pouvoir de redéfinir le mariage” qui a toujours été et sera toujours l’union d’un homme et d’une femme. Après le communisme qui a tenté sans succès de redéfinir l’individu et le mariage, nous assistons avec les partisans du “mariage” gay à une autre tentative totalitaire de redéfinir la réalité, ajoute-t-il. Et de s’interroger : “Si l’État, qui travaille aujourd’hui main dans la main avec la plupart des médias, peut redéfinir une institution universelle enracinée dans la nature humaine, qu’est-ce qu’il n’a pas le droit de redéfinir ?” C’est pourquoi, d’après lui, “les convictions centrales du libertarien moyen peuvent trouver un repos paisible dans la maison conservatrice” et font de lui “un allié proche”.

Pour les libertariens, l’axiome de la non-agression est central et l’emploi de la force ne se justifie que dans l’auto-défense, rappelle quant à lui Laurence M. Vance le 14 mai dernier sur LewRockwell.com. Parce que le meurtre est la forme ultime de l’agression, ils doivent s’opposer à l’avortement, question de cohérence. Encore faut-il, pour cela, admettre une évidence, celle que l’enfant dans le sein de sa mère est un enfant. Pour l’auteur libertarien, la question du mariage gay est réglée : “Dieu a créé Adam et Eve, pas Adam et Steve”.

Le libertarianisme, cœur et âme du conservatisme ?

Mais Laurence M. Vance s’interroge : “Pourquoi deux personnes ont-elles besoin de la permission de l’État pour se marier ? Qui sait mieux si deux personnes sont aptes à être mariés que les deux individus ?”. Il rappelle au passage que “le mariage a précédé l’État. Il n’a pas besoin de la protection, de la réglementation ou de la surveillance de l’État pour poursuivre son existence.” L’écrivain s’en prend au passage à ces soi-disant conservateurs, sauf dans les actes (John McCain qui a confirmé les juges pro-avortement Stephen Breyer, Ruth Ginsburg et David Souter à la Cour suprême, George H. W. Bush qui a nommé ce dernier) ou à George W. Bush qui n’a pas retiré son financement public à Planned Parenthood. Ou encore à ces multi-divorcés, comme Newt Gingrich, qui sont les premiers à prendre la parole pour défendre les valeurs familiales.

Et si, comme le disait Ronald Reagan“le cœur et l’âme du conservatisme [étaient] le libertarianisme” ? Selon Laurence M. Vance, les vrais conservateurs, les militants pro-vie, les partisans de la famille sont des libertariens qui, parfois, s’ignorent. Et surtout pas des conservateurs, comme ces politiciens qui haïssent plus la gauche que l’État, qui défendent plus le passé que la liberté, qui adulent l’État-providence (“La seule différence entre les conservateurs et les gauchistes, c’est l’identité des personnes qu’ils souhaitent imposer et l’identité des personnes qu’ils souhaitent voir recevoir le butin”, se moque Jacob Hornberger, président de la Fondation Futur de la liberté), qui sont militaristes et qui mènent la guerre contre la drogue.

Le débat est ouvert…

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5 Comments

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  • Isidore , 23 juillet 2012 @ 13 h 26 min

    Le libertarianisme étant le nom en américain du libéralisme économique en Français.Certes le mot de libéralisme à lui seul comporte une certaine ambigüité,qui lui amène plusieurs sens.On a confondu par exemple libéralisme et libertinisme,moral,voire sexuel.Ou bien devant le succès du mot tout le monde veut s’en emparer(et s’en parer).
    Or si on parle de libéralisme économique,cela a un sens précis et tout à fait défini et délimité.
    Il s’agit non pas de détruire l’Etat,mais de demander à l’Etat de défendre les libertés concrètes non contraires ni à la morale,ni à la vie sociale et à la civilisation,au lieu de restreindre celles-ci.Il s’agit donc qu’il ne pèse pas sur les activités et les initiatives normales et créatives des individus.
    Donc qu’il se définisse comme le défenseur de la société et des individus,des gens, honnêtes.
    Ce qui aboutit à un Etat honnête,lui-même.
    En ce sens,la demande d’un Etat libéral(une société ne pouvant l’être que si l’Etat l’est le premier par le respect des lois fondamentales),est naturellement et simultanément conservatrice et anti-révolutionnaire.Non pour faire obstacle à ce qu’on appelle le progrès,mais parce qu’elle est elle-même la source de ce progrès matériel qui ininclut le respect de la dignité humaine et de ce que notre Moyen-Âge nommait “le droit des gens”.

  • Eric Martin , 23 juillet 2012 @ 14 h 33 min

    Je dirais plutôt que le nom américain du libéralisme économique est “conservatisme” ou “conservatisme fiscal”. Le libertarianisme va plus loin que le simple libéralisme.

  • Raffarin2012 , 24 juillet 2012 @ 16 h 06 min

    Ils utilisent également l’expression”classical liberal”.

  • Raffarin2012 , 24 juillet 2012 @ 16 h 08 min

    Une excellente revue “fusionniste” (même si la ligne éditoriale est plus diverse) :

    http://www.theamericanconservative.com/

  • Lach-Comte , 17 février 2013 @ 15 h 02 min

    Il doit décidément bien y avoir un autre mot en français que “libertarien” – qui fait plus penser à “végétarien” qu à “libéral” ! Il faut absolument trouver un équivalent audible pour un Français ordinaire qui a déjà du mal avec toute notion de libéralisme économique et politique, tant on lui a inculqué des faussetés et des âneries, sinon le “libertérianisme” (impossible à prononcer dans une conversation!) risque de rester une notion fumeuse. Mais, bon, moi ce que jen dis …

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