Le docteur Wim Distelmans est connu en Belgique pour son activisme en faveur de l’euthanasie. Il est chef du service des soins palliatifs à l’Université libre flamande de Bruxelles, fondée par des libres-penseurs au XIXe siècle. Il est aussi titulaire de la chaire de fin de vie dans cette université et ancien président de la fédération flamande des soins palliatifs. Last but not least, il préside la Commission belge de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie depuis la légalisation de cette dernière en 2002, se retrouvant juge et partie !
Il y a quelques jours, le Dr Distelmans a informé qu’il organise en octobre prochain un voyage d’études à Auschwitz, le camp d’extermination nazi. avec des professionnels de santé. Dans une brochure adressée par courriel à ses contacts il précise ses motivations :
« La Belgique est le seul pays au monde disposant d’une législation qui se soucie d’une fin de vie digne pour chacun, grâce à la loi sur les droits des patients, la loi sur les soins palliatifs et la loi sur l’euthanasie.(…) Dans la problématique globale de la fin de vie, l’on se trouve sans cesse confronté à la douleur existentielle, à la question du sens, à l’introspection, la dépendance et l’autonomie, l’idée de l’achèvement et surtout de la (de l’in-) dignité. C’est pourquoi il nous a semblé plus que logique d’organiser notre prochain voyage d’études dans un lieu qui est par excellence le symbole d’une fin de vie indigne de l’homme : Oświęcim, mieux connu sous le nom d’Auschwitz, le camp d’extermination nazi en Pologne. Ce lieu nous semble apte à susciter l’inspiration afin d’y réfléchir, en séminaire sur place, à cette problématique, afin de lever la confusion. »
Le Dr Distelmans a souvent fait la une des médias. Il a euthanasié Nancy Verhelst, transexuelle belge de 44 ans, en grande souffrance à la suite d’une opération de changement de sexe ratée. Il a effectué la première euthanasie double sur les jumeaux Marc et Eddy Verbessem, en invoquant des souffrances psychiques dues à la perspective de devenir progressivement aveugles. M. Tom Mortier, fils d’une femme souffrant d’une dépression chronique a porté plainte récemment au parquet de Bruxelles contre lui. Le même docteur avait procédé, il y a deux ans, à l’euthanasie de sa mère. Apparemment la commission d’évaluation de la loi a estimé que la procédure avait été respectée. Or celle-ci est présidée par… Distelmans. Ce conflit d’intérêt ne gêne personne en Belgique. Bien sûr, aucune des 2 000 déclarations d’euthanasie contrôlées par cette commission n’a été transmise au procureur.
La loi du 28 mai 2002 dépénalise l’euthanasie active qui est définie dans la loi comme étant “l’acte, pratiqué par un tiers, qui met intentionnellement fin à la vie d’une personne à la demande de celle-ci”. L’acte d’euthanasie est autorisé sous trois conditions :
– le patient doit être majeur (ou mineur émancipé), capable et conscient au moment de sa demande qui doit être formulée de manière volontaire, réfléchie et répétée et sans pression extérieure ;
– le patient doit souffrir d’une affection incurable et faire état d’une souffrance physique ou psychique constante et insupportable ne pouvant être apaisée.
le médecin qui pratique l’euthanasie doit être volontaire.
En 2013, en Belgique, 20 414 déclarations anticipées d’euthanasie ont été enregistrées. Ces déclarations permettent d’exprimer le souhait d’être euthanasié dans le cas où l’on ne serait plus en état de manifester clairement sa volonté.
La dérive dans l’application de la loi ne concerne pas que le Dr Distelmans. Une étude publiée en 2009 dans la revue American Journal of Critical Care révèle que des médecins et des infirmières ont procédé à l’euthanasie sur 25 enfants, alors que cette pratique n’était pas autorisée pour les mineurs à cette époque. Les auteurs d’une étude parue en septembre 2010 (Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie, troisième rapport aux Chambres législatives, années 2006 et 2007) ont constaté que beaucoup de cas d’euthanasie ne sont pas rapportés aux autorités, et même qu’il n’y a pas eu consentement du patient dans de nombreux cas. Selon cette enquête, sur les 54 881 morts recensées en Flandres en 2007, 1 042 décès (1,9%) sont survenus à la suite d’une euthanasie pratiquée sur demande, alors que seulement 495 euthanasies ont été déclarées à la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’application de la loi sur l’euthanasie. En janvier 2013, la presse belge s’est fait l’écho d’euthanasies qui ne semblaient pas a priori rentrer dans les conditions d’application de la loi. Ainsi, une femme anorexique de 44 ans a été euthanasiée en raison de sa souffrance psychique. Ainsi, un détenu en prison a été euthanasié en 2012 à sa demande, sur simple invocation de sa souffrance d’être privé de liberté.
Tout cela n’empêche pas une certaine fuite en avant de la Belgique qui est devenue le 13 février 2014 le premier pays au monde à légaliser l’euthanasie pour les enfants et adolescents atteints de maladie incurable et affrontant « des souffrances insupportables », à condition qu’ils jouissent d’une capacité de discernement, évaluée par un psychologue ou un pédopsychiatre. Globalement, les socialistes, libéraux, écologistes et nationalistes flamands de la N-VA (Nouvelle Alliance flamande) ont voté en faveur du texte, auquel se sont opposés les élus chrétiens-démocrates et les autres nationalistes flamands du Vlaams Belang (Intérêt flamand).
Revenons à Auschwitz. L’essentiel de l’argumentation du docteur consiste à mettre en contradiction l’indignité de la mort des camps d’extermination avec la dignité supposée de la mort « choisie » par euthanasie. À noter que le concept d’euthanasie est à la fois un mot de « novlangue » orwellienne puisqu’il signifie « bonne mort » en grec et un oxymore puisqu’il n’y a pas de bonne mort. Il est vraiment confondant que ce monsieur à bac plus 10 ne comprenne pas le confusionnisme de sa démarche et les risques de conforter les courants du darwinisme sociétal et autres nazillons. À moins que…
« Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre ». Churchill parlait d’or.
En octobre 1939, Hitler lance le programme d’euthanasie qui reçut le nom de code “T4”. Six installations de gazage furent mises en place dans le cadre de ce programme : à Bernburg, Brandenburg, Grafeneck, Hadamar, Hartheim et Sonnenstein. Les victimes comprenaient à l’origine les enfants et les adultes atteints de déficiences, d’anomalies physiques ou de maladies mentales. Elles étaient tuées dans des chambres à gaz avec du monoxyde de carbone pur. Leurs corps étaient immédiatement incinérés dans le four crématoire des installations de gazage. Les experts qui y prirent part contribuèrent plus tard à la mise en place et au fonctionnement des camps de mise à mort de la “Solution finale”. Une urne était envoyée à la famille de chaque victime, avec un certificat de décès donnant une cause de mort fictive.
Hitler donna l’ordre d’arrêter le programme en août 1941, car les exterminations provoquèrent des protestations publiques, notamment de la part d’évêques catholiques. L’évêque de Münster, Clemens August von Galen, prit position dans un sermon prononcé le 3 août 1941 qui eut un retentissement mondial. L’évêque de Limbourg adressa au ministre de la Justice une lettre condamnant ces meurtres et celui de Mayence prononca un sermon dans ce sens.
Cependant, en août 1942, les exterminations reprirent en secret. Les victimes furent assassinées par injection mortelle ou surdose de drogue. Le Programme d’euthanasie s’étendit aux soi-disant “asociaux”, aux patients en gériatrie, aux victimes des bombardements et aux travailleurs forcés étrangers. De 1939 à 1941, environ 70 000 personnes furent tuées dans le cadre du Programme d’euthanasie. On estime le nombre total des victimes jusqu’en 1945 à 275 000 personnes. Chose peu connue, en Alsace annexée de facto, 49 malades mentaux de l’hôpital de Stephansfeld-Brumath ont subi l’euthanasie en 1944.
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